Très Saint-Père, le ministère pétrinien n’a pas été confié à Votre Sainteté afin de lui permettre d’imposer des doctrines personnelles aux fidèles
1. Une exhortation apostolique est un enseignement magistériel donné par le Pontife Romain à l'Eglise universelle.(voir titre et signature d'
Amoris Laetitia)
2. Une exhortation apostolique est un Acte du Siège de Pierre, donc du ministère de Pierre dont le Christ a promis qu'il ne défaudrait pas.(cf. à nouveau Pastor Aeternus, cette fois-ci en insistant sur le fait que la Parole du Christ est citée totalement, tout en affirmant que le Siège Apostolique reste pur de toute erreur, et qu'il est donc exclu explicitement par Vatican I que Pierre puisse défaillir après être revenu de son reniement, aux termes de la Promesse du Christ (et nier cela, c'est rejeter la Parole de Dieu, et donc Dieu Lui-même) :
Leur doctrine apostolique a été reçue par tous les Pères vénérés, révérée et suivie par les saints docteurs orthodoxes. Ils savaient parfaitement que ce siège de Pierre demeurait pur de toute erreur, aux termes de la promesse divine de notre Seigneur et Sauveur au chef de ses disciples : " J'ai prié pour toi, pour que ta foi ne défaille pas ; et quand tu seras revenu, affermis tes frères " [Lc 22, 32].
)
Cela ne signifie toutefois bien sûr pas, à l'instar de la Parole du Christ "le Père est plus grand que Moi", que tout texte magistériel soit immédiatement compréhensible et dépourvu de toute ambiguïté.
Mais le magistère est toujours profondément vrai et sûr, en dépit de l'intégration possible d'éléments contingents, ou d'une perspective parfois étriquée - mais au vrai, cela reste assez naturel : quand on cite "Dieu est Amour" on ne dit pas "Mon Dieu, mon Dieu pourquoi m'as-Tu abandonné", et si on explique le premier, on dit vrai, sans expliquer et forcément tenir compte explicitement du second)
>>> Amoris Laetitia n'est donc pas une "doctrine personnelle" au sens d'un opinion du pape, mais un enseignement magistériel par lequel le Christ Lui-même, qui ne fait qu'une Tête avec Pierre, s'adresse à nous et veut nous conduire à Lui - selon la Parole du Christ "qui vous écoute M'écoute", valable au plus haut point pour le Siège Apostolique.3. Si maintenant par "doctrine personnelle", on veut dire "nouveauté", force est de reconnaître qu'on n'a pas retenu les bons passages d'
Humani Generis (j'ai connu un Recteur de l'Institut qui n'avait jamais remarqué ce passage, si ma vie vous intéresse) :
Et l'on ne doit pas penser que ce qui est proposé dans les lettres Encycliques n'exige pas de soi l'assentiment, sous le prétexte que les Papes n'y exerceraient pas le pouvoir suprême de leur magistère. C'est bien, en effet, du magistère ordinaire que relève cet enseignement et pour ce magistère vaut aussi la parole : "Qui vous écoute, m'écoute... ", et le plus souvent ce qui est proposé et imposé dans les Encycliques appartient depuis longtemps d'ailleurs à la doctrine catholique.
(je préviens...
- a. une objection déjà rejetée plusieurs fois ici ces dernières années : dans la phrase suivante, Pie XII étend solennellement son propos aux Actes des Souverains Pontifes, dont bien évidemment les Exhortations Apostoliques. Le propos n'est donc pas à restreindre d'autorité librexaminique aux seules Encycliques)
- b. un contresens facile (pour éviter aux signataires de la correctio de se ridiculiser en accusant Pie XII d'hérésie) : "appartient depuis longtemps à la doctrine catholique" signifie "appartient depuis longtemps à la doctrine catholique telle qu'elle a été élucidée", et il reste vrai que ce que dit le pape dans ses Actes appartient depuis toujours au dépôt de la Foi.
Tout ceci signifie que le pape peut dans son enseignement introduire
- non de nouvelles vérités (le Dépôt de la Foi - c'est-à-dire ultimement le Christ, Vérité du Père - ne saurait être augmenté - ni Pierre dans son ministère déformer les appels et enseignements du Christ)
- mais de nouvelles précisions (exemple caractéristique la proclamation par un Acte ordinaire qu'une doctrine est à tenir pour définitive)
- ou de nouvelles perspectives.
Par exemple, pour le premier pape jésuite, reprendre dans la perspective des Exercices Spirituels et de la droite tradition ignatienne, une partie de la doctrine morale de l'Eglise.
C'est un changement important de perspective, mais complémentaire des précédentes.
Il est donc normal d'être de prime abord interloqué par Amoris Laetitia.
(comme beaucoup l'ont été quand Paul VI a prophétiquement publié Humanae Vitae)
L'enseignement du pape François est d'autant plus difficile à accueillir que le pape François ne semble pas souvent ménager ses brebis.
Mais nous savons bien que l'histoire de l'Eglise est remplie d'exemples de papes au comportement critiquable, dont la doctrine est demeurée intégralement saine, selon la Promesse du Christ.Pour mémoire : la FSSPX a des difficultés non avec Amoris Laetitia seulement, mais avec la totalité du magistère depuis Vatican II, comme en témoigne nettement son rejet du Catéchisme de l'Eglise catholique, du dernier concile, et des Encycliques des derniers papes.
Cette dernière précision redémontre, au vu de la citation de Pie XII ci-dessus, qu'en refusant la soumission religieuse de l'intelligence et du cœur toujours due au magistère, la FSSPX rejette l'enseignement explicite des papes de Pie IX à Pie XII (cf. les 4 pages que j'ai données par exemple
ici)