Chers liseurs,
J'ai toujours considéré le Forum catholique où je reviens comme un espace de discussions religieuses et à ce titre, je me permets de relayer ici des questions qui me taraudent depuis quelques mois, et qui n'ont en commun que de porter sur la notion de péché.
1. La crise des abus sexuels dans l'Eglise, que chacun vit douloureusement m'a fait me demander dans quelle mesure, s'il y a "culture de l'abus" comme l'avance le pape François, expression peut-être exagérée, la rémission des péchés, non pas en tant que dogme, mais que réalité spirituelle éminemment libératrice dont on ne bénéficie pas sans faire amende honorable et sans manifester une volonté de conversion réelle et forte, n'envoie pas un mauvais signal en ce qu'elle sous-entend, à la fois comme symbole et à des oreilles non exercées, que le péché n'est pas grave, qu'il est remis par le sacrifice de la Croix, qu'il est donc relatif, que la Rédemption est un transfert de responsabilité qui la dilue, et vogue la galère!, des victimes dussent-elles voir leur vie brisée par la commission de péchés susceptibles de rémission, et se sentir insultées quand on les enjoint de chercher davantage la résilience que la réparation d'un préjudice incompensable et indédommageable.
2. Au plan psychologique, l'analyse transactionnelle nous informe du triangle infernal bourreau/victime/sauveur dans lequel, comme tout cela est un jeu de rôle où la relation est première sans que les personnes soient essentialisées, il suffit de se déplacer d'un point pour que le sauveur se transforme en bourreau, le bourreau en victime et la victime en sauveur, déplacement qui a eu lieu en régime chrétien (l'analyse transactionnelle a trouvé ce triptique en raison de ce régime), non que le Sauveur ait été notre bourreau bien qu'il Lui arrive de nous menacer du feu éternel, mais Il a été victime, du dernier sacrifice, nous dit René Girard, dont la pensée n'est pas parole d'Evangile et dont l'approfondissement des Écritures semble se limiter à opposer la violence qui serait inhérente au sacré (d'où la tendance à la désacralisation actuelle), et l'Evangile du Royaume, comme s'il n'y avait pas de violence dans les paroles évangéliques, pas de menaces, pas de chantage: "Vous êtes mes amis si vous faites ce que je vous commande."
3. La foi nous enseigne que Jésus s'est fait homme à l'exception du péché. Il s'est incarné, mais Il n'a pas endossé une bonne moitié de notre condition humaine qui est pécheresse, ce qu'on peut comprendre puisqu'Il est Dieu. Il s'est incarné à une exception près qui n'est pas une petite exception, il semble que nous ne soyons pas à un oxymore près. Comment le comprendre si nous pouvons lever le voile d'un si grand mystère?
4. Mais quand, poussant plus loin, nous voulons vérifier si Jésus n'a point péché, ce qui est peut-être impertinent, nous trouvons qu'Il peut avoir mauvais caractère, renverse, menace, se met en colère, est impatient contre le figuier qui ne donne pas du fruit quand ce n'est même pas la saison, rabroue sa mère, est dur avec ses frères, ses disciples, ses amis. Là encore, comment le comprendre?
Je ne compte pas que vous aurez réponse à tout, d'autant que qui a réponse à tout n'a en réalité réponse à rien, mais je vous partage ces questions, rappelant que le Christ a dit être venu "pour une remise en question, pour que ceux qui voient deviennent aveugles et que ceux qui se croient justes soient convaincus de péché. Qu'en pensez-vous?