Même l'abbé Gleize vous donne tort par Meneau 2013-10-22 14:16:37 |
Imprimer |
Même si bien sûr il n'en tire pas les mêmes conclusions.
L'enseignement du Pape parlant ex cathedra et celui du Concile oecuménique correspondent à l'infaillibilité du Magistère
solennel ou extraordinaire, tandis que l'enseignement unanime de tous les évêques dispersés, sous l'autorité du
Pape, est l'enseignement du Magistère ordinaire universel.
Il est question de ce Magistère ordinaire universel dans la constitution dogmatique Dei Filius, du Concile Vatican I. Il
est dit que «l'on doit croire de foi divine et catholique tout ce qui est contenu dans la Parole de Dieu, écrite ou transmise
par la Tradition, et que l'Eglise propose à croire comme divinement révélé, soit par un jugement solennel, soit par son
Magistère ordinaire et universel» (DS 3011).
Et dans la Lettre Tuas libenter du 21 décembre 1862, le Pape Pie IX parle du «Magistère ordinaire de toute l'Église
dispersée dans tout l'univers» (DS 2879).
Lors du Concile Vatican I, dans un discours du 6 avril 18703, le représentant officiel du Pape, Mgr Martin, donne à
propos du texte de Dei Filius la précision suivante : «Ce mot "universel" signifie à peu près la même chose que le mot
employé par le Saint Père dans la lettre apostolique Tuas libenter, à savoir le Magistère de toute l'Eglise dispersée sur la
terre».
(...)
L'universalité actuelle dans l'espace concerne le sujet enseignant : c'est pourquoi c'est une universalité qui a lieu
dans l'espace seulement et non dans le temps. Le Magistère ordinaire universel est de ce point de vue l'enseignement du
corps épiscopal prêchant de vive voix ; l'unanimité dont il résulte est l'unanimité des évêques de l'instant présent de
l'histoire, hic et nunc. Si en se plaçant du point de vue du sujet, on dit que ce Magistère est l'unanimité de tous les
évêques et de tous les Papes depuis saint Pierre et les apôtres, on détruit ipso facto la notion même de Magistère ordinaire,
prêchant de vive voix.
La constance, en revanche, concerne l'objet enseigné : c'est une universalité qui est non seulement dans l'espace
mais aussi dans le temps. Le Magistère ordinaire universel est la proposition de la doctrine révélée. Or, cette doctrine est
immuable substantiellement, ce qui veut dire qu'elle demeure inchangée à la fois dans le temps et dans l'espace,
non seulement d'un bout à l'autre de la planète, mais aussi d'un bout à l'autre de l'histoire.
Le Magistère ordinaire est par définition un Magistère traditionnel : c'est un Magistère qui prêche aujourd'hui et qui ne
peut pas être en désaccord avec le Magistère d'hier, comme le dit saint Paul dans l'épître aux Galates, chapitre 1,
versets 8-9 : «S'il arrivait que nous-mêmes ou un ange venu du ciel vous enseignions autre chose que ce que je vous ai
enseigné, qu'il soit anathème».
c) Et "l'assentiment qui lui est dû est celui de la foi divine, qu'il ne fonde pas [à proprement parler c'est la Révélation - Dieu en tant qu'il se révèle - qui le fonde] mais qu'il se borne à conditionner".
4.1) LA RÈGLE DU COMMONITORIUM
Saint Vincent de Lérins énonce sa fameuse règle en ces termes : «Dans l'Église catholique elle-même, il faut veiller
soigneusement à s'en tenir à ce qui a été cru partout, toujours, et par tous. Car c'est cela qui est véritablement et proprement
catholique. [...] Et il en sera ainsi si nous suivons l'universalité, l'antiquité, l'accord unanime»15. Comme le remarque
Franzelin16, cette règle pourrait s'entendre dans un sens à la fois affirmatif et exclusif de toute la vérité - et seulement
de la vérité - crue, partout, toujours, et par tous. Mais dans l'esprit de saint Vincent de Lérins, cet adage doit s'entendre
dans un sens seulement affirmatif, et non pas exclusif, des vérités crues explicitement. Toutes les vérités qui réclament
aujourd'hui une croyance explicite de la part des membres de l'Eglise ont toutes été crues partout, toujours, et
par tous ; mais elles l'ont été d'une manière ou d'une autre, explicitement ou implicitement. Il ne s'ensuit donc pas que
seules les vérités qui ont été crues, partout, toujours, et par tous de manière explicite peuvent et doivent s'imposer aujourd'hui
à la croyance explicite dans l'Eglise. D'autres vérités ont d'abord été crues de façon seulement implicite, et pas
toujours - ni partout ni par tous - de manière explicite, avant de faire l'objet d'une croyance explicite et unanime. C'est par
exemple le cas de la vérité de l'Immaculée Conception : cette vérité a toujours été professée implicitement avec la plénitude
de grâce dont il est question en Lc, I, 28 et on peut dire à ce titre qu'elle a toujours été retenue dans la foi de
l'Eglise ; mais son explicitation a connu les péripéties que l'on sait, jusqu'à l'acte décisif de Pie IX, avec la bulle Ineffabilis
Deus de 1854.
4.2) L'EXPLICATION DE FRANZELIN
Franzelin explique en détails cette différence entre la croyance explicite ou implicite, dans la thèse 2317. «Il y a une différence
entre les vérités révélées, et cela montre qu'il n'est ni nécessaire ni souhaitable que toutes les vérités révélées
soient contenues d'une seule et même manière dans la prédication des apôtres et dans tout le cours de la tradition». Les
vérités dont la croyance explicite s'imposait tout de suite à tous furent prêchées et transmises dès les origines apostoliques
de manière explicite. Ce sont les principaux mystères de la foi catholique, qui correspondent aux douze articles du
Credo. Mais, remarque Franzelin, ces vérités révélées explicitement possèdent une grande fécondité : «Elles peuvent
correspondre d'une infinité de manières aux exigences des différentes époques. Elles s'opposent aux erreurs fort diverses,
que la faiblesse ou la perversité humaines peuvent inventer. La chose est donc claire : aucun des dogmes révélés
ne fut ni proposé ni énoncé par les apôtres de façon à expliciter toutes ces différentes virtualités, et c'eût été moralement
impossible. Cela était d'autant moins nécessaire que, comme le Christ l'avait promis et institué, les successeurs
des apôtres devaient recevoir, en même temps que le dogme, le charisme de l'infaillibilité, pour pouvoir
répondre aux exigences de chaque époque en proposant et expliquant les vérités révélées».
Toute la prédication de l'Église est déjà en germe dans la prédication des apôtres ; mais de même que le germe n'est
pas encore le fruit mûr, ainsi la prédication des apôtres n'a pas proposé à l'état explicite toutes les vérités nécessaires à
la croyance de l'Eglise. Comme le remarque aussi le cardinal Billot, «l'infaillibilité de la Tradition n'exige pas le moins du
monde que, sans distinction, toutes et chacune des vérités qui font objectivement partie du dépôt de la foi doivent à
chaque époque briller de tout leur éclat sur le chandelier de l'Eglise enseignante, au point que tous pourraient voir distinctement
et explicitement les marques de telle ou telle vérité. Et donc il ne s'ensuit pas non plus qu'il n'y ait jamais pu se
rencontrer quelque vérité au sujet de laquelle ait pu exister à un moment ou à un autre une diversité d'interprétation ou
d'opinion à l'intérieur même du bercail de l'unité et de la communion catholique»18.
Dans la thèse 9, Franzelin résume ainsi cette règle de saint Vincent de Lérins : «Les enseignements de la Tradition
que tous doivent croire explicitement ont toujours rencontré une adhésion parfaitement unanime19. Cependant, la révélation
objective peut renfermer des points de doctrine qui, à un moment ou à un autre, n'aient pas suscité une unanimité
assez parlante ou qui en réalité n'aient même pas fait l'unanimité20. C'est pourquoi, il est impossible qu'une doctrine révélée,
après avoir été unanimement défendue et explicitement professée parmi les successeurs des apôtres, en vienne à
être niée à l'intérieur de l'Eglise. Et réciproquement, il est impossible qu'une doctrine, après avoir été niée et condamnée
à l'unanimité, soit défendue. Mais il peut arriver que l'unanimité la plus parfaite se produise après qu'une doctrine a suscité
des avis différents»21. Nous avons un critère négatif : la prédication actuelle explicite de l'Eglise ne peut pas nier
la prédication passée explicite.
Soutenir le Forum Catholique dans son entretien, c'est possible. Soit à l'aide d'un virement mensuel soit par le biais d'un soutien ponctuel. Rendez-vous sur la page dédiée en cliquant ici. D'avance, merci !
|
93 liseurs actuellement sur le forum |