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Colosimo :mgr Sarah,le néocon qui fait du célibat un étendard, porte atteinte à l'Eglise
par Jean Kinzler 2020-02-11 12:10:35
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TRIBUNE Le tour de passe-passe du cardinal Sarah
Publié le 11/02/2020 à 10h07 - Modifié le 11/02/2020 à 10h25
Jean-François Colosimo, théologien orthodoxe

En faisant du célibat des prêtres un étendard, les néoconservateurs maquillent d'un faux dilemme doctrinal le vrai malaise moral des catholiques. Leur raisonnement porte atteinte à la catholicité comme à l'orthodoxie.


Une bonne idée au cinéma peut se révéler un coup désolant en librairie. Sur Netflix, Les deux papes décrivent une période de transition. L’essai Des profondeurs de nos cœurs acte un état de division. Le film excelle en VO sous-titrée, le livre exhale le play-back mal maîtrisé. L’écran affiche une quête de conciliation, le sommaire un projet de compétition. Résultat : les spectateurs exultent là où les lecteurs écument. Trois semaines après la sortie de l’ouvrage, la courbe des ventes se confond avec la spirale des dégâts : Benoît XVI dément avoir béni l’entreprise, Robert Sarah dénie l’avoir manipulé et François sanctionne leur intermédiaire, Georg Gänswein.

Entre manigances curiales et ficelles éditoriales, c’est la papauté qui se trouve ébranlée. Nulle souveraineté ne peut encourir la suspicion d’un duo se livrant à un duel à son sommet, encore moins lorsqu’elle est pontificale et que la contestation de son magistère est mise en scène par des défenseurs supposés de l’ordre recourant cyniquement aux méthodes soixante-huitardes. Le principal sujet de l’Exhortation sur le synode de l’Amazonie, les nouvelles inculturations, est oblitéré : tremblez fidèles, ce ne sont pas les scandales comportementaux qui minent le sacerdoce à l’échelle planétaire mais la possible ordination de quelques hommes mariés dans un immense désert vert à l’autre bout du monde ! Après le rôle de bannière attribuée à la messe en latin par les archéo-intégristes, voici donc le célibat des prêtres promu oriflamme des néo-conservateurs qui vient maquiller d’un faux dilemme doctrinal le vrai malaise moral des catholiques. Tout le problème tient à ce que ce tour de passe-passe soit opéré au nom de la tradition.

La dissemblance des intentions est cependant frappante dans l’attelage prétendument siamois de ce brûlot. Chez l’auguste vieillard qu’est le pape émérite, et auquel on aurait dû épargner l’affliction terminale d’avoir pu paraître parjure à son serment de silence, domine la fidélité de Joseph Ratzinger à la trajectoire intellectuelle et existentielle qu’il a poursuivie depuis sa prime jeunesse. Son apologie de la pratique romaine des ministères est consistante avec son ontologie de la quintessence romaine en ecclésiologie. L’une et l’autre sont contestables et contestées, il le sait, mais une même conception de la sublimité explique l’attachement qu’il leur voue. Il en va tout autrement des confusions et contre-vérités qu’accumulent le texte du cardinal Sarah et qui laissent perplexe quant à l’éducation théologique de la plume qui les soutient.

La sur-théologisation de l'état clérical nuit à la compréhension des problèmes du clergé actuel

La tradition de l’Église indivise, telle qu’attestée depuis la communauté primitive et consignée dans l’Épître pastorale de Paul à Tite (1, 5-6), définit le presbyteros comme « un homme irréprochable, mari d’une seule femme, aux enfants éduqués ». Elle écarte comme indu tout lien entre la continence sexuelle et la pureté rituelle, le concile de Gangres anathématisant dès l’époque impériale, au IVe siècle, quiconque « refuse la communion des mains d’un prêtre marié » (canon 4). Elle a été commune à l’Orient et l’Occident chrétien durant un millénaire avant que la Réforme grégorienne n’impose dans l’univers latin, au XIe siècle, le célibat sacerdotal comme une discipline propice à l’autorité papale. En réaction au protestantisme, cette régulation a fait l’objet d’une sacralisation lors de la Contre-Réforme au XVIe siècle. De bifurcation en bifurcation, on aboutit ainsi à l’essentialisation d’une séquence couvrant moins de cinq cents ans. Avec pour seule question valable, l’impact négatif d’une telle sur-théologisation de l’état clérical sur les problèmes du clergé actuel.

Pour mieux faire taire l’indicible, le cardinal Sarah allie à l’inexactitude l’offense. Jugeant que les peuples nouvellement évangélisés méritent mieux qu’un sacerdoce « de seconde classe » [sic], il s’arrange de l’existence d’un tel sacerdoce dans les Églises orientales unies à Rome en les infériorisant : non seulement elles seraient conscientes de leur imperfection et de leur nécessité de progresser, mais encore leurs fidèles renâcleraient à aller se confesser auprès d’hommes mariés et pourtant ordonnés à cette fin. Mêlant préjugé culturel et fable sociologique, cette diatribe marque une grave régression à l’égard des avancées ecclésiales et œcuméniques de Vatican II : elle porte atteinte à la catholicité, qui outrepasse la latinité, et à l’orthodoxie, qui a sa propre vision de la romanité. Sans compter qu’elle manifeste une étonnante ignorance sur le fait que le célibat ne connaît pas de forme séculière en Orient, mais uniquement de type monastique ou assimilé comme il va en Occident pour les ordres réguliers, différence qui en termes d’ascèse, de spiritualité et de mystique change tout, singulièrement dans la saisie fraternelle de la sacramentalité.

L'eucharistie, droit et propriété du Peuple de Dieu

C’est que l’eucharistie ne représente pas seulement un droit du Peuple de Dieu, mais, à tous les sens du terme, sa propriété qui ne saurait être captée par ceux qui, au lieu de servir la communion réelle, s’en servent pour maintenir leur exception fictive. Est-ce que l’ordination d’hommes mariés et confirmés allégerait ou aggraverait, en l’état, la crise que traverse l’institution ? Telle est la vraie question, celle du kaïros, de l’évaluation du temps T, dont la résolution revient au seul pape François, audacieux dans sa lecture des temps, prudent dans son choix d’un laboratoire-test, maître de la décision parce qu’il en faut un.lavie

     

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 Colosimo :mgr Sarah,le néocon qui fait du célibat un étendard, porte atteinte [...] par Jean Kinzler  (2020-02-11 12:10:35)
      [réponse] par origenius  (2020-02-11 14:06:00)
          Vous trouvez ? par Regnum Galliae  (2020-02-11 14:31:18)
              La communion comme "propriété" des fidèles sent le sacramentalisme par Athanase  (2020-02-11 17:10:26)
      Colosimo est un type honnête, mais par JVJ  (2020-02-11 17:45:54)
          Honnête ? par Luc de Montalte  (2020-02-11 18:51:28)
          [réponse] par Eudoxie  (2020-02-12 17:51:47)
              [réponse] par Regnum Galliae  (2020-02-12 18:16:40)
              certains lisent Sodoma avec délectation par JVJ  (2020-02-12 18:24:10)
                  A propos de ce livre par Regnum Galliae  (2020-02-13 16:13:45)
      C'est un très mauvais texte par Yves Daoudal  (2020-02-11 19:30:04)
          Pour paraphraser Raoul Volfoni par Vincent F  (2020-02-11 20:50:35)
              A qui vous adressez-vous ? par Paterculus  (2020-02-11 22:07:28)
                  Toutes mes excuses à M. Daoudal par Vincent F  (2020-02-12 12:27:56)
                      [réponse] par Yves Daoudal  (2020-02-12 18:20:01)
          comme sont de seconde zone... par Regnum Galliae  (2020-02-13 15:55:50)
      Que dirait ce Monsieur... par Paterculus  (2020-02-11 23:01:51)


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