Bonjour Luc Perrin,
1. Il me semble que dans la vie de l'esprit, que ce soit au coeur de l'Eglise ou au sein du monde, tout n'est pas avant tout une question d'herméneutique, ou une question d'interprétation, contextualisée ou problématisée ; encore faut-il connaître et comprendre, avant d'interpréter.
2. Il me semble que l'acte premier devrait pouvoir être un acte d'appropriation, de communication, d'explicitation, ou de réception et de transmission, dans le cadre de ce que je suis tenté d'appeler (je n'ai pas trouvé de meilleure expression) un "épistémisme théorétique", c'est-à-dire un acte de connaissance ayant pour effet et pour objet d'aboutir
- à la compréhension du message formulé,
et
- à la contemplation des mystères exprimés,
en l'occurrence, dans au moins deux des seize documents conciliaires : Dei Verbum et Lumen Gentium.
3. Or, si ce travail, nécessaire et préalable, d'appropriation, de communication, d'explicitation, du contenu substantiel de chacun de ces deux documents,
- a été mal effectué,
ou
- n'a pas été effectué,
ou
- a été effectué en aval d'une herméneutique inspiratrice et introductive, influente et surplombante, tendancielle et tendancieuse,
ne pensez-vous pas que
- la forme, voire le fond, de certains (autres) documents du Concile,
- l'ambiance interne et le contexte externe propres à l'avant-Concile, au Concile lui-même, et à l'après-Concile, au sein même de l'Eglise catholique,
en sont les uns et les autres, presque également responsables ?
4. Admettons par ailleurs un instant que l'herméneutique rupturiste néo-moderniste ou néo-progressiste ait eu, et ait toujours, des effets pathologiques ; comment se fait-il que ces effets pathologiques ne soient pas combattus ni désignés en tant que tels par ceux-là mêmes qui clament régulièrement leur attachement et leur fidélité au Concile, au sein de la majorité des évêques ?
5. Admettons également un instant que l'herméneutique continuiste et le recentrage ratzinguérien aient une vertu thérapeutique, disons à moyen terme ; comment se fait-il alors que cette herméneutique et ce recentrage soient goûtés fort modérément par les mêmes évêques, qui semblent plutôt avoir tendance à considérer que celui-ci et celle-là sont un retour en arrière, et non un retour à l'essentiel, vis-à-vis du Concile ?
6. J'ai toujours considéré pour ma part, depuis que je me suis remis à réfléchir sur toutes ces questions, à partir du début de l'année 2007, qu'au Concile, des éléments de continuité (qualitativement et quantitativement non négligeables) avaient été mis à la fois
- en présence d'éléments de renouveau (DH, NA,...)
et
- au service d'une d'intention englobante, d'une intention générale, plus rénovatrice que traditionnelle, dans l'acception "tridentiniste" de ce dernier terme.
7. Le devoir m'appelle, je m'interromps donc, mais je pense que vous comprenez ce que j'essaie de dire : à un moment donné, il faudrait peut-être se dire que si le Concile a été si mal compris, et si l'après-Concile a été si mal vécu,
a) ce n'est peut-être pas avant tout ou seulement à cause
- d'un déficit de réception ou de transmission,
ou
- d'une herméneutique rupturiste déformante,
ou
- d'une période de l'histoire de l'Eglise ou du monde,
b) mais c'est sans doute aussi du fait de la forme et d'une partie du fond d'un corpus textuel, en lui-même, qui s'est mal prêté, hier, qui continue à mal se prêter, aujourd'hui, et qui continuera peut-être à mal se prêter, demain, à une réception et à une transmission qui seraient beaucoup plus ou encore plus certainement, concrètement, directement et fidèlement propices à la consolidation de la Foi au sein même de l'Eglise.
Bonne journée et à bientôt.
Scrutator Sapientiae.