Lu sur Nord Littoral :

Hames-Boucres : la fin des messes en latin à cause de travaux fait réagir
Chaque dimanche depuis 35 ans, l’église Sainte-Victoire d’Hames-Boucres accueille une messe traditionnelle en latin, la seule dans le Calaisis. Dans quelques semaines, les traditionalistes (de la Fraternité Saint-Pie X, NDBJ) vont devoir quitter les lieux appartenant à la commune.

Alea jacta est, les dés sont jetés : il ne sera plus possible d’accueillir les messes traditionnelles en latin dans l’église Sainte-Victoire d’Hames-Bourcres à partir du mois d’avril. Sur le parvis, on ne parle que de ça. Les fidèles se posent la question : « A-t-on trouvé une solution pour continuer les processions ? » Ils n’ont pas encore la réponse mais pour la mairie, c’est le gong de fin.

Pas de places pour deux ?

La décision a été prise par la commune d’Hames-Boucres, propriétaire de l’église Sainte-Victoire et de l’église Saint-Martin… qui sont en fait liées. Cette dernière, utilisée pour les processions catholiques « classiques », avec une messe une fois par mois, va entrer dans plusieurs phases de gros travaux. Ce qui entraînera naturellement sa fermeture « pendant au moins quatre ans », selon le maire Philippe Bouchel, qui a donc décidé de t ransférer les processions… vers l’église Sainte-Victoire. Et c’est là qu’il y a un couac.

Les élus hames-boucrois veulent privilégier leurs habitants. « Il y a une procession par mois et en moyenne trois mariages et sept enterrements par an. On a de la chance d’avoir deux églises sur la commune. Cela aurait été une injustice pour les habitants de se déplacer dans un autre village », explique Philippe Bouchel, qui indique qu’il y a plus de (fidèles NDBJ) locaux aux messes de l’église Saint-Martin alors qu’il n’y a « qu’un ou deux Hames-Boucrois » aux messes traditionnelles.

Mais si la messe « ordinaire » se tient le samedi soir et que la traditionnelle a lieu le dimanche matin, n’y a-t-il pas moyen d’accueillir les deux communautés ? Selon le maire il n’y aurait « pas de cohabitation possible » entre les deux. « J’ai donc demandé à l’abbé Espinasse et l’abbé Bal-Pêtré de quitter les lieux car le prêt de l’église va s’arrêter, même si je comprends le chagrin que cela peut engendrer. » Une décision que ne comprennent évidemment pas les fidèles de Sainte-Victoire.

35 ans plus tard…

L’abbé Espinasse, prieur-doyen de la Prieuré de la Sainte-Croix, est presque résigné. Avec l’abbé Bal Pêtré, il officie régulièrement à Hames-Boucres. « Cela fait 35 ans que les messes se font ici, tous les dimanches à 8 h 45. » Quand on lui parle du mois d’avril, il grimace. « On a peu de temps pour trouver quelque chose. »

Se replier dans une autre église qui réalise le même type de procession ? « Compliqué. » La plus proche est à Boulogne-sur-Mer, à l’église Saint-Louis. « Certains habitent ici, dans le village, ça fait loin. » Il souhaite trouver une solution ici, sans déménager. « On est très content d’être accueillis ici mais il y a cette difficulté. On espère que d’autres solutions sont possibles pour que nous puissions rester ici. »


L’Abbé Espinasse, du Prieuré de la Sainte-Croix, s’est résigné à l’arrêt des messes en latin dans l’église Sainte-Victoire.

Les fidèles, à l’entrée de l’église, sont un peu plus récalcitrants. Ils sont une cinquantaine à assister à la messe chaque dimanche. Robert est en colère : « C’est honteux ! On a proposé plein de solutions et elles ont toutes été refusées. Cette église doit continuer à vivre. Elle rayonne plus loin qu’à Hames-Boucres. » Des propos confirmés par Paula, tout juste arrivée aussi. « Ils sont beaucoup de monde à se déplacer pour aller à ces messes en latin. Quand mes sœurs viennent de Bretagne ou du sud, à chaque fois, elles passent par Sainte-Victoire. »



Jean-Pierre est belge et vient de Wissant pour assister à la messe. « Nous sommes plusieurs Belges à venir. On ne sait pas comment on va faire en avril. On vient pour maintenir nos traditions chrétiennes. C’est le côté solennel, la beauté du culte qui nous fait venir ici. » Alors, pour les 150 ans de l’église Sainte-Victoire, c’est bien un tournant qui pourrait avoir lieu dans cet édifice.

Une pétition à venir ?

À la sortie de l’église ou sur les réseaux sociaux, le sujet fait jaser. Un post nommé « Non à l’abus de pouvoir du maire d’Hames-Boucres » a été publié sur Facebook. « L’exécution de cette décision de retirer la chapelle aux abbés qui la desservent actuellement aboutirait à priver les fidèles attachés à la messe traditionnelle d’un lieu de culte à Hames-Boucres. »

Pour beaucoup d’entre eux, il est possible que les deux cultes soient complémentaires comme le dit le post : « Actuellement, il ne se tient pas plus d’une messe ordinaire par mois dans l’Église de la commune d’Hames-Boucres. Il serait parfaitement concevable que cette seule messe mensuelle et les messes de funérailles soient célébrées dans la chapelle tout en conservant la possibilité aux abbés desservant la chapelle actuellement de continuer à célébrer la messe traditionnelle chaque dimanche. » Il est évoqué « l’atteinte à la liberté de culte ».

Ça ressemble à quoi une messe en latin ?
Dans la petite église Sainte-Victoire, ils sont nombreux à se rassembler pour prier en latin pendant à peu près une heure. Chacun apporte son petit missel avant d’entrer dans l’église. Il s’agit d’un livre liturgique du rite catholique romain dans lequel on trouve tous les textes nécessaires à la célébration de la messe. Ce qui marque le plus, c’est la séparation plus marquée entre le prêtre et les fidèles car le prêtre est dos à son assemblée ou plutôt « vers l’Orient », vers le soleil levant, symbole de la résurrection. En fait, l’assemblée et l’abbé sont tournés dans la même direction.

Pour ce qui est de la procession, il y a quelques variantes mais elle reste sensiblement la même que les processions « ordinaires ». Bien-sûr, la grosse différence est la langue. « Au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit » redevient « In nómine Patris, et Fílii, et Spíritus Sancti ». Mais il n’y a pas que du latin. Le prêtre lit les textes d’abord en latin pour Dieu, puis en français pour l’enseignement des fidèles. Les chants sont, eux, en latin. Dans l’église Sainte-Victoire, c’est en haut de la tribune qu’un chœur les entonne. C’est toutes ces spécificités qui attirent tant de monde chaque dimanche à 8h45 depuis des dizaines d’années.

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