Bonjour et merci, Vianney.
Je suis bien d'accord avec vous, Vianney, et avec lui, Bertrand Decaillet.
1. Une mystique de l'accueil inconditionnel de tous ceux qui, si j'ose dire, pour des raisons de Foi ou de moeurs, sont à l'extérieur du christianisme catholique, est facteur de division, au sein même de l'Eglise, dans la mesure où cette mystique de l'accueil inconditionnel introduit une dynamique d'auto-censure des points de divergence.
2. Cette dynamique aboutit "parfois" à ce que l'accueil inconditionnel des personnes soit l'antichambre de l'acceptation ou de l'approbation relative de principes ou de pratiques qui sont ceux de personnes auxquelles on semble "parfois" demander de se convertir, avant tout, au consensus et au dialogue, sans leur demander, parallèlement et simultanément, de renoncer à leurs erreurs.
3. Or, la combinaison de ces trois paramètres : accueil inconditionnel, auto-censure de ce qui distingue voir oppose, exhortation à la conversion, sous la conduite et en direction d'une praxis consensuelle et dialoguante, ne peut que faire réagir, d'une manière sceptique, voire critique, les catholiques qui ont encore quelques réflexes intellectuels et confessionnels, qu'ils soient traditionalistes ou non, et qu'ils soient proches de la FSSPX ou non.
4. Et alors, en ce sens, la combinaison de ces trois paramètres est bel et bien un facteur de division dans l'Eglise.
5. A mon sens, le service de l'unité dans l'Eglise ne peut pas être mis en oeuvre, d'une manière crédible, au détriment, même indirect, du service de la charité due aux personnes, ET du service de la vérité en matière de Foi et de moeurs.
6. Or, de même qu'une mise en avant systématique d'un Bien spirituel qui est ou serait commun aux croyants de toutes les religions, et qui est ou serait situé par delà le vrai et le faux, en matière religieuse, peut se prêter à toutes les falsifications interreligieuses, de même, une mise en avant systématique d'un Bien ecclésial qui est ou serait commun aux catholiques de toutes les sensibilités, y compris aux catholiques approbateurs du dogme selon lequel il convient de n'en avoir presque aucun, peut très bien, elle aussi, se prêter à toutes les falsifications intra-ecclésiales.
7. Un mot, un seul, a fait au moins autant de mal à l'Eglise qu'une partie du Concile Vatican II et que l'après-Concile Vatican II, notamment ou surtout dans le contexte européen occidental ; c'est le mot SENSIBILITE : l'opinion partagée et propagée, au sein même de l'Eglise catholique, selon laquelle, tout en faisant partie de la même communauté de croyants, on peut
- avoir pour sensibilité d'adhérer au Magistère de l'Eglise en matière de Foi et de moeurs,
ou
- avoir pour sensibilité de ne pas adhérer au même Magistère, dans les mêmes matières,
est tout aussi désastreuse, pour, ou plutôt contre, l'unité, au sein de l'Eglise catholique, que l'intransigeance, "parfois" plus "catégorique" que "diplomatique", de la FSSPX.
8. Enfin, vous avez sûrement raison de dire que la FSSPX n'a jamais remis en cause le moindre dogme, mais je n'ai peut-être pas tort de dire que la FSSPX se livre, depuis déjà quelques décennies, à la critique frontale CONSIDEREE, POUR AINSI DIRE, COMME HERETIQUE, de quasi-dogmes, adossés ou associés au Concile, tels que l'adaptation, l'évolution, l'innovation, l'ouverture, l'unité.
9. L'adhésion de bien des clercs à ces quasi-dogmes est l'une des raisons pour lesquelles les séminaires et presbytères diocésains sont loin d'être remplis à ras bords de futurs prêtres ou de prêtres, or, les mêmes qui, je l'espère pour eux, savent bien, dans leur for intérieur, que cette adhésion là à ces quasi-dogmes là est contre-productive, déconcertante ou démotivante, pour bien des catholiques, persistent à y adhérer, et à considérer, en tout cas, dans le contexte français, que l'on est d'autant plus en communion avec l'Eglise que l'on adhère à ces quasi-dogmes, notamment dans le cadre du dialogue oecuménique et du dialogue interreligieux.
10. Cela étant considéré, je crois pouvoir écrire que l'un des principaux acquis mentaux instaurés ou introduits dans l'Eglise, au moment ou au moyen du Concile, à savoir la gaudium-et-spisme ou l'humanitarisme, le culte de l'homme (moderne) ou la foi en l'homme (moderne), l'adaptation et l'ouverture consensuelles, mille excuses : pastorales, au contact du monde (moderne), a commencé à s'effriter, à la faveur de ce qui se passe en France, surtout depuis 2011.
11. S'il se confirme que cet acquis mental là commence à s'effriter, cet effritement sera peut-être annonciateur de l'effritement des autres acquis mentaux (post)conciliaires, qui sont à l'origine de bien des évolutions et innovations liturgiques et pastorales.
12. J'emploie à dessein cette expression : acquis mentaux, parce que je considère qu'il est presque aussi difficile, voir encore plus difficile, de revenir et de faire revenir sur des acquis mentaux, que de revenir et de faire revenir sur des acquis sociaux.
13. Il convient, je le crois, que les uns et les autres, les évêques diocésains ET ceux de la FSSPX, comprennent ensemble que ces acquis mentaux ne sont pas plus à accepter ou à approuver, avec passivité ou complicité, depuis l'intérieur de l'Eglise, , qu'ils ne sont à refuser ou à rejeter, avec un karcher dans les mains, depuis l'extérieur de l'Eglise.
14. Il me semble en effet qu'il est dans l'intérêt des uns et des autres d'expliquer ou de réexpliquer aux clercs et aux laics que les acquis mentaux auxquels je pense n'ont pas à être considérés comme l'alpha et l'oméga du christianisme, et ne sont pas dépourvus d'ambiguité ni de stérilité.
Mais de même que la confrontation à ces acquis mentaux, depuis l'intérieur de l'Eglise, n'a pas à être un prétexte, qui dispenserait de les combattre, de même, la condamnation de ces mêmes acquis mentaux, depuis l'extérieur de l'Eglise, n'a pas à être un prétexte, qui dispenserait du recours à la diplomatie ET à la pédagogie.
Je vous remercie pour votre message, et je vous souhaite une bonne journée.
Scrutator.