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Sophie Deschamps, "Le Silence des soutanes, Pédocriminalité dans l’Église"
par Cristo 2020-06-25 08:23:21
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"j’ai des convictions vegan, féministes et écologistes" : quels sont les critères pour être journaliste dans un média catholique ?

"J’ai obtenu une bonne rupture conventionnelle" : notre denier du culte finance-t-il le réseau RCF ? J'espère que non.

Le préfacier, Jean-Pierre Sueur, est un influent sénateur (PS) franc-maçon ad orientem notoire.





« Les faits sont graves… »
Sophie Deschamps, ancienne journaliste à RCF Loiret, a choisi de s'intéresser aux affaires de pédocriminalité au sein de l'Église. Dans Le silence des soutanes, elle s'interroge également sur les solutions à trouver collectivement pour éviter que de tels faits ne se reproduisent. Une « plongée douloureuse mais nécessaire », selon l'auteure. Entretien.

jeudi 18 juin 2020


Propos recueillis par Gaëla Messerli


Comment est né ce livre ?
Qu’est-ce qui vous a poussée à l’écrire ?

Ce n’est pas contre l’Église que je l’ai écrit. Je n’ai aucune haine. Les faits sont suffisamment graves, pas besoin d’en rajouter. Mais c’est en rapport avec elle. Au départ, cela part d’un procès qui s’est déroulé le 30 octobre 2018 à Orléans. Pour la première fois, un évêque, André Fort, et un prêtre, Pierre de Castelet, sont jugés ensemble, le même jour. Je travaillais encore à RCF et j’avais prévenu que je comptais couvrir le procès. J’arrive devant le Palais de Justice et j’y retrouve des gens de l’évêché. À la question « vous venez assister au procès ? », on me répond : « on vient soutenir notre évêque » ! Choquée, j’insiste en demandant : « pas pour les victimes ? » Là, on me répond : « pour les victimes aussi, mais surtout pour notre évêque » !

Et ensuite ?

Le procès va durer de 14h à 22h. Je ressors bouleversée face aux vies brisées et surtout face au silence assourdissant de l’Église. J’ai une minute trente sur RCF national, le lendemain, juste le temps de passer un extrait de l’interview d’Olivier Savignac, une des victimes, de l’avocat du Père Fort et d’Edmond-Claude Fréty, l’un des avocats des parties civiles. Au niveau de RCF Loiret, j’ai cinq minutes d’antenne, pas un créneau spécial… Mais j’ai mon carnet de notes du procès et je me dis que cela vaudrait le coup d’en faire quelque chose. Le 12 décembre, je suis convoquée par ma direction. J’ai obtenu une bonne rupture conventionnelle. Fin janvier, j’étais « libérée ». J’ai bien vécu ce départ, car cela faisait 26 ans que j’étais à RCF et j’en avais fait le tour. J’avais le temps et l’argent suffisants pour pouvoir écrire ce livre.

De quelle manière avez-vous procédé ?

Il y a eu le procès d’Orléans auquel j’ai pu assister, mais j’ai aussi travaillé sur le procès de Lyon à partir de la presse. J’ai également travaillé à partir de livres comme celui de Christine Pedotti, Qu’avez-vous fait de Jésus ? ou encore Au troisième jour, de l’abîme à la lumière, de Véronique Garnier-Beauvier, ainsi que L’Église catholique face aux abus sexuels sur mineurs, de Marie-Jo Thiel. Sur des films et des documentaires également. J’ai aussi réalisé un entretien avec Olivier Savignac, plus de trois mois après le verdict, ainsi qu’avec Jean-Pierre Perrin-Martin, un ex-prêtre orléanais et son épouse.

« Mettre plus d’horizontalité »

La préface est de Jean-Pierre-Sueur…

Oui, c’était logique, car il est membre de la commission commune d’information sur les politiques publiques de prévention, de détection, d’organisation des signalements et de répression des infractions sexuelles susceptibles d’être commises par des personnes en contact avec des mineurs dans le cadre de l’exercice de leur métier ou de leurs fonctions au niveau du Sénat. Il a fait partie de ceux qui souhaitaient la création d’une commission d’enquête parlementaire sur la pédophilie au sein de l’Église. De même, j’ai écrit ce livre sous le nom de Sophie Deschamps, mon nom de journaliste, car c’est essentiellement un travail journalistique.

« Je ressors bouleversée face au silence de l’église »

Dans votre livre, vous posez la question de l’après, à savoir : comment lutter aujourd’hui contre la pédocriminalité ?

Oui, je m’intéresse aussi à la prise de conscience dans l’Église, à la place des victimes, ainsi qu’au rôle des femmes. Les femmes font beaucoup de choses, mais on ne leur laisse pas assez de place. Il y a aussi la lutte contre le cléricalisme. Il faut cesser de mettre les prêtres sur un piédestal, et il faut mettre plus d’horizontalité dans les institutions ! Je me suis aussi intéressée à la question du mariage des prêtres et, au niveau judiciaire, au travail du législateur.

Aujourd’hui, au niveau personnel, après tout cela, où en êtes-vous avec l’Église ?

J’ai pris mes distances, mais je me reconnais encore dans les valeurs de l’Évangile…

Désormais, avez-vous envie d’écrire d’autres livres ?

Il y aura le procès d’Olivier de Scitivaux. Cela boucle ce livre et ma longue parenthèse au sein de l’Église. J’écris pour Mag Centre et j’ai notamment réalisé un journal pendant les 55 jours du confinement. Après j’ai des convictions vegan, féministes et écologistes. La question du monde d’après m’intéresse, mais je vais prendre d’abord de la distance !


Sophie Deschamps, Le Silence des soutanes, Pédocriminalité dans l’Église, Regain de Lecture, 18 €.


https://www.tribune-hebdo.fr/orleans/les-faits-sont-graves




« Le soir même du procès, j’avais déjà envie d’écrire sur cette histoire »

mardi, 23 juin 2020

Le 30 octobre 2018, pour la première fois en France, un prêtre, Pierre de Castelet, et un évêque, André Fort, sont jugés conjointement au tribunal correctionnel d’Orléans. Le premier pour des actes de pédocriminalité, le second pour avoir omis de les dénoncer. Les peines tombent un mois plus tard : trois ans de prison dont un an de sursis pour l’abbé Castelet et huit mois avec sursis pour l’ancien évêque d’Orléans. En 2019 et 2020, Lyon devient à son tour l‘épicentre judiciaire des affaires de pédocriminalité dans l’Église avec le très médiatisé procès du Cardinal Barbarin, suivi de celui de l’ex-prêtre Bernard Preynat. Ces procès ont eu le mérite de mettre fin au silence assourdissant de l’Église catholique qui étouffait toutes ces affaires depuis trop longtemps. Notre consœur journaliste Sophie Deschamps, revient sur ces procès hautement symboliques et donne la parole aux victimes, à qui elle dédie son livre, Le Silence des soutanes, sorti en librairie le 10 juin 2020.


Le Silence des soutanes, sorti en librairie le 10 juin 2020, retrace l’histoire du procès orléanais du 30 octobre 2018 de pédocriminalité dans l’Église. Pourquoi avoir écrit sur cette histoire ?

Sophie Deschamps : À l’époque, je suis toujours journaliste radio chez RCF. Le procès commence à 13h30 et se termine à 22 heures avec une interruption d’une demi-heure. Et je n’ai qu’une minute trente d’antenne pour en rendre compte ! Je suis frustrée car je n’ai que très peu de temps d’antenne et je me retrouve avec une matière considérable puisque j’avais un carnet de notes rempli qui allaient être perdues. Pourtant c’était une première en France, un prêtre et un évêque jugés conjointement. Immédiatement je me dis qu’il y a un quelque chose à faire… Le soir même du procès, j’avais déjà envie d’écrire sur cette histoire.

Au-delà du procès, vous souhaitez avant tout donner la parole aux victimes…

S.D. : Oui car je suis sortie de ce procès écœurée. À l’entrée du tribunal j’ai vu des gens de l’évêché qui m’ont dit venir pour soutenir l’évêque. Et les victimes ? leur ai-je demandé…Oui les victimes mais on vient surtout pour l’évêque, ont-ils répondu. J’ai pris une vraie claque !

Et les victimes se sont confiées…

S.D. : J’ai contacté Olivier Savignac, une des victimes, pour lui expliquer mon projet. Il m’a de suite fait confiance. Quand j’ai décidé d’écrire cette histoire, j’ai voulu faire un portrait des victimes. Je me suis dit qu’il fallait l’incarner ce procès et qu’Olivier allait parler au nom de toutes les victimes. J’ai laissé dire à mes victimes la dénonciation, la souffrance, les témoignages… ce livre leur est dédié.

L’écriture de ce livre se passe à un moment charnière de votre carrière professionnelle. Pouvez-vous nous en dire plus ?

S.D. : En effet, le 31 janvier 2019, j’ai quitté RCF et pour la première fois je dispose d’un luxe dont j’ai longtemps été privée : du temps ! Dès le 1er février je suis allée m’acheter une imprimante et un stylo plume. Parce que ça participait de ce désir d’écrire et de passer du micro à la plume… J’ai travaillé sur tous les comptes-rendus et je trouvais intéressant de voir comment cette affaire était traitée journalistiquement, dans La Croix, Libération, l’Humanité. Entre temps je me suis replongée dans des lectures portant sur ce sujet. J’ai revisionné l’émission de Cash investigation de 2015. Et il y avait plein de choses qui sortaient à ce moment-là : le film Grâce à Dieu le 22 février et en mars le documentaire Arte sur les religieuses abusées. Ça n’arrêtait pas ! Durant les quatre mois où j’écris le livre il y a de l’info tous les jours.

Vous dîtes qu’en écrivant très vite vous vous interrogez sur l’après…

S.D. : Oui, lors de l’écriture très vite je pense à une troisième partie qui interroge sur ce qu’il y a à faire maintenant. Qu’est-ce qu’on peut mener comme chantier pour que les choses changent ? Car ça ne se passe pas que dans l’Église, il y a le monde du sport, l’Éducation nationale… Le débat doit être assumé. Ce qui m’intéresse c’est comment on essaie de vivre tous ensemble, je suis plus sur les valeurs humanistes que religieuses. Une Église qui prêche d’un côté et fait totalement l’inverse de l’autre, ce n’est pas possible !

Votre livre a-t-il été bien reçu ?

S.D. : Oui ! J’ai été très encouragée dans ma démarche même par l’évêque Jacques Blaquart à qui j’ai écrit une lettre pour l’informer de mon projet.

Outre le travail journalistique, ce livre est aussi le résultat de votre passion pour l’écriture…

S.D. : Complètement ! Ecrire un livre répond à une envie que je nourris depuis très longtemps, il me manquait le bon sujet. Une fois j’ai eu envie d’écrire au sujet des enfants sans papier, il y a une dizaine d’années mais je manquais de confiance. Depuis j’ai acquis une certaine maturité, je songe d’ailleurs à écrire un polar…

Propos recueillis par Elodie Cerqueira
Le Silence des soutanes, Pédocriminalité dans l’Église – Sophie Deschamps
Préface de Jean-Pierre Sueur -Editions Regain de lecture – 248 pages – 18 €
Pour Info :
Retrouvez Sophie sur les ondes de France Bleu Orléans le 24 juin à 7h45 !

Commentaires

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K.TO écrit:
Le 24/06/2020 à 00:43

Je ne veux pas nier l’existence des faits reprochés au curés, prêtres, etc, toutes ces personnes de l’Eglise Catholique coupables d’abominations !
Par équité, vous allez écrire un livre intitulé “le silence des blouses grises” (instituteurs de mon enfance) !
Puisqu’il est facile de tirer sur des soutanes ou des corbeaux, vous ne devriez pas rencontrer de difficultés à tirer sur les enseignants, voire les éducateurs sportifs !
Et les autres religions avec des lois bizarres qui officialisent la pédophilie, vous avez prévu une sortie pour quand ?
Ah oui, il va vous falloir du courage cette fois ci, du vrai de vrai pour vos prochains ouvrages !


mouche du coche écrit:
Le 24/06/2020 à 09:21

sujet très sérieux mais que de “je ceci”, “je cela” !… Comme l’impression que ce sujet essentiel est devenue une cause personnelle et un tremplin personnel également.
Sujet complexe par ailleurs, comme l’a montré le procès de Lyon.
Dommage que la commission Sauvé ne soit pas évoquée à propos de la partie “que faire après ?” de l’article.


desnous écrit:
Le 24/06/2020 à 09:46

Bonjour et bravo d’avoir écrit sur ce thème de la pédocriminalité qui, malgré les accusations de toutes parts comme vous le précisez, reste un sujet tabou.
Donner la parole aux victimes est parfois la seule “réparation” qu’elles ont des actes subis.
Et si cela pouvait aussi faire prendre conscience au plus grand nombre que ce fléau qui détruit la vie des victimes doit être réellement et sévèrement puni, un grand pas serait franchi ! Cordialement


Marthe C écrit:
Le 24/06/2020 à 10:45

Merci Sophie Deschamps d’avoir eu le courage, je dis bien le courage, de prendre cause pour les victimes en relatant leur histoire à l’occasion de ce procès. Les procès d’intention (je suis d’accord mais…), voir les commentaires ci-dessus, visent toujours à minimiser les faits reprochés pour protéger les institutions concernées, et en cela les églises sont fortiches, alors même qu’en reconnaissant les crimes commis en leur sein elles en sortiraient grandies.


https://www.magcentre.fr/197931-le-soir-meme-du-proces-javais-deja-envie-decrire-sur-cette-histoire/

     

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