comme les feuilles en automne...
Je ne voudrais pas que quelques-uns pensent que "le" saint-suaire à Turin a toujours été le seul et l'unique. Les acrobatistes qui trouvent un cheminement textuel ou hypothétique avant son apparition à la collégiale de Lirey sont des truands, mais ils peuvent toujours proposer leurs théories à des revues d'histoire à comité de lecture, même à Rome... Si le saint-suaire était venu par la quatrième croisade, on l'aurait remarqué dans les récits et les archives... Notamment à Troyes où c'est bien documenté, ou à Langres où les dernières reliques de saint Mammès ont été volées aux Byzantins.
Et dites-vous qu'il existe des lecteurs du FC et même des intervenants qui le savent (ou qui sont gênés de le savoir...). Ou des contemporanéistes qui ne peuvent le concevoir, car ce qui est, a forcément été.
Je me moque des appareils photos comme du carbone 14 et de l'al coran.
Je n'ai besoin que des paroles du prêtre pour savoir que le Corps et le Sang du Christ arrivent sur l'autel : pas besoin de preuves d'un autre genre. Et même si le prêtre est le pire des prêtres, comme la réforme grégorienne l'a habilement établi... C'est commode quand on ne peut pas vraiment répondre de la droiture des prêtres en général...
Si on me montre un reliquaire de la Vraie Croix, je le tiens pour tel, en raison du culte des prédécesseurs dans la foi. La présence d'un sceau épiscopal contemporain, si je le trouve plaisant, ne va pas m'aider à jurer que ce bois a vu le Christ et encore moins sainte Hélène.
Quand je vois une ou deux fois l'an une partie du crâne de mon compatriote saint Bernard au trésor de la cathédrale de Troyes, je me dis que c'est peut-être le vrai... mais que je connais aussi d'autres dépôts qui font état de la même partie du crâne. C'est banal. Les chanoines de Paris et les moines de St-Denis se disputèrent longtemps la calotte de saint Denis (qui n'a jamais été évêque en Grèce, sauf dans les légendiers médiévaux...).
Je ne souhaite pas que l'on fasse des expertises d'ADN sur les hosties sanglantes, non plus : phénomène circonscrit dans le temps et l'espace qui servit souvent à rétablir les doutes au temps de diverses hérésies (et encore, pas partout).
Il se trouve qu'hier j'étais destinataire de la dernière lettre du CIHAM, de l'Université de Lyon et que je prenais connaissance de ce chercheur. Je voulais porter à votre connaissance cette jeune personne, qui met de l'ordre dans ce qu'un historien du sentiment religieux médiéval occidental connaît ici et là.
Le saint suaire de Cadouin, c'est pour les chiens ? (pour la rime)
Au XVe s., celui de Lirey suscitait l'indifférence absolue des Français, sans parler des autres... C'est tout de même fou, non ? Les évêques tricasses n'ont jamais voulu mettre la main dessus et le statut du tissu n'avait rien de particulier. Pas d'indulgences démesurées, pas de pèlerinage à encadrer, pas de découpe pour le distribuer au pape, à des cardinaux ou au roi (qui n'en pas demandé pour sa Sainte-Chapelle, dingue, où on collectionnait pourtant la Sainte-Couronne et quelques autres reliques directes du Christ).
Les évêques de Troyes étaient plus prudents que vous, en n'utilisant pas l'expression de relique de la Passion, par respect justement pour le Christ.
Si dire tout cela est irrévérencieux ou anathématisable...
Les traités sur les reliques de certains Luthériens voire de Calvinistes ne racontent pas que des blagues, quand ils énumèrent la multiplicité des cultes loufoques, de faux saints, des tibias de saints qui ressemblent plus à celui d'un boeuf... Des réformateurs bien catholiques ont voulu aussi mettre de l'ordre là-dedans. Et c'est Trente qui a nivelé, comme souvent, le calendrier et le sanctoral de bien des communautés...
On a eu toute même eu un saint lévrier prénommé Guinefort... Heureusement que certains évêques rationnels mirent un peu d'ordre dans les cultes locaux...
Récemment, une carmélite m'a passé un tissu qui a touché les reliques de sainte Agnès parce que j'avais mal à une dent. Il paraît que cela marche par chez eux. Pour lui fait plaisir, je me suis exécuté. Mais je dois manquer de foi, car j'ai maintenu mon rendez-vous de... janvier. Je veux toujours faire plaisir aux amis, mais je n'en pensais pas moins. En cas de batterie fichue sur ma voiture, je préfère le garagiste à une prière ou un coup de goupillon. Homme de peu de foi que je suis.
Article récent de l'une de nos plus grandes spécialistes du catholicisme languedocien de la fin du Moyen Âge :
Michelle Fournié, Cahiers de Fanjeaux
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