Dans ce débat fort animé, je note une chose: on lit les étapes intermédiaires à la lumière de la catastrophe finale. Cependant, je reste plus prudent. Il est vrai que dans les années 60 existe une dynamique radicale favorable à toutes les remises en cause. Dynamique encouragée par le concile en tant qu’événement global. Une remise en cause globale qu’il a intériorisée. Ce qui fut son tort.
Mais les crises, quand on les étudie, n'obéissent pas à des causes générales. Et surtout, elles se nourissent d’interactions sans découler de textes. J’invite les lecteurs à s’intéresser à la sociologie des crises. La crise conciliaire est aussi due à une mentalité générale favorable à tous les chamboulements propre aux années 1960.
Pour reprendre un débat qui a opposé lés historiens sur la Solution finale, il y a ceux qui estiment qu’elle découlait de textes et d’ordres écrits (les intentionnalistes) et ceux qui estiment qu’elle résulte d’un processus empirique (les structuralistes). Je renvoie à ce que disait Ian Kershaw. On peut appliquer cette lecture à la crise de l’Église.
C’est tout le problème quand on utilise le terme « rétrospectivement ». Ce qui signifie que la suite que l’on connaît en découle logiquement. Ce qui est un erreur.
Pour autant, même dans la façon dont il se déroule le concile est différent entre les premières sessions et la dernière, qui est la pire. Je vous invite à lire le journal d’Henri de Lubac, qui note la dérive de certains pères, dont le cardinal Marty.
Sur l’absence de latin dans les missels édités à la suite de celui de 1965, on la retrouve aussi dans des missels antérieurs à Vatican II. Peut-être que le latin est déjà évacué de manière fonctionnelle sans disparaître de la liturgie. Le missel de 1965 correspond, comme vous le remarquez, à une codification des changements de 1964. Mais les observateurs notent que même avant 1965, on assiste à des intrusions sauvages du vernaculaire dans les célébrations. Au point qu’en 1965, comme en 1969, l’autorité se persuade qu’elle peut canaliser en codifiant. Calcul qui se révélera vain avec recul. Je pense que c’est dans cette perspective qu’il faut lire les interventions romaines.
Ce qui me surprend, c’est qu’en une décennie on compte trois éditions du missel romain dont la dernière version apportera un changement substantiel. Au demeurant, cela prouve que la réforme liturgique s’est étalée dans le temps. Si la volonté était si manifeste de tout changer, pourquoi avoir mis autant de temps ?
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