CHAPITRE VIII
Continuation du sujet précédent
Il est bien vrai qu'il faut souffrir beaucoup pour entrer dans cet heureux état du néant divin ; et parce que tous les efforts que la créature peut faire avec la grâce commune ne sont pas capables d'y introduire, Dieu, tout bon, vient Miséricordieusement au secours par ces peines qui sont extraordinaires, soit qu'elles le soient en elles-mêmes, soit qu'étant ordinaires, comme par exemple les maladies du corps, elles soient données d'une manière qui ne l'est pas.
Oh ! Que les hommes savent peu les bontés de notre Dieu très Miséricordieux ! L'on trouve sa conduite pleine de rigueur, lorsquelle est toute remplie de Miséricorde ineffable. Les hommes pécheurs, malades de la grande maladie du péché, ou gâtés par les taches qui en restent, ne peuvent ni se guérir, ni se laver parfaitement avec des remèdes ordinaires.
Que fait Dieu dans son excessive charité, cet unique médecin de nos âmes ! Il y met lui-même sa divine main ; et parce que le mal demande une application douloureuse des remèdes, nous crions et nous nous tourmentons, quand nous devrions baiser un million de fois amoureusement cette main divine, et fondre en actions de grâces de ce qu'elle s'applique à notre sanctification.
Grâce très particulière, qui demande des reconnaissances singulières ; car Dieu, tout bon, ne fait pas la grâce de ces croix extraordinaires à un chacun : c'est une faveur réservée pour les meilleurs amis. Hélas donc ! Qu'avons-nous à nous plaindre, s'il nous traite comme ses favoris ? Cependant, comme ces peines sont très rudes à la nature, sainte Thérèse assure que si l'âme les savait avant que de les souffrir, elle aurait de la peine à s'y résoudre : tant il est vrai que nos lâchetés sont grandes et nos misères excessives.
Il faut ici remarquer un certain abus de plusieurs, qui pensent être dans ces états surnaturels de peine, et qui n'y sont pas. Voici quelques marques que l'on donne de l'état passif des peines :
La première, si l'âme ne trouve et ne veut trouver aucun goût dans toutes les choses du monde, quoique tentée d'inclination, pour elles ; car c'est une marque qu'elle est unie à Dieu : autrement elle se laisserait aller à ses mouvements de nature.
La seconde, si elle a soin de n'offenser point Dieu, si elle craint le péché, puisque, si elle n'aimait point Dieu, elle ne se soucierait pas de pécher. La sécheresse qu'elle porte pour lors est une aridité, et non pas une tiédeur.
La troisième, si elle ne peu méditer comme elle faisait, mais se trouve arrêtée par une notice générale, et vue simple, sans distinguer rien en particulier.
La quatrième, si les personnes expérimentées assurent que son état de peines est passif. Au reste, il y a autant de différence entre ces peines et les autres qu'entre le jour et la nuit.Mais que faut-il faire dans ces états ? Adorer la divine volonté en la manière qu'on le peut, s'y abandonnant sans aucune réserve, sans retour ni sans réflexion, pour tous les tourments qu'il lui plaira nous envoyer.
Eviter un certain désir secret de sortir de ces peines, ce qui est opposé à un certain abandon ; aussi bien cela ne sert qu'à les augmenter, puisqu'elles sont données pour ôter toute imperfection, et par conséquent ce désir, qui en est une grande.
Lorsque la colère de Dieu se présente avec ses châtiments, il les faut recevoir avec joie, et à bras ouverts, et enfin tout ce qui arrivera de la part des hommes, des démons et furies de l'enfer.
Si vous manquez à adorer un seul des coups que la divine volonté a ordonnés, la colère de Dieu tombe sur vous, et augmente vos peines. C'est ce que disait aux démons une sainte âme, comme nous l'avons déjà remarqué.
Source : livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde