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Jean-Louis Schlegel : « L’unité de l’Église catholique est menacée »
par Bernard Joustrate 2022-03-29 09:40:49
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Lu dans Ouest-France :

Jean-Louis Schlegel : « L’unité de l’Église catholique est menacée »

Le sociologue des religions, ancien directeur de la rédaction d’Esprit, Jean-Louis Schlegel analyse les raisons de la crise qui affecte une institution menacée, selon lui, « d’implosion », alors que le pape François fait l’objet de critiques virulentes de la part des courants traditionalistes.

Propos recueillis par François VERCELLETTO.


Jean-Louis Schlegel, sociologue, spécialiste des religions. © Photo : DANIEL FOURAY / OUEST-FRANCE

Le catholicisme traverse une crise grave, quels en sont les symptômes ?

En France et ailleurs en Europe, fût-ce à un degré moindre, on constate d’abord une baisse généralisée de la pratique religieuse. La pratique dominicale – en principe obligatoire ! – est aujourd’hui inférieure à 2 %. Tous les autres « signaux sacramentels » – baptêmes, confirmations, mariages –, mais aussi les inscriptions au catéchisme, les professions de foi, et même les enterrements religieux sont au rouge. Les vocations sacerdotales restent à l’étiage d’une centaine d’ordinations par an (pour 800 décédés ou partis), dont un quart issu de communautés « traditionnelles », comme la communauté Saint-Martin ou d’autres. Et il y a deux ans, une enquête de l’Ifop a montré que moins de 50 % des Français croyaient en Dieu.

Mais ce tableau concerne les pays occidentaux. Il n’y a jamais eu autant de catholiques dans le monde…

Oui, les statistiques publiées chaque année par le Vatican sont à la hausse, notamment pour le nombre de prêtres dans certaines régions du monde, comme l’Asie (l’Inde surtout) et l’Afrique. Mais dès que la modernité démocratique avec ses libertés et son individualisme consumériste s’impose, comme en Pologne ou en Croatie, les chiffres sont en baisse. Et si on y regarde de plus près, on voit de fortes disparités : les religieuses dites actives, par exemple, sont en net recul, en Afrique entre autres. Faut-il s’en étonner ?

Cette tendance s’est-elle accélérée après les révélations sur les crimes sexuels ?

Ce qui a fait vraiment vaciller l’Église, plus que tout le reste, c’est depuis trente ans la révélation des abus sexuels et spirituels « systémiques » de toutes sortes. Et nous ne sommes qu’au début des enquêtes sérieuses par pays. On n’a encore rien vu pour l’Italie ou pour l’Espagne, grands pays catholiques, peu pour la Pologne… Et qu’apprendront des enquêtes en Afrique, en Asie, en Amérique latine ? On peut s’attendre à des choses extrêmement attristantes.

François, élu en mars 2013, avait soulevé beaucoup d’espoirs. Or, il est très violemment contesté…

Oui, presque de suite, de la part de courants traditionalistes. Des attaques aussi contre sa personne, d’une ampleur et d’une violence inégalées. Peut-être plus que Jean-Paul II, Benoît XVI était le pape « selon leur cœur », et faire son deuil au profit d’un pape en rupture sur tout avec Benoît dépassait leurs capacités d’accueillir le nouveau. Il faut dire aussi que contrairement à Benoît, François a pris acte que les discussions pour les ramener dans le « giron » de l’Église du concile Vatican II ne servaient à rien. En revenant, l’été dernier, sur les facilitées accordées par son prédécesseur pour l’usage des rites anciens – la messe en latin pour simplifier –, François a mis fin à une fiction, et le feu aux poudres.

Le différend dépasse la question du latin…

Bien sûr. François est inquiet pour l’unité de l’Église. Il a constaté que la permission des rites anciens n’a pas servi à réconcilier, mais a au contraire renforcé la création d’une Église parallèle, traditionaliste, opposée au concile.


Les catholiques « tradis » se présentent comme des fidèles exemplaires
— Jean-Louis Schlegel, sociologue des religions


Quels sont les principaux reproches des « tradis » vis-à-vis du pape ?

Ils se présentent comme des fidèles exemplaires de la règle de foi et des exigences morales de « l’Église de toujours », contrairement aux conciliaires libéraux, qui, selon eux, « en prennent et en laissent ». Pour les « tradis », c’est la loi de Dieu et de l’Église qui « tient » les sociétés. Sinon, c’est l’anarchie. Ils se retrouvent donc sur la ligne de Jean Paul II, opposés à toutes les législations qui « permettent » (la pilule, l’IVG, le divorce, la PMA, la recherche sur les embryons…). Ne parlons pas du mariage gay !

Et sur les immigrés ?

Le discours de François sur les réfugiés gêne énormément beaucoup de « tradis ». Surtout quand ces réfugiés, ou ces migrants, sont en majorité de confession musulmane, car selon eux, ils mettent en danger l’Europe chrétienne.

Cela s’inscrit-il dans un schéma politique qui trouve sa source dans une opposition à la Révolution, sinon à la République ?

Ce sont effectivement les héritiers d’une longue tradition politico-religieuse. À l’origine, il y a le traumatisme révolutionnaire qu’a subi l’Église. On peut le comprendre : les massacres de septembre 1792 restent un événement terrifiant. Cela a conditionné les choix politiques ultérieurs de l’Église : refus de la démocratie, soutien à Napoléon III, opposition à Dreyfus, refus de la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État et la laïcité, adhésion au régime de Vichy, défense de l’Algérie française…

Ce courant-là n’a-t-il pas un poids relatif plus important en raison de l’effacement progressif des catholiques conciliaires ?

Oui et non. En chiffres absolus, ce courant ne représente certes pas grand-chose, mais il a retrouvé dans l’Église, au cours des trente dernières années, un certain regain même auprès de jeunes catholiques. Il est peut-être celui qui résiste à l’air du temps et à l’individualisme. Il serait plus juste de parler aujourd’hui de « conservateurs », qui ne sont pas tous au même degré des « anti-François » primaires, ni nécessairement « pro messe en latin ». Mais ce noyau conservateur tend à représenter de plus en plus, l’essentiel de ceux qui restent pratiquants. On les a vus s’agiter au moment du confinement et des conflits autour de la célébration permise ou non de la messe. Et ils bénéficient d’une conjoncture politico-culturelle favorable : voire, entre autres, les idées sur le passé français d’un certain Éric Zemmour… Mais on se pince aussi quand on voit un philosophe comme Michel Onfray, grand pourfendeur du christianisme, cracher sur le pape François et affirmer que la messe en latin fait partie du patrimoine national !

L’autre courant – conciliaire – n’est-il pas en voie de disparition ?

Bien sûr. D’abord, il s’est écoulé plus de cinquante ans depuis Vatican II. La génération conciliaire est maintenant septuagénaire… pour les plus jeunes. Et elle ne s’est pas beaucoup reproduite par les enfants dans ses convictions (elle n’est pas la seule…). Mais il faut quand même dire que Jean Paul II – le pape des droits de l’homme, mais aussi un conservateur incroyable – puis Benoît XVI non seulement n’ont fait aucune réforme, mais ont tenté de restaurer l’ancien ou fait du surplace. Conséquence : nombre de conciliaires déçus sont partis sur la pointe des pieds au fil des décennies.

Que sont-ils devenus ?

Une partie d’entre eux ne sont plus pratiquants, ou occasionnellement. Mais beaucoup se sont investis dans le caritatif au sens large : associations solidaires, ONG comme le CCFD, le Secours catholique ou le Secours populaire, engagements politiques « de service » (maires ou conseillers municipaux) dans la vie publique locale, sans oublier parfois le service de… la paroisse.

Ce qui les différencie des « tradis », c’est qu’ils ne voulaient pas fonder une autre Église, mais la transformer…

Tout à fait. C’est très important de le souligner. Ce sont deux modes différents de concevoir l’Église. Les « tradis » n’hésitent pas à se constituer en petite Église parallèle et unanimiste (un modèle que les sociologues appellent volontiers « sectaire »). Pour les conciliaires, il fallait au contraire réformer la grande Église, dans l’esprit de Vatican II. Ils voulaient que l’Église entière revienne à ses origines selon les Évangiles et l’Écriture sainte. Après le concile, nombre d’entre eux ont participé à des groupes de lecture et d’étude de l’Évangile et de la Bible, selon l’exégèse la plus récente. Rappelons-nous qu’auparavant, on ne lisait pas la Bible dans les familles catholiques. En la lisant, ils ont trouvé une forme de liberté dans la foi et par rapport à une tradition soi-disant éternelle, mais en réalité de part en part historique.


Il n’y a pas eu « trop » de concile, mais trop peu
— Jean-Louis Schlegel, sociologue des religions


Mais ils estiment que Vatican II s’est arrêté en chemin…

Je fais partie de ceux qui pensent, comme le théologien Hans Küng, un ami que j’ai traduit et édité, et beaucoup d’autres, qu’il n’y a pas eu « trop de concile », mais trop peu, qu’en fait il n’a pas été réellement appliqué. Il a produit des textes magnifiques, dynamisants, libérateurs, mais après, il fallait passer à des réformes concrètes, par exemple quant à la place des femmes, à l’ordination d’hommes mariés, au mode de nomination des évêques, etc. Non pas pour « sauver l’Église », mais parce que ces réformes correspondent à une vérité et une demande « démocratique » de notre temps. Mais il n’y a pas eu ces suites pratiques. Au contraire, tout a été freiné. Sans compter l’encyclique Humanae vitae, en 1968 : en condamnant la contraception (contre la majorité de la commission théologique qu’il avait créée), Paul VI a créé un porte-à-faux terrible car les catholiques se sont mis à vivre dans le mensonge. La plupart des femmes, y compris dans les couples restés catholiques, ont en effet pris la pilule, pour des bonnes raisons, contre la loi de l’Église.

À vous entendre, ces deux franges semblent irréconciliables…

Oui, mais à mon avis surtout pour des raisons politiques, ou de la tradition politique très marquée, fût-ce à des degrés divers, dont a hérité le courant anti-conciliaire à cause de son principal instigateur, Mgr Marcel Lefebvre, un Français… Alors que toute pratique cultuelle doit rester à l’écart du politique, ou politiquement « indifférente », donc aussi plurielle, là elle était littéralement confondue avec du politique ! Je vais vous faire une confidence : j’aime le chant grégorien et je pourrais aller de temps à autre à une « messe en latin ». Mais dans les conditions actuelles, ce serait rejoindre une assemblée politiquement plus que marquée, dont je ne partage absolument pas les options, et donc il est exclu pour moi d’y aller.

Après la publication du rapport Sauvé, s’est ajoutée la démission surprise de Mgr Aupetit, archevêque de Paris. L’Église de France est-elle dans la tempête ?

C’est le mot, même si j’ai l’impression qu’elle commence à s’apaiser… en attendant la suite qui ne paraît pas évidente. La Conférence des évêques de France a décidé, au mois de novembre, à Lourdes, de faire des efforts pour aller dans le sens des 45 recommandations de la Commission Sauvé, sur les violences sexuelles dans l’Église. Mais, très vite, Rome s’est précipité pour contrôler ce que l’Église de France allait faire. Il est évident que beaucoup de points – formation dans les séminaires, place des femmes… – ne relèvent pas du niveau français. Je suis curieux de voir quelle sera la liberté de l’Église de France. Je suis assez pessimiste. Je ne crois pas que la tendance soit tellement à réformer, actuellement, du côté du Vatican.

François a pourtant convoqué, en 2022, un synode… sur la synodalité.

On pourrait traduire son objectif simplement, en disant que cette assemblée d’évêques va réfléchir (avec divers invités) à un fonctionnement plus collectif de l’Église, incluant la participation et la reconnaissance de tous, de la base au sommet. Que peut-il en sortir ? Du bien et du mieux, espérons le très fort. Mais rappelons-nous : celui sur la famille (2014) laissait entrevoir une ouverture à la communion des divorcés remariés, et le synode sur l’Amazonie (2019) laissait espérer, pour des raisons importantes, l’ordination d’hommes mariés, dans des zones reculées où la présence d’un prêtre est plus que rare. Or, tout a été plus ou moins refusé pendant ou retoqué par la suite.

François n’est-il pas freiné précisément par la Curie ?

Dès le début, ça a été ça. Il est vrai que François y est allé un peu fort, dans son discours très critique de décembre 2014 sur les « 15 maux de la Curie ». Tout le monde, y compris hors l’Église, a trouvé formidable qu’un pape s’en prenne aux comportements de ses « ministres » et de leur administration. Mais d’un autre côté, ce sont aussi « des fonctionnaires de Dieu »…, qu’il ne faut pas trop « travailler au corps » ni bousculer… et qui préfèrent les câlins, comme tout le monde. Cela a sans doute été une rupture de la confiance entre une partie de la Curie et François.

Indemniser les victimes ne risque-t-il pas de plomber les finances des diocèses français déjà fragilisés par la baisse des dons liée au Covid…

Les diocèses sont très inégaux pour leurs richesses mobilières et immobilières (et le nombre de victimes à indemniser), mais la réparation sera mutualisée (chacun va « apporter au pot » commun selon ses capacités). Selon La Croix du 26 janvier 2022, le Fonds appelé « Selam » (« Fonds de secours et de lutte contre les agressions sexuelles sur mineurs ») aurait recueilli 20 millions d’euros. Cette somme suffira-t-elle ? On a avancé des chiffres beaucoup plus élevés… Elle dépendra du nombre de victimes exigeant une réparation financière. Mais le Selam n’évoque que les « mineurs ». Il y a aussi un nombre important de victimes « majeures » (d’abus sexuels et spirituels), en particulier des femmes.

Une institution aussi gigantesque est ingouvernable
— Jean-Louis Schlegel, sociologue des religions


L’Église de France n’a-t-elle pas perdu de son influence à Rome ?

C’est probable. C’est lié à la faiblesse du recrutement des prêtres. Avoir de l’influence à Rome, c’est envoyer des prêtres pour y faire leurs études, et ensuite les laisser, s’ils le désirent, au Vatican pour travailler dans les différents dicastères (ministères). C’est aussi faire connaître au nonce qu’untel, avec ses compétences, serait utile à la Curie romaine. Mais en France, on ne veut pas forcément se séparer de prêtres susceptibles, par exemple, de faire carrière dans la diplomatie ou d’autres fonctions ecclésiastiques à Rome.

Le pape ne semble guère manifester d’intérêt pour la France, où il n’a encore prévu aucune visite.

C’est vrai. Je me demande si le pape François ne s’oblige pas à aller dans des pays plus exposés que la France, un pays où il serait pourtant « plus que bien » reçu. Il ne souhaite pas non plus servir de caution, comme Jean Paul II, à des Églises européennes en péril. Il est allé en Angleterre, où l’Église établie est anglicane, et dans la Suède protestante. Il semble préférer se rendre dans des pays risqués, comme récemment l’Irak. Il serait sûrement ravi aussi de venir à Lourdes comme ses prédécesseurs, mais j’ai l’impression qu’il ne veut pas trop visiter les pays riches ou les lieux faciles. Après tout, il est le pape qui invite à aller aux « périphéries », et il fait ce qu’il dit.

Face à un tel panorama, ne faudrait-il pas convoquer un nouveau concile ?

Compte tenu de toutes sortes de changements matériels depuis les années 1960, il faudrait sans doute le penser tout autrement. Rappelons qu’il y avait 2.500 évêques au concile Vatican II et maintenant, il faudrait en convoquer plus de 5.000 ! Tout était organisé à l’ancienne en 1962-1965 comme à Vatican I en 1870, voire au concile de Trente (1545-1563), simplement avec des moyens techniques nouveaux. Ne faudrait-il pas d’abord aujourd’hui décentraliser un système dont la centralisation a quelque chose de fou ? Organiser des conciles par continents ou par régions culturelles ? Redonner un vrai pouvoir aux conférences épiscopales nationales ? Vatican II les avait instituées, mais Jean Paul II les a brisées (en 1998) au profit de chaque évêque, successeur des apôtres dans son diocèse, et décidé que les conférences épiscopales n’étaient, au fond, que des structures administratives. Certes, elles facilitent la vie à Rome pour faire remonter ou redescendre les informations. Mais selon Jean-Paul II, ces « outils techniques » n’avaient tout simplement rien à voir avec l’Évangile. Il aurait pu leur donner plus de sens et de pouvoir théologique, mais il a préféré leur enlever le peu qu’elles avaient.

La décentralisation est en panne…

La centralisation, comme la verticalité du pouvoir, s’est accrue dans l’Église depuis cinquante ans, à un point démesuré. Comment voulez-vous qu’une telle institution, gigantesque, soit sérieusement gouvernable ? Constamment renaissent des problèmes sérieux de confiance réciproque entre Rome et les Églises locales. Mais on préfère se gargariser de l’universalité de l’Église, identique de Rome jusqu’au fin fond de l’Océanie ou de l’Amazonie…

N’êtes-vous pas un catholique sociologue, motivé avant tout par la critique de l’Église ?

Il y a dans l’Église catholique une tradition d’obéissance et de soumission qui n’a pas grand-chose à voir avec l’amour véritable de l’Église, et il y a une critique sociologique motivée, aujourd’hui, par le souci de la survie de l’Église et non par l’envie de sa destruction. Une critique avec des arguments, mais qui ne se prétend nullement « infaillible ».

     

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