...quant aux intentions de Paul IV. Sa constitution est pourtant aussi claire que le texte que j’ai cité tout à l’heure de l’historien Von Pastor :
“Nous considérons la situation actuelle assez grave et dangereuse pour que le Pontife Romain, Vicaire de Dieu et de Notre-Seigneur Jésus-Christ sur terre, revêtu de la plénitude du pouvoir sur les nations et les royaumes, juge de tous les hommes et ne pouvant être jugé par personne en ce monde, puisse toutefois être contredit s’il dévie de la foi.” (Cum ex apostolatus, § 1.)
Remarquez, c’est pratiquement mot pour mot le texte qu’on peut trouver dans le décret de Gratien (l’ancêtre du droit canon) : “le premier siège n’est jugé par personne
sauf s’il dévie de la foi”.
Quant à imaginer que l’élu aurait manifesté immédiatement son hérésie, encore une fois Paul IV n’était pas un naïf. Les cardinaux qu’il soupçonnait, à tort ou à raison, fréquentait certes des hérétiques – d’ailleurs camouflés – mais de là à imaginer qu’ils l’étaient eux-mêmes, et qu’en outre ils allaient le manifester dès leur arrivée sur le siège de Pierre, aucune source historique ne le confirme.
Le cardinal Morrone, le principal suspect aux yeux de Paul IV, a d’ailleurs (encore une fois, à tort ou à raison) été réhabilité par son successeur Pie IV, qui a même fait de lui son légat au concile de Trente, sans éprouver pour autant la moindre attirance pour le protestantisme. Ce même Morrone aurait d’ailleurs probablement été élu à la place de saint Pie V, si ce dernier – alors grand inquisiteur – n’y avait pas fait obstacle.
Par ailleurs, je ne peux que répéter que la législation de Paul IV envisageait explicitement (
§ 6) qu’un cardinal ayant dévié de la foi puisse être élu par un conclave régulier, reconnu pape par l’Église universelle (“assentiment unanime de tous les Cardinaux”) et qu’en dépit de cette reconnaissance et “quelque soit le laps de temps écoulé”, le pape la déclarait par avance “nulle, non avenue, sans valeur”...
Cette constitution fut par la suite confirmée par le pape saint Pie V (motu proprio
Inter multiplices curas) :
“De notre propre mouvement et de science certaine, et dans la plénitude de notre puissance apostolique [...], concernant la constitution de Paul IV, [...] donnée en date du 15 février 1559, nous en renouvelons la teneur présentement, et encore nous la confirmons. Et nous voulons et commandons qu’elle soit observée inviolablement et avec le plus grand soin, selon son enchaînement et sa teneur”
V.
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