Bonjour vistemboir2,

Dans tous les domaines, il convient de distinguer entre le temps court, le temps moyen et le temps long.

Dans cet ordre d'idées, et si l'on considère le Magistère et la pastorale qui sont à l'oeuvre depuis le déroulement du pontificat du premier pape du Concile, à savoir Jean XXIII, on est en droit de se dire que les papes du Concile et de l'après-Concile sont convaincus que c'est la conciliation avec la conception mondialiste ou onusienne de la paix, sinon la conformation intégrale à cette conception, qui est en mesure de maintenir en vie un optimum de légitimité, culturellement et sociétalement correcte, pour la religion et les religions, aux yeux des citoyens et des dirigeants non croyants ou peu croyants du monde entier, dans un monde contemporain dans lequel la sécularisation fonctionne à la marginalisation de presque toutes les religions.

Il y a quelques années, il y a eu un discours du cardinal Tauran, en Jordanie, au cours duquel celui-ci a parlé des principes du dialogue interreligieux, tels qu'ils ont été définis dans Pacem in terris par Jean XXIII. Or, une chose est sûre : les quatre points cardinaux de Pacem in terris ne figurent pas du tout dans ce texte, d'une manière prépondérante et prioritaire, sous l'angle programmatique, en tant que principes du dialogue interreligieux...

Vous comprenez sûrement ce qui est suggéré ici-même : nous sommes en présence de clercs qui s'intéressent moins aux traditions religieuses non chrétiennes pour elles-mêmes qu'au potentiel de mobilisation de ces traditions religieuses au service d'une conception de l'homme, du monde et de la paix qui n'est pas d'inspiration catholique missionnaire ad extra et orthodoxe ad intra, ni même d'inspiration chrétienne, mais qui est d'inspiration panchristique et postmoderne, pour ne pas dire immanentiste et inclusiviste, ou, en tout cas, "pleromiste" et pluraliste.

En fait, nous sommes en présence d'une pastorale ad extra "apophatique", dans le cadre de laquelle on parle plus fréquemment et volontiers de l'Homme et de la paix que de Dieu Père, Fils, Esprit, en tant que seul vrai Dieu, et de la foi en Lui, si bien que cette pastorale ad extra est également "apostasique", notamment parce qu'elle impose un relatif silence à la distinction évangélique, mais certes pas "évangéliquement correcte" !, entre la paix qui vient du monde et la paix qui vient du Christ.

Par ailleurs, les théologiens, futurs inspirateurs du Concile, mais aussi de Jean-Paul II et de Benoît XVI (parmi d'autres inspirateurs de ces deux papes), qui ont travaillé sur les questions situées au croisement entre l'anthropologie et la pneumatologie, pensons ici à de Lubac et à Rahner, semblent avoir eu une vision presque unilatérale des choses, ou semblent avoir peu développé une théologie fondamentale propice à une distinction, claire et ferme, entre la vérididicité de la religion chrétienne et "l'erronéité" des religions non chrétiennes, la question du caractère erroné des religions non chrétiennes ne se posant évidemment pas dans les mêmes termes pour toutes les religions non chrétiennes.

Quand on accorde plus d'importance à la distinction entre l'unité et les divisions qu'à la distinction entre la vérité et les erreurs, on en arrive à la Magistère et à la pastorale dont François est peut-être l'aggravateur, mais dont il est surtout le continuateur.

Bonne journée.

Scrutator.

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