Benoît XIV vous répond par Réginald 2025-07-22 16:02:40 |
|
Imprimer |
Certains, pour rejeter l’infaillibilité des canonisations, s’appuient sur le fait que le Martyrologe romain a pu contenir des erreurs historiques, ou mentionner des figures dont la sainteté semble douteuse. Cet argument, classique, repose sur une confusion fondamentale entre la simple mention liturgique ou hagiographique d’un nom, et l’acte solennel de canonisation accompli par le pape au nom de l’Église universelle.
Cette distinction a été clairement établie par le pape Benoît XIV dans son œuvre monumentale De servorum Dei beatificatione et Beatorum canonizatione, rédigée avant son élection au pontificat mais constamment citée ensuite comme référence. En voici un extrait synthétisé par le P. Emmanuel de Azevedo S.J., consulteur des Sacra Rituum Congregatio, dans une synopse publiée à Bruxelles en 1840, qui expose les quatre fondements majeurs de l’infaillibilité des canonisations et réfute expressément la confusion avec le Martyrologe :
« Chapitre XLIII — Du jugement ecclésiastique qui intervient dans la canonisation des saints, et s’il est infaillible
Quant à moi, je suis saint Thomas (lib. 9, q. 7), ainsi que la majorité des canonistes et des théologiens, qu’ils soient thomistes, scotistes ou néo-thomistes, qui défendent l’infaillibilité pontificale dans les canonisations.
Voici les quatre fondements principaux de cette position :
Premier fondement : Le Pontife ne peut induire l’Église universelle en erreur en matière de mœurs ; or, cela arriverait s’il pouvait se tromper en canonisant quelqu’un, comme le soutiennent saint Thomas et Cano (De locis theologicis, L. 5, c. 5, concl. 3). Cette raison ne vaut pas pour la béatification, car celle-ci ne concerne pas toute l’Église et n’implique pas un précepte accompagné du jugement suprême du Législateur.
Deuxième fondement : L’assistance du Saint-Esprit et la Providence divine spéciale qui guide l’Église dans de tels jugements.
Troisième fondement : La canonisation implique une profession de foi : le culte rendu aux saints est une forme d’acte de foi. Saint Thomas insiste sur ce point. On ne peut répondre que cette foi pourrait être sujette à erreur comme peuvent l’être d’autres actes vertueux tournés vers Dieu — qui sont aussi des protestations de foi selon saint Thomas (IIa IIae, q. 124). Car le même Docteur enseigne que dans le culte des saints, l’Église professe comme vraie, d’un point de vue spéculatif, la gloire céleste du canonisé — une vérité spéculative qui n’est pas toujours requise dans d’autres actes de foi.
Il existe en effet plusieurs degrés de piété dans la foi. Certains objets conviennent à la religion, sans que leur négation soit nécessairement coupable ; d’autres sont tels qu’on ne peut les nier sans arrogance coupable. Dans ces deux cas, une vérité pratique, fondée sur la prudence, suffit.
Mais il existe un degré supérieur : celui des choses que l’Église tient pour certaines et obligatoires, telles que les vérités définies par le Pape par un jugement définitif pour le gouvernement de l’Église universelle. La canonisation appartient à ce degré. C’est ce que saint Thomas indique au même endroit (loc. cit.).
Quatrième fondement : L’histoire montre qu’il y a eu des erreurs dans des cultes rendus à de faux bienheureux par jugement de certains évêques, mais aucune erreur de ce type n’a été constatée dans les canonisations accomplies par les pontifes romains jusqu’à ce jour.
On peut donc conclure, par induction a posteriori, à leur infaillibilité, comme le font Ceparius et d’autres.
Ce raisonnement n’est pas invalidé par l’existence possible d’erreurs dans le Martyrologe romain, car si erreurs il y a, elles ne concernent ni des personnes canonisées ni béatifiées par les papes, mais d’autres figures.
En outre, l’inscription dans le Martyrologe n’équivaut pas à une canonisation formelle ni équivalente (aequipollens). »
(Benedictus XIV, Doctrina de servorum Dei beatificatione et Beatorum canonizatione in synopsi redacta, auctore Emmanuele de Azevedo S.J., consultore Sacrorum Rituum, Bruxelles, 1840, p. 40
Soutenir le Forum Catholique dans son entretien, c'est possible. Soit à l'aide d'un virement mensuel soit par le biais d'un soutien ponctuel. Rendez-vous sur la page dédiée en cliquant ici. D'avance, merci !
|