A l'époque où j'ai commencé à travailler sur cette question, je pensais que le schisme constitutionnel était un schisme simple, explicable à partir du schéma gallicanisme/ultramontanisme qu'emploient souvent les historiens catholiques de la fin du XIXe siècle.

Après avoir avalé une énorme masse de brochures de controverse doctrinale et canonique produites par les deux camps en présence, je crois que le nerf de la controverse n'était pas précisément le lien à l'Eglise romaine, mais la nature de la juridiction spirituelle (ce qui a évidemment des implications sur le rapport avec Rome).

La Constitution civile et ses apologistes ne se sont pas contenté d'attribuer l'institution canonique des évêques aux métropolitains : ils ont dénaturé l'institution canonique en la réduisant à une confirmation, à un constat de capacité intellectuelle et morale de l'évêque élu qu'un tribunal laïc pouvait donner ou faire donner à défaut d'un supérieur hiérarchique (métropolitain ou plus ancien évêque de la province). Ainsi ils ont méconnu l'unité de l'Eglise (et par conséquent le rapport nécessaire de toutes les Eglises avec le centre de l'unité).

L'immense canoniste Maultrot, tout richériste qu'il était, a bien expliqué ce qu'est la mission pour un constitutionnel : une lettre non adressée, que tout prêtre pourvu du caractère peut ouvrir et utiliser à sa guise. L'ecclésiologie constitutionnelle est en fait une sorte de sacerdotalisme (ou d'épiscopalisme, selon les individus) anarchique : l'Eglise constitutionnelle, c'est l'Eglise, avec des évêques, des curés, des vicaires, le catéchisme, la liturgie, tout, sauf l'Eglise : l'Eglise sans l'Eglise, disait Mgr de Bonal, évêque de Clermont, avec beaucoup de justesse : l'Eglise sans l'unité, sans le principe de l'unité qui est la mission donnée par le supérieur hiérarchique. Les constitutionnels ne se sont pas seulement trompés de supérieur. Ils ont nié la mission comme communication d'un pouvoir.

Peregrinus

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