Les trois "amis" venus essayer de persuader théologiquement Job que s'il souffrait c'était évidemment qu'il avait fauté, et qu'il devait chercher où. Job dit que non, sa conscience sait qu'il ne se reproche rien, rien de rien.
Job dit :
Voilà qui est bien dit ! Mais je n'ignore pas non plus que Dieu est grand. Il sait tout ; il peut tout ; à peine avons-nous une idée de sa puissance. Eh bien ! j'en jure par ce Dieu qui me refuse justice, jamais je ne m'avouerai coupable ! Maintenant je vais à mon tour vous expliquer la Providence. La sagesse parfaite appartient à Dieu seul, qui la possède depuis le commencement du monde. Quant à l'homme, la sagesse consiste pour lui à craindre Dieu et à éviter le mal. Cette sagesse, je l'avais, et il fut un temps où j'étais heureux en la
gardant fidèlement. J'étais riche et honoré ; mais j'étais bienfaisant, et je me flattais que ma félicité durerait toujours. Maintenant je suis honni, méprisé, affligé dans mon corps et dans mon âme. Dieu ne m'écoute pas.
Je vais mourir. Pourtant je n'ai rien à me reprocher : j'ai été chaste, ennemi de la fraude, charitable, désintéressé, éloigné de l'idolâtrie, sans rancune envers mes ennemis, hospitalier pour les étrangers, prêt à reconnaître mes torts si j'en avais. Voilà pourquoi aujourd'hui je ne puis pas me taire. Mon dernier mot est celui-ci : Je suis innocent; si Dieu a quelque chose à me reprocher, qu'il paraisse !
Dans notre livre, Dieu ne se montre pas encore. On lit au contraire cette rubrique étrange : « Ici finissent les discours de Job ; » puis un récit en prose, assez gauche et embarrassé, où il est dit comment, les trois amis gardant le silence, un certain Élihu, nouveau personnage dont on indique la généalogie, se fâcha contre Job, parce qu'il se faisait juste au dépens de Dieu, et contre ses amis, parce qu'ils ne l'avaient pas bien réfuté. Ce cinquième interlocuteur paraît s'attribuer la fonction d'arbitre et il donne tort à tous les autres.
ÉLIHU (XXXII-XXXVII). — J'ai gardé le silence jusqu'à présent, parce que vous êtes plus âgés que moi.
Mais, en vous écoutant, j'ai constaté que vous ne répondiez pas à Job ce qu'il fallait. C'est pourquoi je prends la parole à mon tour, avec impartialité.
Je suis franc, Job, et je suis ton égal : si tu as une réponse à donner, tu pourras la produire sans crainte.
Tu dis que tu es juste, que Dieu te punit sans raison et qu'il profite de ce qu'il est le plus fort pour ne pas te répondre. Or Dieu a plusieurs manières de parler, d'avertir les hommes, pour qu'ils s'éloignent du péché et qu'ils ne méritent pas la mort.Tel, par exemple, est
frappé de maladie : un ange intercède pour lui ; il guérit et remercie Dieu qui l'a épargné, en le purifiant de ses fautes.
Tu dis aussi que tu es frappé sans être coupable et que Dieu est injuste. Dieu ne peut pas être injuste. Le maître du monde ne peut pas manquer à l'équité. C'est lui qui juge tout, et ses arrêts s'exécutent sur les nations comme sur les individus. En accusant Dieu d'injustice, tu as mérité la continuation de ton châtiment.
Tu dis encore qu'il ne te sert à rien d'être sans reproche. En vérité, que tu sois innocent ou coupable, cela n'importe pas à Dieu, mais à toi. Tu te plains que Dieu ne t'écoute pas; mais tes récriminations ne sont pas des prières. Attends humblement la décision du souverain Juge.
Dieu n'est pas indifférent aux affaires de ce monde.
Il veille sur les justes. Les malheurs qui les atteignent sont des avertissements qui les invitent à rentrer en eux-mêmes pour examiner, reconnaître et regretter leurs fautes. S'ils sont dociles à cette leçon, ils finissent leurs jours dans le bonheur. Quand on n'a pas cette docilité, on périt. Ainsi succombent les impies. Mais la souffrance est pour les justes une introduction à la félicité. Voilà ce qu'elle sera pour toi, si tu le veux. Garde-toi donc de perdre patience et de te souhaiter la mort.
Songe à ce qu'est Dieu. Au lieu de le critiquer, il convient de le louer. Vois la puissance de celui qui fait tomber la pluie, qui gouverne les nuages, dont la main porte la foudre, qui a pour voix le tonnerre. La neige et le froid manifestent son pouvoir. L'orage est l'instrument de sa justice et de sa bonté. As-tu la science qu'il faut pour comprendre et gouverner toute sa création ?
Pauvres mortels que nous sommes, nous n'avons qu'à révérer sa majesté.
Ainsi le discours d'Élihu s'annonce, se développe et finit comme la conclusion de toute la dispute. Cependant Iahvé, que l'on n'attend plus, fait son apparition et reprend le débat au point où Job l'a laissé.
IAHVÉ (XXXVIII-XLI). — Que signifient ces propos insensés? Réponds, si tu peux, aux interrogations que je vais te poser. Est-ce toi qui as créé le monde, fondé la terre, séparé la mer du continent, creusé l'enfer, réglé la succession du jour et de la nuit, préparé dans les cieux les réservoirs de la neige, de la grêle, des vents et de la pluie? Est-ce toi qui fais marcher les astres, qui conduis les orages et qui arroses la terre? Est-ce toi qui veilles sur les créatures et qui leur as donné leurs instincts? Aurais-tu été capable de créer des animaux tels que le chamois, l'onagre, le buffle, l'autruche, le cheval, l'aigle, l'hippopotame, le crocodile?. Veux-tu censurer celui qui a fait tout cela, avoir raison contre Dieu? Il faudrait pour cela que tu fusses le Créateur.
JOB (XL, 3-5; XLII, 2-6). — Il est vrai. J'ai parlé comme un ignorant. J'accepte mon sort.
Vient ensuite l'épilogue.
Iahvé reproche aux trois amis de n'avoir point parlé de lui comme il fallait. Mais il leur pardonne en considération de Job, qui offre pour eux un sacrifice. Job lui-même est récompensé de sa charité envers ses amis. Ses parents et connaissances reviennent à lui. Sa fortune lui est rendue en double. Il a sept fils et trois filles, les plus belles du monde. Il meurt plein de jours.