Messages récents | Retour à la liste des messages | Rechercher
Afficher la discussion

Dès demain lire Marielle Lamy pour les XIIe-XVe s.
par JVJ 2022-12-08 18:29:56
Imprimer Imprimer

parce que franchement...

Il est lourd d'entendre parler ex cathedra qu'une fête orientale du VIIe s. est "pistable" jusqu'à sa définition dogmatique au XIXe s., laissant entendre que, globalement, c'était partagé partout sur douze siècles. On voit d'ailleurs les regards qui se cherchent sur le plateau.
Et puis, pourquoi donc ne pas forcer le trait en disant que depuis deux mille ans, la chose était entendue... Le risque de périodiser le sentiment religieux et les croyances : grand danger ! La définition fut jugée nécessaire, mais durant la période médiévale, disons les siècles étudiés par ML, nulle part cette "croyance" n'était partagée et fêtée par tous les catholiques.

J'ai parlé cent fois des Dominicains anti-immaculistes vers 1400 à Paris (la fine fleur des universitaires de la chrétienté) et de la gêne des néo-thomistes de la fin du XIXe s. quand ils tordaient les textes de Thomas d'Aquin pour qu'il rentre dans leur moule !
Si c'était une vérité de foi, ils ne se seraient jamais risqués à dire le contraire, eux, les champions de l'orthodoxie ! Alors que les Franciscains, immaculistes, ont eu une paire de déviants...

Invoquer Sixte IV ne suffit pas non plus (comme chacun sait ? ministre général de l'Ordre des Frères Mineurs !!!! comme par hasard).
Depuis quand une fête instituée avec tel rang par un pape a valeur partout ? Il faudrait sortir de l'Eglise des XIX-XXe s. !
La fête-Dieu, d'abord inventée à Liège par un ancien évêque de Langres, a convaincu petit à petit avant qu'un pape ne s'en occupe. Et ceux qui lisent les manuscrits liturgiques savent que nombreux sont ceux qui n'ont pas adopté la fête-Dieu en même temps que Rome ! Pour les chapitres cathédraux, il faut attendre qu'un chanoine ou un évêque finance cette fête et intéresse les membres à leur participation.
Et c'est aussi une autre chronologie pour les ordres centralisés qui, en chapitre général, ajoutent des fêtes dans leur calendrier, avec des degrés de solennité différents.

Je souris comme l'excellent journaliste quand j'entends l'abbé Barthe dire, le plus sérieusement du monde, que rien de ce qui sort de Rome en liturgie ne peut être contraire à la Foi...
En est-il ainsi depuis 60 ans ? Ou alors Rome n'est plus dans Rome...

Il y aura des bougies sur mes fenêtres ce soir (sang lyonnais oblige, et même de TlaD-L...) et je m'aligne sur les fêtes catholiques, mais faire croire que le bourgeon je ne sais quoi et que tout découlait de source...



Mme Lamy est mcf HDR en médiévale à la Sorbonne, éditeur de sermons bernardins aux Sources chrétiennes.
Chercheur austère qui n'a pas à défendre quoi que ce soit.

La collection qui a publié sa thèse est ce qu'on fait de plus sérieux en histoire des croyances et de la théologie.

Résumé relativement honnête du livre trouvé en ligne (je vous épargne les comptes rendus à comité de lecture, pas forcément en ligne) :

Souvent confondue avec la conception virginale de Marie, l’immaculée conception affirme que Marie a été préservée du péché originel qui atteint chaque individu au commencement de son existence. Cette doctrine s’est forgée au cours des derniers siècles du Moyen Âge dans les tâtonnements et les affrontements, comme le montre le cheminement chronologique suivi par l’A. La première partie de l’ouvrage est consacrée à la naissance et au développement de la controverse, du début du XIIe siècle au début du XIIIe. L’introduction en Occident de la fête de la Conception rencontre en effet l’hostilité d’une partie du clergé, dont le principal porte-parole est Bernard de Clairvaux (chap. I). Le dossier de textes rassemblés et présentés par l’A. (chap. II) permet de cerner les enjeux de la discussion, ainsi que les arguments utilisés en faveur de la fête (chap. III) et de la doctrine de la sanctification de Marie par l’Esprit saint in utero (chap. IV-V). Pendant la période d’apogée de la théologie scolastique, qui fait l’objet de la seconde partie (vers 1240–1305), les plus grands maîtres de l’Université, Thomas d’Aquin et Bonaventure en tête, réfutent la doctrine du privilège de l’immaculée conception pour Marie (chap. I). La fête de la Conception continue toutefois à se répandre et d’autres penseurs, dans la péninsule ibérique et surtout en Angleterre, élaborent à la fin du XIIIe siècle et au tout début du XIVe une nouvelle formulation de la doctrine. L’A. montre que c’est l’interprétation univoque des écrits du franciscain Jean Duns Scot (mort en 1308) qui relance la controverse (chap. II-III). La troisième partie de l’ouvrage, enfin, couvre la période allant de la mort de Duns Scot en 1308 à la définition prononcée solennellement lors du concile de Bâle en 1439. L’A. effectue d’abord une sorte d’“ état des lieux ” dans la première moitié du XIVe siècle, passant en revue successivement le milieu universitaire, les ordres religieux, la papauté et le peuple des fidèles (chap. I). Chez ces derniers, sensibles à la pastorale et à la prédication des ordres mendiants, la fête du 8 décembre devient quasiment générale et la doctrine immaculiste, vulgarisée, se répand. Suscitant un enrichissement du débat et de l’argumentation, très nombreux sont désormais les maîtres qui interviennent dans la controverse (chap. II). Celle-ci tourne à l’affrontement entre Franciscains et Dominicains tout en sortant, à partir des années 1360, du seul cadre de Paris et de son université. Le “ lobbying ” des immaculistes (p. 591) aboutit à la proclamation de la conception sans tache de Marie au concile de Bâle, alors en lutte contre le pape, ce qui ne clôture pas les débats (chap. III).

Désolé de dire que toute personne qui n'a pas lu ce livre ne peut avoir quelque opinion que ce soit sur l'Immaculée Conception entre 1100 et 1500 en Occident.
A moins, à la marge, d'avoir lu des articles (sérieux) sur les anti-immaculistes dominicains ou les actes issus de l'Université de Paris tançant les Dominicains (Charles VI en profitera pour ne plus avoir de confesseurs dominicains, au profit de séculiers).
Il y eut des amendes honorables sur le parvis de Notre-Dame par ces pauvres Dominicains... Ils risquaient tous de brûler, or pour eux, on ne pouvait absolument rien déduire des Ecritures (c'était même le contraire !).

Des centaines de mss liturgiques et de missels n'ont pas au XVe s. la moindre mention d'une fête de la Conception de Marie (et encore moins d'une Immaculée Conception).

Pour que les plus ouverts du FC comprennent : c'est un peu, à l'époque, comme ceux qui aujourd'hui veulent faire, à partir des Ecritures, Marie co-rédemptrice.
Quand François XV en fera un dogme, je m'alignerai. D'ici là, c'est une option, mieux, un danger ou une outrance. C'est ce que disaient les Dominicains vers 1400.

Il faut s'enlever de la tête l'existence éventuelle d'un corpus catéchétique pour toute la chrétienté au XIIe s. ou même au XVe s.
Les pratiques et les croyances étaient à géométrie variable, en dehors des dogmes (et encore... que sait-on de ce qu'un prêtre islandais marié du XIe s. comprenait à la messe qu'il disait ? et des simples croyants des Alpes au XIVe s. ? et des Templiers ordinairement illettrés ?).
Les résumés de la Foi pour des curés (pas de séminaires à cette époque pour formater !) apparaissent timidement, et les degrés d'exigence des évêques sont très variables.
Les écoles de théologie sont très diverses aussi, et si vous saviez à l'époque carolingienne (pour autant qu'on sache) !
Le catéchisme ou tout compendium de la foi à l'usage des laïcs sont des choses impensables avant la Renaissance, Renaissance comprise. Cum grano salis. On demande de connaître le credo, et cela suffit. Le rosaire ou le chapelet, c'est surtout à l'usage des analphabètes et des convers illettrés ordinairement. Nul besoin de réciter en rond de telles prières quand on doit lire de manière cursive des traités de théologie ou de philosophie.

Même un prêtre traditionnaliste à peu près formé à l'Université ne peut tenir des propos opposés à ce que je viens d'écrire, sans me relire.

Ai-je dit une seule fois que l'IC est une fête optionnelle en 2022 ?
Je suivrai la messe ce soir grâce à cnews (Cotignac, dans le Var) et je serai en grande communion de prière avec un enfant mort l'an dernier à l'heure où j'écris, à quelques mètres de là où je me trouvais.
Comme ma foi est ce qu'elle est, je ne peux être apaisé en pensant aux enfants morts trop tôt, même quand les ornements sont en blanc pour les plus petits (un prêtre tradi un jour m'a presque eng* pour dire que ma théologie était mauvaise et que c'est l'enfant qui priait pour nous au Ciel ! j'ai compris sa démonstration, mais bon, je ne souhaite à aucun parent de porter un cercueil blanc après la messe des anges). Je suis tristissime pour leurs proches et pour cette vie qui ne demandait qu'à se développer (le fameux bourgeon...).
La mort d'un enfant ne me blase pas. Mes vieux amis curés, pour certains, m'ont dit aussi cela malgré les dizaines et les dizaines d'enfants qu'ils ont pu enterrer.

     

Soutenir le Forum Catholique dans son entretien, c'est possible. Soit à l'aide d'un virement mensuel soit par le biais d'un soutien ponctuel. Rendez-vous sur la page dédiée en cliquant ici. D'avance, merci !


  Envoyer ce message à un ami


 Immaculée Conception : mythe ou réalité ? par Semper parati  (2022-12-08 10:11:50)
      Eve et Marie, Pierre Corneille par Vocatus  (2022-12-08 13:55:24)
      Dès demain lire Marielle Lamy pour les XIIe-XVe s. par JVJ  (2022-12-08 18:29:56)
          Franchement… par Semper parati  (2022-12-08 18:37:48)
              Il se trouve.... par Pol  (2022-12-08 19:40:34)
              C’est la pleine lune par Adso  (2022-12-08 21:19:50)
          Merci à Trente ! par jejomau  (2022-12-08 21:06:30)
          Merci Jvj par Rex Vaincra  (2022-12-08 21:28:46)
              Ca tombe bien par Meneau  (2022-12-08 21:54:11)
                  Et réouverte par ptk  (2022-12-08 23:04:32)
                  Super ! par Rex Vaincra  (2022-12-08 23:05:59)
                      Peu m'importe par Meneau  (2022-12-09 09:35:20)
                          Respectable avis par Rex Vaincra  (2022-12-09 22:52:38)
                              Vous vous trompez par Jean-Paul PARFU  (2022-12-09 23:07:59)
                                  Aïe ! par Rex Vaincra  (2022-12-11 16:56:26)
                                      Une chose que vous ne pouvez pas balayer d'un revers de main par XA  (2022-12-11 18:38:42)
                      Equivoque : Révélation - Ecritures par Sacerdos simplex  (2022-12-09 10:14:32)
                      Luc 1:28 par poil à gratter  (2022-12-09 11:05:41)
                          Cher néo-liseur par XA  (2022-12-09 11:31:36)
              Pas gentil de me rapprocher des protestants... par JVJ  (2022-12-08 22:14:35)
                  Protestant ou réformé par Rex Vaincra  (2022-12-08 23:14:36)
                      Pour vous répondre par Jean-Paul PARFU  (2022-12-09 08:52:05)
                          Comme souvent, Maître! par Lucas  (2022-12-09 09:35:41)
          Vive le Langrois saint Bernard de Clairvaux ! par Fenestri  (2022-12-09 10:04:58)
              L'épistolographie est une chose sérieuse et votre Bernard par JVJ  (2022-12-09 17:41:29)
      Relire la Bulle par XA  (2022-12-09 10:46:10)


223 liseurs actuellement sur le forum
[Valid RSS]