Il y a quelques jours, sont apparues sur le site de la FSSPX des vidéos présentant un nouvel évêque de la Tradition. Ceci fait suite à la consécration des Saintes Huiles que Mgr Huonder a effectué Jeudi-Saint dernier. Ceci appelle quelques réflexions.
But des vidéos
Ces vidéos ont pour but de nous présenter Mgr Huonder, quelques vérités sont rappelées, et peuvent éventuellement être qualifiées d'encourageantes, malgré des manques importants et des jugements tout subjectifs.
Qui est Mgr Huonder ? Un évêque qui a rejoint la Tradition.
Evêque conciliaire du diocèse de Coire en Suisse, Mgr Huonder signe un communiqué conjoint avec le Supérieur général de la Fraternité Saint Pie X le 20 mai 2019 dans lequel il déclare : « Le seul et unique but de cette démarche est de se consacrer à la prière et au silence, de célébrer exclusivement la messe traditionnelle, et d’œuvrer pour la Tradition, unique moyen de renouveau de l’Eglise. » Par la suite nous apprenons que cette année 2023 il a consacré les Saintes Huiles à la Messe Chrismale, le Jeudi-Saint, au Séminaire de Zaitzkofen. En fait, on découvre que dès décembre 2019, c’est-à-dire 6-7 mois après sa déclaration, il accomplit son tour épiscopal dans les maisons de la FSSPX du district de Suisse (Le Rocher n°123), contrairement à son souhait de « se consacrer à la prière et au silence ». En outre, il confesse et prêche, à l’école de Wangs où il s’est retiré, depuis le début, et enfin, il avait déjà, en tant qu’évêque conciliaire, procédé à la bénédiction d’une statue de Notre-Dame à l’Institut Santa-Maria de Wangs vers 2012 d’après ce qu’il rapporte dans une interview avec l’Ab. Lukas Weber le 26 août 2021 (https://fsspx.ch/fr/publications/newsletters/interview-de-s-exc-mgr-vitus-huonder-68861).
Une adaptation fulgurente à la Tradition ?
Pour faire suite à ce qui précède, l’ab. Suter, de l’Institut Santa-Maria de Wangs déclare que Mgr Huonder s’est « adapté immédiatement au rythme et aux offices propres aux maisons de la Fraternité. » Ceci pourrait nous montrer qu’il réalise une « conversion » très rapide, un retour fulgurent à la piété traditionnelle. C’est sans compter sur le fait qu’il a des relations très étroites depuis 2011 avec la Fraternité Saint Pierre dont il a été Visiteur apostolique ordinaire. En moins de 10 ans il y a fait des ordinations, a séjourné dans leur séminaire sur des périodes de 10 jours, l’a invité dans sa cathédrale de Coire et l’a établi pour les messes « Motu proprio » de son diocèse.
Mgr Huonder est donc un habitué des coutumes traditionnelles, et il n’y a aucunement une adaptation immédiate ; c’est un long processus.
Une devise épiscopale et sa mise en pratique…
Pour faire suite à ce qui précède rappelons quelle devise épiscopale Mgr Huonder a choisi : « Instaurare omnia in Christo ». Ce n’est rien de moins que la magnifique devise de Saint Pie X. Comment l’a-t-il mise en pratique ?
Consacré évêque de Coire le 9 septembre 2007, il devient dès le 12 septembre de la même année responsable du dicastère « dialogue œcuménique » au sein de la Conférence des évêques suisses (CES) (https://fr.zenit.org/2007/09/13/l-oecumenisme-a-sibiu-et-en-suisse/). Ainsi nous pouvons nous demander si nous parlons la même langue, avons les mêmes mots. Est-ce vraiment le même sens ou plutôt comme les modernistes, même mots mais sens totalement différent. Son action œcuménique dans son diocèse de Coire a été très fournie, et durant de nombreuses années il est responsable du dialogue avec les musulmans, les juifs, les protestants…
Avec ce qu’il a accompli dans sa vie épiscopale, il est nécessaire que Mgr Huonder réprouve de façon forte et notoire les actes d’avant sa retraite consacrée « à la prière et au silence ». C’était un moderniste notoire, il doit notoirement rejeter sn modernisme s’il l’a quitté, ce que dont nous nous réjouirions. La partie « retractatio » de la première vidéo, n’est pas vraiment une profession de foi et un rejet des erreurs modernes suffisant comme un Mgr Lazo par exemple l’a fait en son temps. Mgr Huonder a un discours de « conservateur », à l’égal de Mgr Scheinder par exemple, intéressant sous bien des rapports, mais encore lacunaire. Il montre une apparence de Tradition, sans repousser l’idée de « l’herméneutique de la continuité » de Benoît XVI. A ce propos, je suggère aux auditeurs de cette vidéo de lire l'excellent livre de Mgr Tissier de Mallerais, L'étrange théologie de Benoît XVI. Herméneutique de continuité ou rupture ?
Le but de sa venue dans la FSSPX
Pour faire suite à ce qui précède, Mgr Huonder déclarait au moment de rejoindre la maison de la FSSPX dans laquelle il réside qu’il avait reçu mission de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi d’entamer un dialogue avec la Fraternité, en vue d’un accord avec Rome, en 2015. C’est même par cet événement qu’il commence ses vidéos, et il y revient souvent. Aujourd’hui qu’en est-il ? Il affirme tout simplement qu’il fera encore son rapport à François à Rome.
Dans les circonstances actuelles de la « Rome moderniste » comme disait Mgr Lefebvre, il est temps d’avoir un langage doctrinal, et un grand esprit de foi pour continuer le combat contre le modernisme de plus en plus sournois.
Validité de ses ordinations ?
Enfin, à l'heure où Mgr Huonder est considéré à l'égal des évêques sacrés par Mgr Lefebvre en 1988, il serait peut-être bon de s'élever contre ce procédé d'imposer un évêque douteux au nom du droit strict des fidèles à être absolument certains des sacrements qu'ils reçoivent. En effet, avant "l'aggiornamento" du Novus Ordo Missae attaquant le rite antique et séculaire de la Sainte Messe catholique dite de Saint Pie V, Paul VI a "réformé" le rite de consécration épiscopale et d'ordination sacerdotale en 1968 dans Pontificalis Romani. Ainsi ces nouvelles consécrations épiscopales, et ordinations sacerdotales sont douteuses, comme l'affirmait Mgr Lefebvre au sermon des Sacres en 1988. L'Eglise demande en matière de sacrement le "tutiorisme", c'est-à-dire, que l'on soit absolument certain de la validité du sacrement conféré. Le probabilisme en cette matière est condamné.
Même si de nombreuses études ont été effectuées sur ce sujet délicat, et que tous ne sont pas d'accord sur la conclusion, il est bon de se rappeler que Léon XIII a tranché infailliblement en 1896 le cas des ordres anglicans en déclarant "absolument nulle, et entièrement vaine" la transmission du sacerdoce et de l'épiscopat chez les Anglicans. Ainsi aujourd'hui, quelle que soit l'opinion théologique de l'une ou l'autre des études, la question ne peut être tranchée infailliblement que par un Souverain Pontife non suspect de modernisme.
En attendant cet heureux temps qu'il nous faut mériter par nos prières et sacrifices, il est absolument nécessaire de procéder à la ré-ordination sous condition, et à la re-consécration épiscopale sous condition, à moins qu'aucun ministère ne soit donné au sujet sur lequel repose le doute.
Pour Mgr Huonder, nous fidèles de la Tradition, nous devons exiger des supérieurs l'absolue certitude des sacrements que nous recevons. Ce droit nous est donné par l'Eglise elle-même. Mgr Huonder a été ordonné prêtre en 1971 et consacré évêque en 2007, les deux sous le nouveau rite. Il doit être ré-ordiner sous condition, et re-consacrer sous condition, ou écarté du ministère. Dans l'attente de ces événements, nous ne pouvons faire confiance aux huiles qu'il a consacrées Jeudi Saint dernier à la Messe Chrismale à Zaitzkofen, au séminaire de la FSSPX en Allemagne et qui sont actuellement employées par des prêtres de la FSSPX.
Prions et agissons pour que "l'Opération survie de la Tradition" de Mgr Lefebvre ne soit pas démolie par une imprudence grave.
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