Sans se prononcer sur le fond du conflit qu'oppose ces ecclésiastiques (que je n'ai pas suivi et que je n'ai pas l'intention de suivre), on peut dire qu'il s'agit ici clairement d'un abus de pouvoir frappant.
On en a déjà parlé ici, mais il convient de le rappeler.
Mgr. Fellay est un évêque validement consacré, mais sans aucune juridiction ordinaire.
Il peut transmettre validement le pouvoir de l'ordre (et les circonstances actuelles de l'Eglise, qu'il ne reconnaît pas comme telles, font qu'il puisse le faire aussi licitement), mais il ne peut pas transmettre, ni a fortiori retirer, le pouvoir de juridiction qu'il ne possède pas lui-même, pas plus que le prêtre nommé par lui pour "juger" un confrère qui n'en possède pas non plus.
C'est pathétique.
Mgr. Fellay jouit certes, sans doute aucun, d'une autorité morale vis-à-vis des prêtres qui sont membres de la Fraternité sacerdotale guidée par lui, et certainement, encore davantage, vis-à-vis des prêtres ordonnés par ses mains. Cette dernière est une autorité de père à fils, inaliénable. Mais dans le cas de la Fraternité elle est morale, elle n'est pas aussi juridique.
L'évêque Fellay pourrait, en tant que dirigeant de fait de sa Fraternité en exclure pratiquement des membres qui ne lui conviennent pas, mais il n'a aucun pouvoir d'établir des comités voire des tribunaux pour juger quoique ce soit. Il n'a aucun pouvoir d'infliger des sanctions que le droit canon de l'Eglise réserve aux autorités des congrégations romaines, aux supérieurs des ordres religieux et aux Ordinaires du lieu.
En effet, qu'est-ce en fait la Fraternité Saint-Pie X?
Cette Fraternité sacerdotale est une "pia unio" (dans le droit, les dénominations varient, voir can. 707), établie dans le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg, reconnue pour une période de six ans "ad experimentum", le 1 novembre 1970, par l'Ordinaire de ce diocèse, Mgr. François Charrière (évêque de 1945 à 1970/1976).
Quoiqu'on dise (et on peut certes le déplorer) cette reconnaissance ne fut jamais prolongée, ni étendue à d’autres diocèses (notons-le), puisque l’évêque Charrière demissiona de fait fin 1970 et mourut le 11 juillet 1976, peu avant la fin de la période expérimentale initiale de six ans.
Ceci signifie que concrètement la Fraternité n'a plus aucun statut juridique après le 1 novembre 1976. Elle ne peut donc que continuer à oeuvrer, selon ses termes ad experimentum, en faisant valoir force majeure et le cas échéant le can. 209 pour l'administration des sacrements nécessitant une juridiction ordinaire. C'est tout.
Tout au plus, l'on pourrait faire valoir (selon le décret d'érection de l'Ordinaire) une reconduction tacite de la période ad experimentum pour encore six ans, donc jusqu‘au 1 novembre 1982. Tacite, puisque un évêque mort ne parle plus.
Après, c'est forcément le néant et la FSSPX évolue dans le vide juridique.
Chimaera in vacuo bombinans.
Ce qui se passe est très grave, parce que ces attitudes anarchiques détruisent tout fondement d'autorité ecclésiastique, et, pire, toute habitude d'autorité et d'obédience, de haut en bas, aussi, et surtout, dans la perspective éventuelle de son rétablissement ordinaire dans toute l'Eglise.
C'est une mentalité de flibustiers, absolument déplorable, dont le port abusif de la mozette, coutumier chez les évêques de la Fraternité, n'est qu'un indice extérieur.