C'est aussi pour cela que j'ai pris le soin de faire un petit topo historique de la situation, car elle n'est pas forcément bien connue et beaucoup de mensonges ont été déversés ces dernières années (voir le reste du fil hélas). Je me souviens de mon côté de la très intéressante série d'articles que vous aviez partagé sur le Tibet dont j'ai gardé les liens : parties 1, 2 et 3.
Les Missions Étrangères de Paris ont aussi joué un grand rôle dans l’évangélisation des Karens, vous pouvez trouver ici une courte biographie par exemple du Père Calmon, mep (1906-1981) :
Camille Rio mep, Des saints et des héros : Portraits croisés de deux apôtres du peuple karen, Major Hugh Paul Seagrim – Père Edouard Calmon, in Revue des Missions Etrangères N°522, Décembre 2016 lien
Le Père Edouard Calmon, des Missions Étrangères de Paris, arrive en Birmanie, à Bassein, en 1934. En 1935, il est nommé vicaire du Père Loiseau au poste de Papun, où il restera jusqu'à son retour en France en 1970. Les conditions d'apostolat sont dignes des premiers apôtres, la mousson, la forêt tropicale et les tigres en sus : nulle route dans les montagnes karens très éloignées des grands centres, les visites se font à pieds, par tous les temps et en toute saison. Avec très peu de moyens, le missionnaire constitue une petite mission augmentée d'une école, et rayonne dans un territoire de près de deux cent kilomètres! Point d'objectif militaire ici, ni politique : Calmon est prêtre et missionnaire, et se gardera bien, sa vie durant, d'interférer dans les affaires intérieures d'une Birmanie décidément très turbulente. En 37 années de vie missionnaire il n'aura pour objectif que le salut spirituel et physique de ses chrétiens, l'annonce de la Parole et la formation d'une église autochtone (« former des élites » est sa constante préoccupation). En parcourant le mince dossier qui lui est consacré aux archives des Missions Étrangères de Paris (une trentaine de feuillets), on est surtout impressionné par l'extraordinaire persévérance dont il fait preuve, alors que les malheurs paraissent ne pas vouloir cesser : sa mission est entièrement détruite par deux fois, par deux fois il recommence de zéro (la mission de Papun est mise à sac par les japonais et le BIA en 1942 ; bombardée par les birmans et entièrement détruite en 1954). En 1943, il se livre aux japonais pour épargner ses chrétiens. Il est emprisonné au camp de Tavoy, dont il ressort vivant (contre toute espérance, quand on connaît les conditions de détention des prisonniers de guerre) en 1945. Il est donné pour mort depuis deux ans et on a fait, en France, dire des messes de Requiem à son intention. La guerre anglo-japonaise finie survient la guerre civile, pendant laquelle il subit la persécution tant des rebelles karens que des militaires birmans. En 1964, quatre de ses chrétiennes sont violées et tuées près de la mission. Son catéchiste est retrouvé mort, assassiné. En 1966, tous les missionnaires avec permis provisoire doivent quitter le pays, il se retrouve isolé. Affaibli (en 1965 il est atteint d'une fièvre typhoïde), il subit une première attaque en 1970 qui le contraint à revenir en France, où il se retire dans sa famille, à Gramat, dans le Lot. Il meurt le 4 Octobre 1981.
Les chiffres qu'il envoie à Paris pour l'année 1967 (72 baptêmes, 19 mariages, 7 extrême-onctions, 17 confirmations, 3813 confessions, 15780 communions), pour modestes qu'ils soient, forcent le respect pour qui connaît les conditions d'apostolat dans les montagnes karens. En 1970, il aura ouvert 20 écoles a Papun (partie Nord) et Kamanaung (partie Sud). Il scolarise alors près de 500 enfants, aura doté plusieurs familles de champs de riz, d'un buffle, ou de presses à cannes a sucre ou presses à huile. Mais l'essentiel surtout est accompli : parmi les enfants de ses « écoles d'élites », plusieurs deviendront prêtres et religieuses, un de ses vicaires est devenu évêque, l'église a pris racine et est capable désormais de donner ses propres fruits.
Ou encore
ici pour la fin de ses jours, où, frappé d'hémiplégie, son évêque lui demanda de rentrer en France où il finit ses jours en 1981 dans son diocèse natal de Cahors.