par les pères de l’Eglise, que je crois commencer à connaître un peu. Ils ne citent jamais le pape, jamais leur pape, jamais un autre pape. C’est le cas même quand le père de l’Eglise… est un pape : saint Grégoire le Grand, saint Léon le Grand : il ne citent jamais un prédécesseur.
On se gargarise du « Roma locuta est, causa finita est » de saint Augustin. D’abord la citation est inexacte. Saint Augustin dit, dans son sermon 131 :
Jam enim de hac causa duo concilia missa sunt ad Sedem Apostolicam: inde etiam rescripta venerunt. Causa finita est: utinam aliquando finiatur error!
C’est-à-dire :
Car déjà à ce sujet deux actes de conciles ont été envoyés au Siège apostolique ; d’où les rescrits sont venus. La cause est finie, plaise au Ciel que l’erreur finisse de même !
Saint Augustin fait allusion à la condamnation de Pélage par les synodes de Carthage et de Milev, et à trois lettres d’Innocent Ier félicitant les évêques africains pour leur action, et d’en avoir référé au Saint-Siège. Ce que l’on ne dit pas, c’est d’une part que c’est tout à fait exceptionnel dans l’œuvre de saint Augustin, et des pères en général, d’autre part que la référence n’est pas si évidente qu’elle en a l’air (même si la sentence a un véritable poids doctrinal). Car le successeur d’Innocent, Zozime (une sorte de François de l’époque), prit le parti des pélagiens et convoqua un synode romain qui, dit-on, « eut peine à retenir ses larmes en constatant qu’on avait pu diffamer de la sorte des hommes d’une foi aussi parfaite ». Sic. La réaction des Africains (oui, contre le Saint-Père…) fut très violente, et ils convoquèrent un nouveau synode pour condamner les pélagiens. Lesquels se comportaient si mal à Rome que le pape accepta finalement la constitution d’une commission, dont fit partie Augustin. Il en résultat une nouvelle condamnation des pélagiens, à laquelle se rallia Zozime, juste avant sa mort…
Question : quand fallait-il écouter Zozime avec le prompt assentiment du vrai fidèle ?
Je suis en train de terminer la lecture des huit tomes des lettres de saint Jérôme. Il évoque de nombreux sujets, avec de nombreux correspondants, et il n’y est jamais question de ce que peut dire ou ne pas dire le pape. Sauf quand il s’agit de questions techniques de la traduction de la Bible, avec saint Damase. (On constate aussi qu’il appelle « pape » les évêques auxquels il s’adresse.)
Un mot sur saint Jean Chrysostome : il a recours au pape uniquement quand il cherche son soutien contre Théophile d’Alexandrie et l’empereur de Constantinople qui vont l’exiler et le faire mourir. Le pape le soutient verbalement mais ne peut rien faire pour lui : ses émissaires sont humiliés et renvoyés à Rome…
Jusqu’ici je n’ai vu rien d’autre concernant les pères et le pape.