Bon, il s'agit d'une recension, c'est nécessairement très court et schématique, il faudrait évidemment compléter ou corriger mon propos par une lecture attentive du livre. Je me permets de prendre quelques extraits et de les commenter.
Cette dernière se caractérise par un rapport au sacré et au surnaturel dépourvu de toute gratuité : le praticien de l’ésotérisme ambitionne de manipuler l’invisible pour en tirer bénéfice – et finit souvent par être lui-même l’instrument de puissances spirituelles.
Oui, alors, cette phrase pourrait se discuter. La spiritualité n'est pas non plus dépourvue d'échange que ce soit dans la confession, la prière, la pénitence ou le travail de vertu.
En revanche, oui, dans la spiritualité, il y a un lâcher prise sur l'issue qu'il n'y a pas dans l'ésotérisme où les choses sont plus "mécaniques", aspect qu'il faudra que j'évoque.
Après, et c'est pour ça que c'est complexe, il y a toutes les variations possibles concernant l'ésotérisme ou l'occultisme, tout le monde dans ce domaine n'a pas forcément les mêmes présupposés ou les mêmes façons de voir les choses.
La pensée magique est sous-tendue par un schéma dualiste, hérité du néo-platonisme, du catharisme, et qui se rapproche des philosophies orientales : l’âme serait une parcelle de divin victime d’une chute dans la matière, emprisonnée dans un corps, dont elle doit s’efforcer de se libérer.
Dans ce que je connais de l'énergétique, il n'y a pas de volonté de se détacher du corps, ou une reconnaissance que le corps serait mauvais intrinsèquement, mais plutôt, idée similaire au christianisme, que nous sommes entachés à tout niveau de fautes, de charges, qui nous obstruent le chemin vers plus haut/divin/saint que nous. Et que pour avancer, se libérer de tous ces fardeaux et avoir une vie équilibrée est le premier pas.
Ce chapitre se clôt sur un instructif tableau qui oppose les principaux généraux de l’ésotérisme aux fondamentaux de la religion révélée.
Je serais très intéressé de voir ce tableau, sachant que là encore, il est difficile de réduire tous les courants traitant de l'énergétique en un seul.
Sur les énergies, on revient sur le débat concernant leur nature, dont je ne conteste pas la difficulté.
L’auteur montre que la confusion savamment entretenue par certains ne repose sur aucune réalité concrète.
Cela n'a pas de réalité concrète, car cela a, à mon sens, une forme de présence intermédiaire entre le concret et le spirituel. En revanche, ce n'est pas parce que c'est ressenti que ce serait inventé, on n'invente pas ces sensations qui, parfois, nous bousculent. On peut discuter de leur nature et de ce qu'elles signifient, mais il suffit de demander à n'importe quelle personne un peu sensible sur ce plan pour constater que non, elle n'invente pas. C'est pour ça qu'on parle de "plans subtils", c'est à dire que ce sont des sensations fines, délicates, qui ne se laissent pas facilement saisir. Mais une fois qu'on les a reconnues et qu'on sait travailler avec, on peut faire des choses intéressantes.
Quant à l’efficacité des thérapies énergétiques, aujourd’hui si répandues, l’abbé Thibaut envisage successivement et rationnellement plusieurs hypothèses. Il pourrait s’agir d’une pure mystification, supercherie bien réussie : c’est la position ordinairement tenue par ceux qui tiennent pour postulat de départ l’inexistence du surnaturel. Dans une seconde hypothèse, le surnaturel pourrait n’être que du naturel non encore connu et expliqué : certains aimeraient voir dans la physique quantique une porte ouverte vers de nouveaux champs du savoir qui démultiplieraient les horizons de l’humanité – là encore le surnaturel se trouve finalement réduit à la mécanique. Une troisième hypothèse s’appuie sur l’existence de pouvoirs supposément insoupçonnés du cerveau humain, que nous n’utiliserions qu’à 10% de nos capacités, mais qui aurait la possibilité d’agir sur la matière (voyance, télépathie…). Le postulat de départ est contredit par les dernières avancées des sciences cognitives.(...) La quatrième hypothèse est celle de la communication avec un monde invisible, peuplé d’esprits, en lien avec notre univers par le biais d’une mystérieuse énergie.
Sur les quatre hypothèses, je suis globalement d'accord avec l'auteur, je penche pour ma part entre la seconde et la quatrième. On ne parle pas de quelque chose purement subjectif, mais on ne parle pas de quelque chose purement objectif, quelle lapalissade, me direz-vous ! Mais c'est la raison de la complexité de ce domaine.
Les pratiques qui visent à se relier à ces entités parallèles relèvent alors du préternaturel, car un tel fluide cosmique n’existe pas dans la nature.
Je ne sais pas ce que l'auteur ou l'abbé Roy signifie par là, parce que si, ces fluides existent bien indépendamment de nous, dans la nature. On disparaitrait, ces flux resteraient, ils nous dépassent.
L’auteur se rapproche de cette dernière hypothèse mais met en garde contre une tendance à tout « démonologiser, » à voir du magique ou du diabolique partout.
Je suis on ne peut plus d'accord et ne peux qu'enjoindre les lecteurs à faire leur cette recommandation !
L’imprégnation magique jusque chez les chrétiens
C’est sur ce dernier thème que l’ouvrage nous a paru particulièrement marquant : l’auteur analyse et dénonce avec force l’imprégnation de la pensée magique jusque dans les esprits des chrétiens. La confusion facile entre les maladies de l’âme et du corps, entre thérapie et conversion, entre développement personnel et accompagnement spirituel, est aujourd’hui bien présente dans les milieux catholiques, où les notions de délivrance et de guérison sont parfois employées sans un discernement suffisant, et viennent alimenter la dérive magique de nos contemporains.
C'est tout à fait vrai, mais cela vient pour au moins deux raisons :
1) La psychologisation majeure du monde aujourd'hui. L'ampleur de la psychologie permet de rendre chacun acteur de sa vie et considère que chaque fait a une cause consciente ou inconsciente. Et évidemment, dans l'inconscient, il faut inclure le champ énergétique.
2) En outre, la vision spirituelle catholique selon laquelle la mort est le produit du péché originel est analogue à la vision énergétique selon laquelle un problème de santé mentale ou physique correspond à une ou plusieurs charges sur un ou plusieurs de ces plans.
Ces deux causes conjuguées expliquent pourquoi, même chez les catholiques, on peut être intéressé par ces visions. Il y a des connexions logiques, des analogies, des parallèles faciles à faire.
En s’appuyant sur le texte biblique, l’auteur met en garde avec vigueur et appelle les chrétiens à la prudence.
Je suis évidemment d'accord et oui, on peut faire bien des bêtises à ce sujet qu'on n'aurait pas faites sans.
il semble considérer à priori les principes de la pensée magique (analogie et correspondance des parties de l’univers, action par contact des unes sur les autres…) comme mythiques et sans fondement dans le réel.
J'aimerais bien lire les extraits à ce sujet car cela me semble incompatible avec ce qu'il dit sur la 4e hypothèse citée plus haut. Ou alors, il faut définir "réel" et ce que l'on peut ressentir ne l'est pas forcément, à ce compte-là.
Saint Thomas d’Aquin insiste en effet après Aristote sur la nécessaire cohérence de l’ordre des effets avec l’ordre des causes : une cause ne peut produire quelque chose de supérieur à elle-même, ne peut agir au-dessus de son ordre.
Cet ordre des effets n’est pas perturbé avec l’énergétique. En revanche, oui, il y a une « correspondance » comme dans le monde spirituel. Quelqu’un qui commet un péché mortel a une marque spirituelle correspondante, et la confession lui permet de s’en départir. C’est pareil en énergétique, il y a une charge sur ce plan correspondant à une émotion, si on la fait partir, on obtient une facilité ensuite. Le principe de causalité n'est pas mis de côté dans l’énergétique. Elle n’est rien d’autre qu’un plan supplémentaire dont il faut tenir compte dans la réflexion.
St Thomas a évoqué l'influence des étoiles, et les ordres en question, si on les remplace par le mot "plans", on arrive à la vision énergétique contemporaine.
Ce que j'ai résumé sous le schéma ci-dessous :
Ce serait intéressant de réfléchir à intégrer le plan énergétique dans la logique thomiste, et on aurait, il me semble, des résultats compatibles avec la foi. Pour moi, la logique qui lie spirituel et dimension concrète est la même que celle qui s'applique au spirituel, l'énergétique et la dimension concrète. Les grandes lignes ne changent pas, les principes restent les mêmes, mais l'analyse se fait plus fine.