Bonjour Athanase,
Je vous remercie vivement pour le premier paragraphe de votre texte, que j'approuve dans son ensemble.
Le renouveau patristique lubacien n'a pas été avant tout anti-maurrassien, mais a été avant tout anti-suarézien, compte tenu du fait qu'Henri de Lubac a construit sa personnalité intellectuelle
- d'une part, en ne s'en remettant pas à la formation qu'il a reçue, et qui a été jugée par lui bien plus "suarézienne" (intransigeante, orthodoxiste, rationalisante et systématisante) que vraiment "thomiste" (cf. ce qu'il écrit dans ses "Mémoires" sur l'occasion de ses écrits),
- d'autre part, en allant chercher chez les Pères de l'Eglise ce qu'il n'a pas trouvé chez les Docteurs de l'Eglise et chez les théologiens de la composante tridentine de la Tradition chrétienne.
Ce qu'Henri de Lubac n'a pas prévu ni voulu est ceci, à mon avis : dès le début des années 1960, la contestation, le contournement, le dépassement et la destitution de la composante tridentine de la Tradition chrétienne ont conduit également à celles des autres composantes de la Tradition chrétienne : je pense ici à la composante scolastique, à la composante monastique, mais aussi à une partie de la composante patristique elle-même (cf. Saint Augustin et Saint Jean Chrysostome).
Par ailleurs, je profite de ce message pour l'écrire, le renouveau patristique lubacien (qui n'a évidemment pas été seulement lubacien, cf. Balthasar et Daniélou) comporte, à mon avis, un vice de conception, plus philosophique que théologique, qui provient du fait qu'il a été mis en oeuvre par des théologiens culturellement, sinon doctrinalement, post-kantiens, qui ont eu tendance à laisser entendre qu'ils voyaient dans certains Pères de l'Eglise des humanistes irénistes qui ont eu, en leur temps, une conception de la dignité de la personne humaine et de la liberté de la conscience humaine non incompatible avec une conception post-kantienne.
Or, j'ai bien peur que nous ne soyons ici en présence d'un anachronisme, perceptible, notamment, dans le discours de Benoît XVI en date du 22 décembre 2005 : je pense ici au passage de ce discours relatif à la quasi anticipation, par les chrétiens des premiers siècles, de la liberté religieuse des philosophes des Lumières...
Bon dimanche.
Scrutator.
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