Bonsoir Romanus,
1. Je m'explique : il y a quelques jours, je suis tombé sur cette phrase de Mgr FELLAY : "on ne comprend pas pourquoi nous sommes CONTRE la liberté religieuse".
2. Certes, il y a le déphasage cognitif et culturel dont j'ai déjà parlé, entre la conception de la théologie chère à la FSSPX et la conception de la théologie chère au Saint-Siège.
3. Il est possible qu'il faille d'ailleurs plutôt parler, ou parler plus précisément, de deux anthropologies chrétiennes partiellement divergentes, que de deux théologies, par exemple deux théologies de la Sainte Trinité, qui seraient totalement divergentes.
4. Mais c'est peut-être un petit trop facile de faire reposer la mésentente sur des malentendus, et de croire que seules des interprétations adéquates et bienveillantes, qui se rapprocheraient les unes des autres, permettraient de réduire une telle fracture.
5. En gros, mais ce qui suit est certainement schématique :
- la caractéristique fondamentale des uns, c'est la tendance au légalisme, dans le cadre d'une logique déontique : le devoir de servir la vérité ;
- la caractéristique fondamentale des autres, c'est la tendance au personnalisme, dans le cadre d'une logique téléontique : le désir de servir l'unité.
6. Eh bien, je peux comprendre que les uns et les autres aient parfaitement compris, les uns à la lecture ou en présence des autres, que leurs caractéristiques fondamentales respectives soient presque antithétiques, sur certaines questions traitées au Concile.
7. Voici, en tout cas, ce que la phrase de Mgr FELLAY m'a récemment inspiré ; je vous le livre dans l'espoir de me faire comprendre le moins mal possible :
8. " Je crois au contraire que tout le monde comprend très bien pourquoi vous (la FSSPX) êtes contre la liberté religieuse, parce que tout le monde a très bien compris, en un sens, comme vous, mais pas avec les mêmes conclusions que vous, que la liberté religieuse,
- telle qu'elle est mise en forme dans DH, notamment dans la première partie du document,
et
- telle qu'elle est mise en avant et en oeuvre, depuis la clôture du Concile Vatican II,
ne contribue en rien, mais fait plutôt obstacle, à ce que l'Eglise catholique exhorte franchement et fermement, courageusement, énergiquement, les non chrétiens, à se rendre, avec l'aide de la Grâce de Dieu, vraiment libres, notamment en matière religieuse, c'est-à-dire vraiment disponibles et vraiment responsables, en Jésus-Christ, par Jésus-Christ, pour Jésus-Christ, dans Son Eglise. "
9. En d'autres termes, l'adhésion de l'Eglise à la liberté religieuse a plutôt tendance à faire obstacle à ce que l'Eglise exhorte, d'une manière claire et ferme (qui exclut la pénombre, mais qui n'exclut pas la charité), les non chrétiens, à l'abandon de leurs erreurs, et à l'adhésion à la Vérité, sous la conduite et en direction du seul vrai Dieu, Père, Fils, Esprit.
10. Si vous préférez, et à tout le moins, l'adhésion de l'Eglise à la liberté religieuse a plutôt tendance à faire obstacle à ce qu'elle s'exprime de cette manière là, non agréable ni consensuelle, sur cette matière là, alors que l'adhésion de l'Eglise à la liberté religieuse, explicitéee davantage en tant que responsabilisante, et non "implicitéee" en tant que déresponsabilisante, pour les hommes, face à Dieu, Père, Fils, Esprit, aurait "dû pouvoir" ne pas faire obstacle au maintien en vigueur de ce type de discours, exigeant, mais pas infâmant, vis-à-vis de ses destinataires.
11. En effet, faut-il le rappeler, quand on parle de conversion, on parle NOTAMMENT d'une démarche qui consiste à cesser de marcher à la suite de telle ou telle erreur, de tel ou tel errement ou manquement, et de commencer à marcher à la suite de celui qui est la Voie, la Vérité, et la Vie, et c'est valable pour les chrétiens aussi.
12. En d'autres termes, et par delà les différences de langage théologique, qui ne contribuent certes pas à une compréhension réciproque, je crois que nous sommes AUSSI en présence de protagonistes qui se sont très bien compris, sur des positions plus magistérielles, et qui ont très bien compris qu'ils n'étaient pas du tout d'accord entre eux, sur les questions qui sont d'autant moins consensuelles qu'elles ont été traitées, au Concile, d'une manière souhaitée consensuelle, oh pardon : " pastorale "...
Bonne nuit et à bientôt.
Scrutator.