Je suis d'accord que l'Histoire "ne repasse jamais les plats".

Je donnerai un autre exemple (en simplifiant beaucoup) d'un châtiment divin, on peut et doit l'appeler ainsi, mais plus dramatique, ce me semble, que le cas de la France de Louis XIV à Louis XVI, et qui me concerne plus directement : la Prusse.

Tout catholique allemand aura toujours une attitude ambigüe envers la Prusse, aussi quand, comme c'est le cas de notre famille depuis 1815, il a été d'abord assujetti au roi de Prusse pour en devenir par la suite un serviteur fidèle, malgré tout.

On le sait : 1815 fut l’année quand le Congrès de Vienne dédaigna de restaurer entièrement les torts et dommages de la médiatisation, et décida, sans trop demander avis, de démanteler (entre autres) l'état souverain auquel notre famille par son origine avait été attachée pendant presque un demi-millénaire, et de consacrer de surcroît l'anéantissement pur et simple de la principauté (ecclésiastique) dans laquelle elle avait résidé (et réside en partie toujours).
C’est ainsi qu’on a été "mangé" par la Prusse, comme d’autres ont été "mangés" par la Bavière et le Württemberg, devenus royaumes par la grâce douteuse de Bonaparte, sans en être inquiétés par après. C’est dire que le bilan de 1815 est mitigé.
Une Prusse gouvernée de surcroît par un prince protestant, en vertu de quoi on s'est retrouvé un peu en situation de diaspora, surtout après 1870 (exclusion des possessions habsbourgeoises) quand le soi-disant Kulturkampf du prince Bismarck se faisait sentir douloureusement et éprouvait les loyautés, réputées inébranlables avant 1793.

La royaume de Prusse de l’Ancien Régime se compose de deux parties anciennement distinctes, le marquisat du Brandebourg (un des Electeurs de l’Empire), faisant partie entière de l’Empire, gouverné depuis 1415 par la maison des Hohenzollern, et le duché de Prusse, issu en 1525 de ce qui restait (après les guerres avec la Pologne et la Lithuanie) de l’état de l’Ordre teutonique (qui s’était développé à l’Est depuis 1226 à la demande des ducs polonais), situé en dehors du territoire impérial. Le roi de Prusse se trouvait donc avec un pied dans l’Empire, et avec l’autre en dehors. Au fil des temps d’autres territoires impériaux, aussi à l’Ouest, s’y sont ajoutés.
1525 : première date fatidique : le dernier grand-maître de l’Ordre teutonique, un jeune moine (né en 1490), Albert de Brandebourg, de la famille des Hohenzollern, devient luthérien, prend femme et convertit son fief en duché héréditaire (c'est son oncle, le roi de Pologne, qui le lui confirme).
1618 : par héritage, ce duché de Prusse se joint au marquisat de Brandebourg, dirigé depuis 1415 par la même famille des Hohenzollern; l’Electeur gouverne désormais les deux pays en union personnelle.
1701 : l’Electeur Frédéric III s’autoproclame (à Königsberg, dans le duché de Prusse, en dehors de l’Empire) "Roi" sous le nom de Frédéric I, avec l’aval de l’Empereur Léopold I, et unit définitivement les deux parties, le marquisat et le duché.
1871 : la Prusse devient l’état dominant de l’Empire bismarckien. Le roi de Prusse devient en union personnelle Empereur allemand (pas : Empereur de l’Allemagne ! mais "deutscher Kaiser", pour ménager l’Empereur, l’autre Allemagne).

Si Dieu a permis qu'en 1945 la Prusse (quoique non coupable des crimes nazis et idéologiquement à ses antipodes) fût non seulement détruite politiquement, fait terrible pour tout Etat, mais en grande partie anéantie physiquement et matériellement, ce qui en fit un événement irréversible, un cataclysme personnel pour beaucoup et culturel pour l’Europe, il faut pour le comprendre reprendre ce fil rouge de l’histoire, de 1525, 1618, 1701 à 1871.
Au fond : une félonie, un vol, une imposture et un coup d’état.

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