Cher Vincent F,
Vous écrivez:
"A ceci prêt que les propriétaires de ces églises de droit privé devraient être les diocèses ou les communautés religieuses. C'est d'ailleurs la situation des églises construites après 1905."
Votre message me fait vous proposer ces dix remarques en réponse:
1. Je l'avais relevé au début de l'affaire: avec Sainte-Rita, on se trouve dans la situation paradoxale où un prêtre attaché à la messe de Saint Pie V et à la figure de Saint Pie X est à la tête d'une association cultuelle qu'avait refusée ce dernier pape, parce que l'évêque n'en était pas le président de droit.
2. Une des conséquences favorables d'un concordat avec l'islam serait qu'en bonne logique, cela obligerait l'État à reconnaître tous les cultes au lieu de n'en reconnaître aucun.
3. Je m'étonne toujours que certains diocèses, et singulièrement l'archevéché de Paris, investissent dans la construction de nouvelles églises, plutôt que de préserver le patrimoine si pléthorique d'églises menacées d'être désaffectées. Il est vrai que la menace est moindre à Paris.
4. J'ai parlé d'une porte de sortie "par le bas" de "l'affaire de Sainte-Rita par l'organisation d'un référendum municipal mettant en balance plusieurs projets. Mais il y aurait une sortie par le haut: ce serait que l'archevéché de Paris cesse de se "désintéresser" du sort de cette église, la rachète, la dédicace, la consacre (je n'ai rien oublié cette fois, rémi?), et la confie à l'abbé de Tanoüarn, qui l'a défendu avec la fougue, la ferveur, le côté joueur, le sens du sacré et la liberté qu'on lui connaît.
5. Pour l'anecdote, cette sortie par le haut empêcherait Nemo de tergiverser, quand l'abbé de tanoüarn lui aura produit la preuve écrite que l'archevêque de Paris promettait de fermer les yeux s'il desservait Sainte-Rita, ce qui, dira Nemo, ne constituant pas un acte officiel, ne saurait être avancé comme une preuve écrite.
6. Mais pour le bien de l'Église, cette attitude miséricordieuse de l'archevêque mettrait fin à l'ignorance pratique de l'effort de retrouver la communion avec Rome qu'a représenté la fondation de l'IBP, effort qui n'a été couronné d'aucune intégration de cet Institut de droit pontifical dans la vie diocésaine, si ce n'est, à ma connaissance, à Toulon et à Bordeaux,.
7. L'acte de charité éclésiale qui consisterait de la part de l'archevêque de Paris à confier Sainte-Rita à l'abbé de tAnoüarn aurait l'avantage de lui offrir un lieu de culte ayant pignon sur rue, tout en contraignant ce bouillant prêtre à un peu plus de retenue et de discipline éclésiastique, ce qui lui ferait perdre une partie de son charme, mais ne saurait l'attiédir.
8. Cette reconnaissance et ce cadeau diocésain permettraient surtout de sortir de la culture du mépris qu'on a vue à l'œuvre, de la part des évêques de France (et sur ce point, le livre de mgr Doré, À cause de Jésus, est très instructif), aussi bien après que l'Institut du bon Pasteur a été reconnu de droit pontifical, qu'après la levée des excommunications des quatre évêques et après la proclamation du "motu proprio" du 07-07-07. Ce mépris était épidermique et n'avait rien de pastoral. Les évêques de France ne pouvaient accepter le retour d'un enfant prodigue qui ne se repentait nullement d'avoir été d'aussi longue date un adversaire bien peu respectueux de la succession apostolique, ou au contraire d'un fils aîné à qui Rome redisait que tout ce qui était à elle n'avait jamais cessé d'être à lui. Refuser par épiderme la coexistence de caïn et abel au sein de la communauté fraternelle qu'est le Corps du Christ, n'illustrait pas la volonté pastorale de rechercher la brebis égarée.
9. Le Pr Luc Perrin a récemment écrit sur ce forum que ni le Vatican ni la CDF n'avaient anticipé, en même temps que ces trois gestes, l'application d'une "réforme de la réforme", une "herméneutique de la continuité", un catéchisme ou une théologique qui auraient été en cohérence avec ces gestes. Je ne crois pas que ces trois gestes aient jamais rendu nécessaire rien de tel. L'Église n'a jamais été -et n'est plus du tout si elle l'a jamais été- une communauté homogène. En revanche, ce que le Vatican n'a pas anticipé, c'est l'hostilité épidermique qui rendait impossible, après que les évêques avaient très mal vécu la levée des excommunications, que des curés passent par-dessus leur autorité pour reconnaître directement des "groupes stables" et célébrer des messes en forme extraordinaire.
10. Quoi qu'il en soit, si l'archevêque de Paris acceptait de s'intéresser à la communauté de Sainte-Rita, de la racheter, de négocier avec l'État, d'en devenir l'affectataire et de la confier à celui qui l'a défendue en attirant l'attention sur le mal provoqué par la destruction d'une Église en ces temps d'incertitude identitaire, il se montrerait non seulement magnanime, qualité qui ne court pas les rues, mais fidèle à l'intuition de deux papes: en s'intéressant à une communauté de catholiques marginalisés, il montrerait son zèle apostolique pour une "église des périphéries"; et il mettrait en pratique cette autre parole prononcée par Benoît XVI lors de son voyage en France que "nul n'est de trop dans l'Église", parole dont on a dit qu'elle visait surtout les traditionalistes, mais dont on peut avoir une interprétation plus inclusive.