1. Je me suis sans aucun doute fort mal exprimé: mon argument n'est pas un argument d'autorité, il ne consiste pas simplement à faire appel à l'autorité: il consiste à poser le problème de l'autorité, de savoir qui la détient ou non: c'est tout autre chose.
2. Vous pouvez préférez l'interprétation bienveillante pour le terme «ersatz»: le problème, c'est que ce mot est utilisé dans un contexte (destruction, dénaturation, censure) où tous les termes sont pris en leur sens diésé. Cela fait système et m'amène à penser que le choix du terme ersatz, sous la plume acérée et tranchante de M. Daoudal, renvoie bel et bien à son sens fort de «Produit ou personne de substitution et de moindre valeur» (voir ici). Au fond, le problème que me pose M. Daoudal est un peu analogue à celui dont parle Julien Gracq à propos de Céline.
«Il y a dans Céline un homme qui s’est mis en marche derrière son clairon. J’ai le sentiment que ses dons exceptionnels de vociférateur, auxquels il était incapable de résister, l’entraînaient inflexiblement vers les thèmes à haute teneur de risque, les thèmes paniques, obsidionaux […]. Le drame que peuvent faire naître chez un artiste les exigences de l’instrument qu’il a reçu en don, exigences qui sont […] avant tout celles de son plein emploi, a dû se jouer ici dans toute son ampleur. Quiconque a reçu en cadeau, pour son malheur, la flûte du preneur de rats , on l’empêchera difficilement de mener les enfants à la rivière.»
Je ne veux nullement faire de M. Daoudal un Céline ni un joueur de flûte de Hameln, je veux simplement dire que lui aussi a reçu un don – celui du polémiste – qu'il s'est lui aussi «s'est mis en marche derrière son clairon» et que cela le fait user de termes, à mon goût, trop forts, trop brutaux et trop crus pour correspondre à une réalité autrement nuancée et subtile et, surtout, pour la traduire. C'est tout.
3. «Noster Thomas loquitur semper formaliter» [“Notre saint Thomas parle toujours formellement”] dit Cajetan (je cite de mémoire). M. Daodual parle toujours de messe et jamais de rit (je vais moi aussi sacrifier à la petite coquetterie du traditionaliste): je lui fais l'honneur de penser que, comme saint Thomas, lui aussi parle
formaliter. Et “formaliter”, non, la messe NOM n'est pas et ne peut être un ersatz de moindre qualité qu'une messe VOM – toujours ‘formaliter loquendo’: formellement, il n'est de messe meilleure ou moins bonne qu'une autre. Une messe est une messe et c'est le Christ qui y actualise de façon non sanglante son sacrifice au Golgotha. C'est la seule chose donc que je soutiens à l'inverse,
me semble-t-il, de M. Daoudal qui, n'usant jamais du terme ‘rite’ – excusez-moi d'abandonner cette fois la ‘parlure’ traditionaliste – et toujours du terme ‘messe’, me paraît soutenir (
formaliter et ut verba sonant – veuillez excuser cette grotesque pédanterie scolastique à laquelle je ne recours que pour des raisons de facilité –) la position contraire.
Sur ce, je vais aller me coucher: demain, je ne peux me permettre de faire la grasse matinée.
Cordialement.
Pacem tuam da nobis, Domine