Il faut attendre les années 70, à la lumière de la crise, les affirmations du "camp" gagnant et des premières critiques "lefebvristes" pour que l'on parle de putsch. On est davantage dans une construction rétroactive nourrie, il est vrai, par les expériences les plus folles et l'effondrement de ces années.
L'idée est donc que dès le début le concile est "orienté" dans un sens très favorable aux novateurs. Mais si on interroge les témoins de 1962, ce n'est pas l'impression qui en ressort. Après tout, on aurait pu retenir le discours d'ouverture de Jean XXIII comme marque d'un nouvel esprit. Mais les témoins ne parlent pas de putsch. Pas plus qu'ils ne donnent l'impression que tout était lié d'avance. Les témoignages de Mgr Lefebvre sont assez éloquents. Le prélat est non seulement confiant, mais assez élogieux du travail qui a été fait. Il salue Paul VI et va même jusqu'à dire que le Saint-Esprit est à l'oeuvre au concile. Il loue certaines initiatives et rectifications.
Lors de la première session, la configuration majorité-minorité ne s'impose pas. Le Coetus n'apparaît qu'en 1963. Si vraiment tout était joué - pardon "putsché" -, comment expliquer un partage égal des voix sur le texte relatif à la Vierge Marie ?
Comment expliquer les bras de fer entre Paul VI et le concile quand le pape, par exemple, proclame Marie Mère de l'Église ? Cette perspective ne plaisait pas à une grande partie des Pères qui estimaient que ce Marie était dans, mais au-dessus de l'Église ? Comment expliquer la "semaine noire" de 1964 où le climat est tendu entre Paul VI et le concile ? Il serait plus juste de remarquer l'existence de "coups" et de transactions entre les uns et les autres, mais nullement un processus où tout est joué et téléguidé. Comment justifier le fait que des textes aient été adoptés si tardivement, comme le 7 décembre 1965, soit un jour avant la clôture ? On pourrait multiplier les exemples.
On dit qu'à chaque fois qu'il partait à Castel Gandolfo, Paul VI prenait les objections de la minorité pour que les textes conciliaires aient la plus large adhésion possible. Le résultat est connu: des textes longs, alambiqués et même lourds où chacun a mis sa patte. Il y a des cas où l'ambiguïté fait plus rire que pleurer. Ainsi, le chant grégorien est décrit comme ayant la "primauté, "toute choses étant égales par ailleurs". Sincèrement, je ne sais pas ce qu'il faut penser d'un ensemble qui tient plus du mille-feuilles et de la synthèse rad'soc que de la bombe à retardement. J'ai connu des chevaux de Troie plus offensifs et plus dangereux. Parce que les pistolets à eau des Pères conciliaires, cela tient plus de la franche rigolade qu'autre chose...
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