Enfin, à la fraction du pain, les disciples reconnurent le Ressuscité à la même fraction qui eut précédé la via crucis.
Les deux disciples d'Emmaus n'étaient pas Apôtres. Après leur aventure, ils rejoinrent les Onze pour leur raconter ce qui leur était advenu (Luc 24, 33-35).
S'ils n´étaient pas Apôtres, ils n'ont pas pu assister au repas pascal du Christ et à l'institution de l'Eucharistie, de la Communion et du Sacerdoce de la Nouvelle Alliance. Même la Sainte Vierge n'y était pas présente.
Ils n'ont donc pas pu reconnaître la Christ "à la fraction du pain", si celle-ci, comme beaucoup d'interprétateurs (et pas seulement des modernistes) le font, à mon avis à tort, doit être interprétée comme une reminiscence de la Communion du Jeudi Saint. Je sais bien que certains commentateurs prétendent que les Apôtres leur auraient raconté ce qui s'était passé le Jeudi Saint (ce qui est en soi probable), et que par conséquent ils auraient pu, même en n'étant pas témoins oculaires, reconnaître cette particulière "fraction de pain". Mais c'est une solution d'embarras. Ce n'est pas logique.
Au fait, le terme "fraction de pain" est équivoque, il peut signifier la Communion, mais aussi toute autre fraction de (vrai) pain, comme celles qui ont eu lieu lors des multiplications miraculeuses pendant la vie publique du Christ. C'est de ça qu'il s'agit ici, c'est là que ces disciples avaient été présents et c'est ça ce qu'ils ont vu et reconnu. Bien sûr: ces multiplications miraculeuses étaient des préfigurations du miracle permanent de l'Eucharistie. Mais ce n'est pas la même chose.
En parallèle le terme "imposition des mains" est équivoque (comme simple imposition d'une main, ou comme matière du sacrement de l'ordre voire de la confirmation), et doit être précisé par la forme.
Ma conclusion: il n'y a aucun lien direct entre cet épisode émouvant d'Emmaus et la Communion du Jeudi Saint, encore moins avec la célébration du sacrifice de la messe et la communion des fidèles qui viendraient bien plus tard. Les Apôtres n'ont pas célébré la Saint Sacrifice avant la Pentecôte.
Certes le Christ, dans sa Divinité nullement lié par les formes, aurait pu consacrer son Corps et le donner, même sous une seule espèce, aux disciples d'Emmaus. Mais le Christ ce n'est pas nous.
Pour nous cela ne saurait constituer un modèle d'aucune façon.