que je ne recherche pas la provocation? Je vais tenter d'adoucir mon propos sur la forme et de m'expliquer sur le fond.
J'ai mentionné cet exemple peut-être provoquant mais bien réel et choisi parmi des milliers d'autres semblables pour illustrer le danger d'une union trop étroite entre le trône et l'autel. Voltaire s'y entendait certes à merveille pour monter en épingle ce genre d'affaires. S'il eût rencontré moins de réponses hautaines et péremptoires, si l'Eglise avait pris conscience du danger que lui faisait courir son recours trop facile au bras séculier, peut-être n'eût-elle pas été emportée avec le trône en 1789.
Et non, les procès de sorcellerie ne furent pas principalement le fait des Etats protestants. Les premières grandes épidémies de bûchers eurent lieu un siècle avant la réforme. Des Etats protestants y participèrent mais la France y prit une bonne part (lisez le traité de Démonomanie de Jean Bodin de 1580, il y est constamment question de "femmes brûlées toutes vifues") ainsi que et surtout les principautés épiscopales allemandes. Un jésuite admirable, Spee von Langenfeld, tenta en vain d'attirer l'attention de ses contemporains sur l'inanité de ces pratiques, lui dont les cheveux étaient devenus précocement blancs à force d'accompagner au bûcher les victimes du prince-évêque de Würzburg (lire sa Cautio criminalis de 1631, traduite en français sous le titre Advis aux criminalistes en 1660).
Plus largement sur la question des Etats catholiques, qui a joué un rôle central dans les premières oppositions au Concile ainsi que dans la rupture de 1988. Mgr Lefebvre et le cardinal Ratzinger en disputaient encore en juillet 1987, le second soutenant qu'un Etat ne peut, par lui-même, avoir de religion (Biographie de Mgr Tissier, p. 576; je ne suis donc pas en si mauvaise compagnie). Malgré ou à cause de toute l'admiration que l'on porte (et que je porte) à Mgr Lefebvre, l'on demeure rétrospectivement gêné de l'entendre citer la dictature de Videla en exemple d'Etat catholique dans le sermon de Lille de 1976.
L'étude de l'histoire tend à montrer que l'onéreuse protection de l'Etat pour la diffusion de la vérité chrétienne s'est presque toujours, au final, retournée contre l'Eglise. Celle-ci a longtemps réagi par une apologétique (inquisition, croisades, colonisations et j'en passe) souvent partiale et qui ne convainquait que les convaincus. L'existence d'une légende noire, largement exploitée par les "ennemis de l'Eglise" ne signifie pas encore que l'histoire fût blanche, tant s'en faut. La fin des Etats catholiques ne fut pas la pire des conséquences du Concile pour l'Eglise catholique: le plus souvent elle marqua heureusement la fin d'un compagnonnage avec des régimes scabreux.
Voilà mon point de vue en grandes lignes. Et je vous promets de modérer ma fougue dans mes prochaines interventions.
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