Dans mon précédent article j’ai relevé une citation d'un document produit par La Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme qui ne fait rien de moins que de contester l’historicité de la bible et, par voie de conséquence, l’inerrance biblique. Or cette dernière a été solennellement confirmée par de nombreux papes, à commencer par Léon XIII dans Providentissimus deus. Léon XIII l’établissait de manière on ne plus claire, affirmant que l’Ecriture sainte dans son intégralité était écrite sous la dictée de l’Esprit Saint : « En effet, tous les livres entiers que l’Eglise a reçus comme sacrés et canoniques dans toutes leurs parties, ont été écrits sous la dictée de l’Esprit-Saint. Tant s’en faut qu’aucune erreur puisse s’attacher à l’inspiration divine, que non seulement celle-ci par elle-même exclut toute erreur, mais encore l’exclut et y répugne aussi nécessairement que nécessairement Dieu, souveraine vérité, ne peut être l’auteur d’aucune erreur. » Les pères de l’Eglise partageaient déjà cette conception de l’inerrance intégrale de l’Ecriture sainte. « Aussi, dit saint Augustin, puisque ceux-ci ont écrit ce que l’Esprit-Saint leur a montré et leur a enjoint d’écrire, on ne doit pas dire que lui-même n’a pas écrit; ceux-ci, comme les membres, ont mis en œuvre ce que la tête leur dictait. » Saint Grégoire le Grand s’exprime encore en ces termes: « Il est bien superflu de chercher qui a écrit ces livres puisqu’on croit fermement que l’auteur en est l’Esprit-Saint. Celui-là, en effet, a écrit qui a dicté ce qu’il fallait écrire: celui-là a écrit qui a inspiré l’œuvre. » Toute l’exégèse moderniste, validée notamment par la Commission pour les relations religieuses avec le judaïsme, est en révolte contre cette vérité et cherche à ramener l’Ecriture sainte à des écrits de circonstance. C’est pourquoi depuis le XIXe siècle, 5 papes successifs, de Léon XIII à Pie XII, ont combattu ces erreurs en réaffirmant l’inerrance intégrale de l’Ecriture sainte. Pie XII précisera d’ailleurs dans Humanis Generis « Ainsi on a audacieusement perverti le sens de la définition du Concile du Vatican sur Dieu, auteur de la Sainte Ecriture; et la théorie qui n’admet l’inerrance des lettres sacrées que là où elles enseignent Dieu, la morale et la religion, on la professe en la renouvelant, bien qu’elle ait été plusieurs fois condamnée. » L’idée contre laquelle se dresse Pie XII est donc celle qui veut que l’inerrance, de même que l’infaillibilité pontificale, ne touche que les questions de foi et de morale. Ce que rappelle donc ici Pie XII c’est que l’inerrance de l’Ecriture sainte n’est pas restreinte à ces deux domaines. Or c’est, je crois ne pas me tromper, ce qu’enseignent la plupart des professeurs dans les séminaires, pour peu qu’ils conservent encore un certain aspect de l’inerrance biblique. Tout l’enjeu étant de pouvoir continuer de flirter avec certaines théories scientifiques ou historico-critiques incompatibles avec la révélation biblique. Mais Léon XIII avait pourtant là aussi expliqué fort clairement que la bible est normative même en matière de science de la nature et d’histoire : « Ils doivent retenir fidèlement que Dieu, créateur et maître de toutes choses, est, en même temps, l’auteur des Ecritures; rien donc ne peut se trouver dans la nature, rien parmi les monuments de l’histoire, qui soit réellement en désaccord avec celles-ci. »
Comment cette question fut-elle traitée lors du Concile Vatican II ? Fidèlement à sa tactique, le concile s’est montré extrêmement ambigu.
Dans Dei Verbum, la version en français explique « Dès lors, puisque toutes les assertions des auteurs inspirés ou hagiographes doivent être tenues pour assertions de l’Esprit Saint, il faut déclarer que les livres de l’Écriture enseignent fermement, fidèlement et sans erreur la vérité que Dieu a voulu voir consignée dans les Lettres sacrées pour notre salut. » La texte en latin dit «Cum ergo omne id, quod auctores inspirati seu hagiographi asserunt, retineri debeat assertum a Spiritu Sancto, inde Scripturae libri veritatem, quam Deus nostrae salutis causa Litteris Sacris consignari voluit» et selon que l’on considère Litteris Sacris comme un ablatif ou un datif, le sens en est radicalement changé. Dans un cas le texte dit que la bible atteste( ou consigne) comme véridiques les seules vérités qui sont nécessaires au salut, dans un autre que la bible atteste toutes les vérités et que ces vérités consignées dans la bible sont nécessaires au salut. La traduction française ne lève pas l’ambiguïté. Or en 2008, lors du synode des évêque sur la parole de Dieu, c’est bien la première approche de Dei Verbum qui a été promue dans L’instrumentum laboris produit par le Vatican et « guidée par le Saint-Père Benoît XVI » donné aux participants du synode. L’instrumentum laboris soutenant que l’inerrance biblique ne s’applique qu’aux vérités qui concernent notre salut, prenant donc le contre-pied radical de Léon XIII et des papes qui se sont succédés jusqu’à Pie XII, mais également de l’enseignement constant de l’Eglise. «Même si les Saintes Écritures sont inspirées dans leur totalité, leur inerrance se réfère uniquement à la « vérité […] que Dieu, en vue de notre salut, a voulu qu’elle [l'Écriture] fût consignée dans les Saintes Lettres » (DV 11) peut-on en effet lire dans cet Instrumentum laboris (ici) La traduction anglaise va plus loin, car elle rajoute un conditionnel : « with regards to what might be inspired in the many parts of Sacred Scripture, inerrancy applies only to « that truth which God wanted put into sacred writings for the sake of salvation » (DV 11); « Pour ce qui regarde ce qui pourrait bien être inspiré ( might be inspired) »
Mais à part cela tout va bien, il y a continuité parfaite entre l’enseignement de l’Eglise avant et après Vatican II.
ESCHATON