C'est probablement pour des raisons assez semblables que l'Allemagne et l'Italie ont dominé la vie musicale sous l'Ancien Régime : quand on compare le foisonnement italien ou allemand avec la production française beaucoup plus contenue (quoique de très bonne qualité), il est assez clair que le centralisme ne favorise guère l'épanouissement artistique. Napoléon aura beaucoup détruit.
Pour le cas qui nous occupe, Hasse a été actif à Dresde, alors l'un des principaux foyers culturels de l'Empire : après avoir coiffé la couronne de Pologne, les Électeurs de Saxe (qui se sont en outre convertis au catholicisme) ont jugé nécessaire de donner à Dresde l'éclat d'une véritable capitale royale. L'Opéra am Zwinger était le plus vaste d'Allemagne, il disposait du meilleur orchestre d'Europe et d'excellents chanteurs. Hasse a également écrit le Te Deum et la messe en ré donnés à l'occasion de l'inauguration de l'église de la Cour, actuelle cathédrale catholique de la Trinité.
On sait par Forkel et par Carl Philipp Emmanuel Bach que Hasse et Jean-Sébastien Bach se connaissaient et s'estimaient.
Hasse est un personnage particulièrement intéressant par sa longévité (il est réellement actif comme compositeur à partir de 1725, écrit des opéras jusqu'en 1771 et compose jusqu'à sa mort en 1783) et par sa situation au carrefour de tout le XVIIIe siècle musical européen : Allemand du Nord italianisé et converti au catholicisme, maître de l'opera seria métastasien, il a connu entre autres Keiser, Haendel, Scarlatti, qui a été son maître à Naples, Bach et ses fils, Galuppi, Jommelli, Traetta, Gluck (qu'il détestait), Haydn (qui a soumis son Stabat Mater à son approbation), Salieri, Mozart (qu'il a recommandé en Italie). Mozart avait d'ailleurs pour lui le plus grand respect.
J'ai pour ma part une tendresse particulière, et même une grande reconnaissance pour ce compositeur.
Peregrinus