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Quelques précisions encore
par Lycobates 2019-01-23 00:01:45
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Cher Meneau !


La forme du sacrement de l'Eucharistie, ce sont les paroles de la Consécration : "Ceci est mon Corps", "Ceci est mon Sang, etc...", et seulement cela: Il faut donc soutenir que si le prêtre ne disait que les paroles en question, avec l'intention d'accomplir ce sacrement, celui ­ci serait réalisé, parce que l'intention ferait comprendre que ces paroles sont prononcées au nom du Christ, même si ce n'était pas signalé par le récit des paroles précédentes. Cependant ce prêtre pécherait gravement, comme n'observant pas le rite de l'Église. III, q78, a1, ad4
La forme du NOM (tout au moins pour la Prex 1) est donc valide.



Il ne s'agit ici pas du même cas de figure. Ce n'est pas la même chose que d'utiliser la bonne forme, "nue", sans plus, ou de l'utiliser mais dans un contexte hétérodoxe ou douteux.

(D'ailleurs pourquoi "tout au moins pour la Prex 1" ? La forme dans le NOM est la même dans la Prex 1 que dans les autres, elle est mutilée dans tous les cas, le promulgateur en a pris soin ("iussimus verba dominica [huhu] in qualibet Canonis formula una eademque esse" et pas ceux du Canon romain), comparez cela avec Saint Thomas IIIa, q. 78, art. 3, resp., mais là je vous mets un piège, ce n'est pas gentil)

Dans le cas envisagé par le saint Docteur dans votre citation il n'y a pas de contexte du tout (sola verba praedicta [de la forme] dit-il), donc pas non plus d'autre texte entourant la forme et capable d'en influencer l'énoncé.

Mais dans d'autres cas, comme précisément le NOM, il y a aussi à prendre en compte (établie comme principe par Apostolicae curae) la significatio ex adiunctis, l’interprétation (de la forme et matière) faite (et à faire) à partir du contexte, qui peut en changer le sens, sur ce plus bas.

Je vous concède que le Breve esame critico que vous citez en français à la fin de votre message ne va pas au bout de cette logique, mais la question de la validité n'y est abordée encore que de façon marginale, ce texte étant tout au début (1969 !) des considérations, d'autres études plus pointues sur ce point ayant suivi. (Le BEC, on le sait, à aussi souffert du fait qu'un Jubilator praecox, prêtre de son état, ait cru bon de le publier avant son arrivée à destinaire).
Le BEC a au moins eu le mérite d'obliger le promulgateur du NOM, humiliation bien ressentie, de retirer sa première version de l'Institutio generalis, bien entendu sans modifier les textes mêmes qui en restent par conséquent foncièrement viciés. Mais quand-même.



L'intention doit être celle de faire ce que fait l'Eglise :

1 - dans le cas d'un rite qui exprime explicitement la Foi de l'Eglise, le simple fait de se conformer au rite manifeste suffisamment cette intention

2 - dans le cas où le rite contredirait explicitement la Foi de l'Eglise, le fait de se conformer à ce rite manifesterait éventuellement une intention contraire, invalidant le sacrement. Sauf si éventuellement le prêtre ne comprend pas qu'il y a contradiction et conserve bel et bien l'intention de réaliser le sacrement. On parle ici d'une contradiction explicite dans le texte du rituel, l'intention de ceux qui ont fabriqué le truc n'entre pas en ligne de compte.

3 - dans le cas d'un rite ambigü, ou incomplet, qui n'exprimerait pas exaustivement l'intégralité de la Foi de l'Eglise (mais sans la nier non plus), tout dépend de ce comprend le prêtre et donc de ce qu'il pense qu'il fait. Mais Apostolicae Curae est très claire : Ainsi, quelqu’un qui, dans la confection et la collation d’un sacrement, emploie sérieusement et suivant le rite la matière et la forme requises, est censé, par le fait même, avoir eu l’intention de faire ce que fait l’Église.



ad 1 : Exact.

ad 2 : Pas exact. Je répète et j'insiste : La bonne foi du prêtre ne prévaut pas le cas échéant sur une intention contraire véhiculée par le texte (pris dans son ensemble, significatio ex adiunctis, voir plus bas) qu'il utilise. Car en l'utilisant il s'y conforme, quoiqu'il croie ou pense, comme la mauvaise foi du prêtre utilisant un rite catholique ne prévaut pas non plus sur l'intention correcte véhiculée par ce texte s'il l'utilise de façon non dérisoire.

L’Église a toujours maintenu coûte que coûte l’objectivité absolue de l’économie des sacrements, in actu primo s'entend. Celle-ci demeure autant que possible en dehors de la portée humaine.

Il faudrait démontrer sinon que l'Église a reconnu dans le passé comme valides des sacrements réalisés avec un rituel hérétique (hérétique notamment concernent le point précis du sacrement duquel il s'agit) ou, au moins, pour reprendre l’expression du pape Léon XIII, lui-même citant son prédécesseur Jules III : des sacrements conférés minus rite et non servata forma Ecclesiae consueta, moins correctement et en ne gardant pas la forme coutumière de l'Église, ce qui suffit déjà, même par des prêtres qui n’étaient eux pas hérétiques (au moins sur ce même point de doctrine), ou qui étaient de bonne foi.

Vous en connaissez des cas ? Je vous en féliciterais. Vous m’apprendriez une chose et je vous en saurais gré. Mais je crois que vous n’en trouverez pas.

ad 3 : Exact iuxta modum. Car ce dont parle Apostolicae curae dans le bout que vous citez est un rite catholique, dummodo ritu catholico, dit le Pape, "pourvu que le rite soit catholique", il ne faut pas l’omettre de votre citation ; mais si en revanche le rite n'est pas d’emblée catholique, ou s’il est douteux, on revient au cas 2.

C’est précisément là le point contesté du NOM !
Puisque un rite catholique, prescrit par l'Église, ne peut pas être "ambigü, ou incomplet, ni être sans exprimer exhaustivement l'intégralité de la Foi de l'Église".

Ce qui peut arriver, c’est qu’un prêtre individuel, disons farfelu ou inculte, comme dans l’exemple de saint Thomas que vous citiez, modifie le rite, d’abord catholique, insistons, et le rend ambigu ou incomplet. Dans ce cas la validité dépendra en effet de ce prêtre, s’il agit, avec saint Thomas, encore cum intentione conficiendi hoc sacramentum, alors : perficeretur hoc sacramentum, même si le prêtre graviter peccaret.

Mais le point de départ ici est autre : le rite catholique amputé par le célébrant.

Le cas du NOM qui nous occupe est l’inverse: un rite amputé que le célébrant prétend sauver. Et cela c’est en vain.



Il vous reste donc à démonter soit que le NOM contredit explicitement la Foi de l'Eglise (2 ci-dessus),



Cette démonstration a été faite, il existe une ample littérature dans plusieurs langues européennes à ce sujet, depuis bientôt 50 ans, de valeur parfois inégale ou fragmentaire certes, mais dans son ensemble convaincante et proportionnant une certitude morale suffisante.

Maintenant si Meneau m'invite à faire cette démonstration ici-même, Un modérateur pourrait intervenir et me dire : stop !
Alors, que faire ?


Vous l’avez vous-même fait remarquer ici à une âme zélé, et je vous en remercie (vous êtes comme nous disons ein Ehrenmann, dont l’espèce est en extinction de nos jours, mais dans nos milieux ce mot n'est pas encore vain) : mes mains sont ici liées.

Je m'arrête là.



soit que l'intention du prêtre est déficiente (3 ci-dessus). De plus, il vous faut restreindre cette analyse à ce qui est strictement nécessaire (et suffisant) à l'accomplissement du sacrement : matière et forme.



Eh bien non.
Ici aussi Apostolicae curae nous sert de guide. On se rend compte du caractère absolument providentiel de cette lettre apostolique, au vu de ce qui allait se passer au XXe siècle, mérite involontaire de l'abbé Portal et des siens, car elle énonce des principes de théologie sacramentelle d'une façon absolument limpide et tranchante, quoique concernant une controverse au fond décidée depuis belle lurette, et seulement, comme le dit le Pape, exsuscitata, à cause du fait qu'on n'a pas pris assez en compte les décisions pontificales d'avant lui, documentis haud satis quam oportuerat cognitis.
Aujourd'hui nous lui en savons gré (sans parler de l'empreinte de latiniste incomparable que porte ce texte, chapeau au presque nonagénaire).
Le Pape dit que "pour apprécier d'une façon exacte et complète" la validité, "rien assurément ne vaut l'examen scrupuleux des circonstances dans lesquelles il [le rituel en question] a été composé et publié" (quibus adiunctis rerum conditum sit et publice constitutum : voilà la significatio ex adiunctis à prendre en compte). Ainsi des paroles en soi orthodoxes ou pouvant au moins être interprétées de la façon, acquièrent un sens équivoque, non par elles-mêmes, mais par leur contexte : semel novato ritu, minime constat formula, une fois le rite changé, les formules ne signifient plus la même chose.
Il faut donc, pour juger correctement, prendre en compte "quel esprit animait les auteurs", "quels appuis ils ont demandé aux sectes hétérodoxes" (huhuhu) et "quel but ils poursuivaient". Nimis enimvero scientes quae necessitudo inter fidem et cultum, inter legem credendi et legem supplicandi intercedat : ne sachant que trop la relation nécessaire (oui !) qui existe entre la foi et le culte, entre la loi de croyance et la loi de prière, liturgiae ordinem, specie quidem redintegrandae eius formae primaevae, ad errores Novatorum multis modis deformarunt : ils ont grandement défiguré l'ensemble de la liturgie conformément aux doctrines erronées des novateurs, sous prétexte de la ramener à sa forme primitive (huhuhu).
Bon, vous avez compris.

Je maintiens donc, avec la parole du pape Léon XIII, et dûment prise en compte la significatio ex adiunctis, que les formes sacramentelles dans le NOM sont et demeurent nomina sine re.

Sat prata biberunt !


     

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