CHAPITRE VII
Des peines surnaturelles
Ajoutons encore ici les sentiments d'un auteur fort spirituel, qui, dans un livre qu'il a donné au public, parle de la sorte : Il semble à l'âme qu'elle est abandonnée de Dieu et délaissée au péché : elle ne sait si elle y consent ou non.
Les directeurs la rebutent ; on doute de son état, on la contredit. Quelquefois elle a encore quelque sentiment pour Dieu ; d'autres fois, point du tout.
Dieu quelquefois suspend les actes de la foi. Il semble à cette âme qu'elle se plait dans l'aversion de Dieu ; elle a horreur de ceux qui lui en parlent.
Dieu, dans certains états, lui retire ses peines, parce qu'elle se les approprie par une secrète approbation, et la met dans un état de bêtise.
En d'autres, il la tient comme suspendue sur un gibet entre la vie et la mort, la lumière et les ténèbres ; ou il la rebute, l'empêchant de rien faire pour lui, et permettant souvent ce qui semble contraire.
Enfin Dieu laisse quelquefois en des âmes bien aimées l'effet du péché, quoiqu'il leur en ait ôté les habitudes et les inclinations.
Il y a des âmes, dit encore le P. Surin, en son Catéchisme spirituel, qui se trouvent si avant dans la peine, dans l'expérience du mal, et même dans le sentiment des vices, sans pourtant y donner aucun consentement, qu'il leur semble qu'au dedans et au dehors les eaux les environnent.
On a vu une personne, dans une innocence admirable, et d'une sainteté prodigieuse, qui portait la malignité, les sentiments et les effets du péché, à savoir de l'orgueil, de l'ambition, de l'avarice, de l'impureté et de la colère.
Quand elle portait les sentiments de l'orgueil, elle était tout en fureur. Lorsqu'elle portait les sentiments de l'avarice, il lui semblait qu'elle eût voulu avoir les biens de tout le monde.
Quand elle avait les sentiments de l'impureté, son imagination était remplie de choses abominables. Elle portait ainsi les dispositions des pécheurs et la malédiction due au péché.
La frayeur, la crainte, l'ennui et la tristesse qui sont les apparences du péché, la suivaient partout. Dieu avait commandé à toutes ses créatures de la traiter en rigueur.
Elle se trouva, à ce qu'il lui semblait, dans un entier dénuement de toute espérance du salut pour l'avenir, ni de sortir jamais de l'état où elle était ; dans un entier dégoût de toutes les choses qui s'étaient passées en elle, sans aucune correspondance, ni avec le ciel, ni avec la terre, ni avec le Créateur, ni avec les créatures ; et la sainte Mère de Dieu lui fit connaître que c'était la mort qui était plantée en son cœur, qui y était vivante et répugnante, et qu'elle en avait pris une entière possession.
Notre-Seigneur avait fermé la porte à toutes consolations humaines et divines, et l'avait ouverte à toutes désolations. Elle sentait la peine du désespoir, qui lui ôtait la foi et l'espérance ; c'est-à-dire qu'elle n'en avait aucune connaissance ; car les ténèbres sont si épaisses et si horribles que l'on ne sait où l'on est, et s'il y a une Église, une religion, une foi, un Dieu.
Source : livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde