Retranscription synthétique du lib. IV cap. III du De romano Pontifice
de Saint Robert cardinal Bellarmin SJ et (ce nonobstant ?) Docteur de l'Eglise
(les spécialistes préciseront mes raccourcis trop rapides)
Le Souverain Pontife ne peut errer quand il enseigne l'Eglise dans ce qui se rapporte à la Foi.
Ceci va contre les opinions 1 et 2 précédemment exposées, et conforte la 4.
Elle se prouve par la Promesse du Christ à Pierre (Lc XXII) : Simon, Simon, prend garde, Satan vous a réclamés pour vous cribler comme grain, mais J'ai prié pour toi afin que ta Foi ne défaille pas. Toi, donc, quand tu seras converti, confirme tes frères.
Ce passage est usuellement compris de trois façons :
1. Les théologiens de Paris (Sorbonnards, à vous la gloire) estiment que le Christ a prié pour l'Eglise universelle, représentée par Pierre, et prié pour la Foi de l'Eglise universelle ne défaille pas.
Ceci serait vrai s'il était considéré que le Christ a prié pour la Tête, et conséquemment pour le Corps entier, représenté par la Tête, mais ce n'est pas en ce sens qu'ils comprennent ce passage, dont ils veulent qu'il ne vaille que pour l'Eglise.
Ceci est donc faux.
a. Parce que le Seigneur a désigné une unique personne, disant deux fois Simon, et lui parlant ensuite à la deuxième personne du singulier : pour toi, ta foi, tes frères. Le Christ a donc demandé quelque grâce particulière à Pierre.
b. Parce que le Christ commence par le pluriel (Satan vous a réclamés), mais qu'Il passe ensuite au singulier : toi. S'Il avait voulu parler de l'Eglise, le Christ aurait continué avec le pluriel.
c. Le Seigneur a prié pour celui à qui Il a dit : quand tu seras converti, ce qui ne peut valoir pour l'Eglise entière, à moins de dire qu'à un moment l'Eglise entière était corrompue, et ensuite à nouveau convertie.
d. Il a prié pour celui à qui Il a demandé de confirmer ses frères. Or l'Eglise n'a pas de frères à confirmer, seulement des enfants.
2. La seconde explication est celle de certaines personnes de notre époque. Ils enseignent que le Christ n'a prié que pour la persévérance finale de Pierre.
Or
a. le Christ a prié en Jean XVII pour la persévérance de tous les Apôtres, et même de tous les fidèles : ô Père Saint, garde en Ton Nom ceux que Tu M'as donné.
Il n'y a pas de raison pour laquelle le Christ aurait prié deux fois pour la persévérance de Pierre.
b. De plus, le Christ a clairement demandé une grâce particulière pour Pierre, tandis que la persévérance est un don commun à tous les élus.
c. Il est certain que le Christ a prié à ce moment-là pour tous les Apôtres, dont Il savait qu'ils seraient criblés par Satan, mais qu'Il a ensuite chargé Pierre de les confirmer dans la Foi.
Le Christ a donc prié non seulement pour la persévérance de Pierre, mais encore pour un don particulier au service de ses frères.
d. Le don fait à Pierre passe à ses successeurs. Car le Christ a demandé pour l'Eglise entière, et que l'Eglise a toujours besoin de quelqu'un par qui elle serait confirmée dans la Foi, et dont la Foi ne puisse défaillir.
Car le Démon n'a pas réclamé seulement les contemporains du Christ, mais tous les hommes.
Le don de persévérance finale, quant à lui, n'est pas transmis nécessairement à tous les successeurs de Pierre.
Enfin, le Christ ne demande pas que la Charité de Pierre ne défaille pas, mais sa Foi, et nous savons que Pierre a défailli dans la Charité et la Grâce lors de son reniement, mais nous savons que sa Foi n'est pas tombée.
3. Il est donc vrai de dire que le Christ a demandé deux privilèges à Pierre :
a. qu'il ne puisse jamais perdre la vraie Foi, quelque tenté qu'il puisse l'être par le Diable ; ce qui est un privilège différent de la persévérance finale : Pierre tombe, garde la Foi, se relève, et ne tombe plus, car le Seigneur a prié pour Pierre afin qu'une fois revenu, il vive fermement sa Foi
b. que, comme pape, il ne puisse jamais rien enseigner qui aille contre la Foi, et qu'il ne se trouve jamais personne dans Sa Chaire qui enseigne contre la vraie Foi.
De ces deux privilèges, il est clair que le premier n'est pas passé à ses successeurs, tandis que le second l'est.
[Témoignages de Pères de l'Eglise, papes, Docteurs de l'Eglise]
Objections des adversaires
1. Il n'y a pas d'Eglise romaine à l'instant de la Promesse du Christ, et le Christ de fait ne mentionne pas le Siège de Rome. Comment donc penser que l'évêque de Rome hérite de la Promesse et de la Grâce du privilège ?
2. Si le "quand tu seras revenu" devait s'appliquer également aux successeurs, tous les successeurs de Pierre renieraient avant de revenir au Christ.
Je réponds :
au 1. le Christ a prié pour Pierre et ses successeurs sur Son Siège de Rome
au 2.
a. être converti peut s'adresser aux tentations des successeurs de Pierre. Le sens n'est pas "quand tu seras revenu du péché à la pénitence, confirme tes frères" mais "toi dont la Foi ne peut faillir, quand tu auras vu tes frères être troublés et vaciller, sois converti et confirme les." Car ce n'est pas à cet instant que le Christ prophétise à Pierre son reniement : le Christ prêche donc ici la conversion plutôt que l'aversion, la résurrection plutôt que la chute.
b. Si "être converti" était dit du reniement, il ne s'ensuivrait cependant pas nécessairement que tous les successeurs de Pierre aient besoin d'être guéris du péché de reniement, tandis que le "confirme tes frères" vaut quant à lui aussi bien pour Pierre que pour ses successeurs.
Car être converti du péché est un don personnel, lié à leur état de personnes privées, tandis que convertir leurs frères est lié à leur état de personne publique, de tête et prince de l'Eglise, qui passe à leurs successeurs.
La même conclusion se prouve sur la Promesse à Pierre en Matthieu XVI : "sur cette pierre, Je bâtirai mon Eglise, et les portes de l'Enfer ne prévaudront pas contre elles".
Pierre est littéralement le rocher et la pierre de fondation de l'Eglise, comme Juge suprême de l'Eglise - et partant, ses successeurs après lui.
1. Le nom de Pierre évoque constance et solidité. Le rocher ne peut être brisé, ni déplacé à tout vent de doctrine. En tant qu'il est roc, c'est-à-dire pape, Pierre ne peut errer dans la Foi.
2. La pierre de fondation soutient la totalité de l'édifice, et ne peut en aucun cas être touchée sans que l'édifice entier soit ruiné.
Il ne pourrait être expliqué comment la fondation serait détruite et la maison resterait intacte.
Et ce n'est pas non plus parce que la maison ne peut être détruite que la fondation elle, serait ferme. Car la fondation ne reçoit rien de la maison, tandis que le maison tire sa force de la fondation. Par conséquent, les autres papes non plus ne peuvent errer.
[appui chez les Pères de l'Eglise, papes...]
Troisièmement, nous lisons en Jean XXI "pais mes brebis". D'où il ressort que le Souverain Pontife est établi Pasteur et Docteur de l'Eglise entière. L'Eglise est donc si intimement liée à son Docteur et Pasteur que si lui pouvait errer, l'Eglise entière errerait à sa suite.
Nos adversaires nous répondent que l'Eglise doit écouter Pierre aussi longtemps qu'il enseigne correctement, mais que Dieu doit davantage être écouté que les hommes.
Mais qui va pouvoir juger si le pape a enseigné justement ou non ? e n'est pas à la brebis de juger si le berger divague, pas même et spécialement pas en ce qui est véritablement douteux.
Si l'Eglise entière peut en appeler au pape, personne ne peut en appeler du pape à une autre autorité. Par conséquent, nécessairement, si le pape pouvait errer, l'Eglise errerait.
A nouveau, on nous renvoie à un Concile général. Mais le pape est au-dessus du Concile, et les Conciles qui n'ont pas reçu l'approbation du Souverain Pontife erraient en général.
Alors nous en appellerions à un Concile présidé par le pape ? Car le Concile uni au pape est supérieur au pape ? Mais le Christ n'a fait ses Promesses qu'à Pierre, Il l'a lui seul appelé Pierre, roc et fondation, Il n'a pas confié ses brebis à un concile.
Etc. Etc.