Comme je l'ai remarqué, ce texte est intéressant, mais il y a une question à poser. L'attitude des évêques de France sous Vichy ne relève-t-elle pas de cette logique de Ralliement et de soumission au "droit nouveau" ? J'ai du mal à classer l'attitude de la plupart des évêques en 1940 dans "l'autre vision" qui "trouve ses racines dans l'histoire longue de notre pays", car l'allégeance au chef de l'État français est clairement dans la logique de "conciliation et de refus des conflits" que souligne justement Jean-Pierre Maugendre. Dans ce cas, le ralliement à un régime soi-disant conservateur n'est rien d'autre qu'une nouvelle mouture d'un certain situationnisme épiscopal qui a peur de froisser les autorités publiques.

C’est fondamentalement sur sa relation au monde que se partage, depuis longtemps et durablement encore, l’Eglise qui est en France. Deux visions s’affrontent. Une vision initiée par Léon XIII et son encyclique sur le ralliement (Au milieu des sollicitudes, 16 février 1892) de conciliation avec les pouvoirs publics et de refus des conflits. Ce fut, en 1905, la position des évêques de France qui étaient prêts à accepter la mise en place des associations cultuelles avant que saint Pie X par l’encyclique Vehementer Nos du 11 février 1906 ne l’interdise absolument. L’autre vision trouve ses racines dans l’histoire longue de notre pays. Le monde traditionnel est, par nature, moins consensuel avec les pouvoirs publics issus de la Révolution française, que le monde conciliaire. Il vibre davantage à la devise de sainte Jeanne d’Arc : « Messire Dieu premier servi » qu’à la déclaration de clôture du concile Vatican II par le pape Paul VI le 7 décembre 1965 : « Nous, plus que quiconque nous avons le culte de l’homme ». Les coups de matraque et les coups de crosse sont constitutifs de sa culture. Il sait que la promulgation de la fête de sainte Jeanne d’Arc comme fête nationale, en 1920, n’a pas été que le fruit de l’action du Saint-Esprit mais aussi la conséquence des 10 000 jours de prison endurés par les camelots du roi. Quant à celui qui restera devant l’histoire comme la figure de proue de la résistance traditionaliste, Mgr Marcel Lefebvre, chacun sait les avanies qu’il dut subir.


J'en tire deux conclusions:

- Cette culture "consensuelle" a bien été appliquée sous Vichy par la plupart des évêques;

- Mgr Lefebvre a dû souvenir des avanies, ce qui est vrai. Un prêtre du milieu traditionnel me disait que sa démarche de résistance était plus gaullienne que pétainiste. En ce sens, Vatican II est plus une démarche de soumission au monde dans une logique d'intériorisation de la défaite proche de celle de 1940. Sur Twitter, un tradi américain décrivait le pape François comme un pape pétainiste. Au passage, je n'ai jamais compris l'admiration inconditionnelle des tradis pour Pétain, dont la logique de soumission est bien celle d'une élite. Faut-il souligner que le frère du cardinal Garrone, qui condamna Mgr Lefebvre, était bien engagé sous Vichy ?

Voilà une aporie dans laquelle peut se situer le traditionalisme.

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