Lors d’un débat, Sophie Coignard (Un État dans l’État, Albin Michel) faisait remarquer qu’alors que la société actuelle est, en particulier dans les questions éthiques, de plus en plus largement imprégnée des opinions répandues par la secte, celle-ci tient plus que jamais au secret maçonnique.
Ce qui était clair par contre, du moins jusqu’à Vatican II, c’était la position de l’Église. Dans Humanum Genus par exemple, le pape Léon XIII, après avoir rappelé les condamnations de ses prédécesseurs, faisait observer que les événements leur ont donné raison : le danger que représente la secte n’a fait que croître depuis.
L’un des buts pour lesquels elle ne cesse de combattre, expliquait le pape, est la séparation de l’Église et de l’État. Cet objectif est aujourd’hui doublement atteint : dans les institutions d’une part et – beaucoup plus fondamentalement – dans les esprits de ceux qui devraient en être les adversaires, au point qu’un document pontifical récent parle de “juste séparation” en assurant même qu’elle est nécessaire !
Il suffit de parcourir, même rapidement, l’encyclique de Léon XIII pour se rendre compte qu’aux yeux des papes, la secte maçonnique représente l’un des plus graves dangers qui menace la société, au point que l’un d’entre eux, Pie IX, parlera à son sujet de “synagogue de Satan”.
Or, peu après Vatican II, Paul VI charge le Secrétariat pour les non-croyants d’entreprendre un dialogue avec la secte : les “conversations catholico-maçonniques de Rome et d’Ariccia” (1969-1977), qui aboutiront à l’abrogation de l’excommunication des francs-maçons prescrite par le pape Clément XII en 1738 et renouvelée jusque là par tous ses successeurs. Un rapprochement significatif avec la “synagogue de Satan”, même si, devant le scandale provoqué par cette décision, la CDF maintient en vigueur, malgré la suppression de l’excommunication, l’interdiction de s’affilier à la maçonnerie.
Pour en revenir à Assise, je vous signale que l’un des deux experts qui a participé aux conversations officielles avec la franc-maçonnerie, le R.P. Esposito, rejoint largement l’opinion du Grand-Maître maçon cité par l’abbé Bourmaud, puisqu’il écrit dans son livre Les grandes concordances entre Église et maçonnerie (p. 12-13) :
Le 27 octobre 1986 Jean-Paul II invite à Assise les chefs suprêmes de nombreuses religions. Tous prient pour la paix, chacun reste dans sa propre religion et prie avec ses propres formules. L’esprit d’Assise, qui s’était déjà manifesté un nombre infini de fois, même si c’était en des termes moins solennels et publics, a ensuite réalisé de nombreux autres pas. C’est exactement pour asseoir cet esprit que la franc-maçonnerie a été instituée et elle l’a codifié dès le premier jour de son existence. Depuis lors en loge se réunissent des hommes de toutes les religions, lesquels s’interdisent de parler de ce sujet. À Assise les hiérarchies de toutes les religions priaient et parlaient non de religion, un thème qui les aurait divisées et opposées, mais de paix ; en loge, les frères parlent et prient pour la même chose, ou pour le perfectionnement de l’homme, pour le développement global, pour la bienfaisance, la philanthropie. C’est de la tolérance, non de l’indifférentisme religieux, ni du syncrétisme religieux. Il y aura des gens mal pensants ou scandalisés, mais au moins qu’ils se rendent compte qu’ils sont du parti de Mgr Lefebvre et non de celui du Concile et du Pape Wojtyla.
V.