Ma traduction de l'espagnol d'un article publié sur Caminante Wanderer (je n'ai omis que quelques très brefs passages contenant des allusions difficilement compréhensibles si l'on n'a pas les références).

Le clergé conservateur et ses ennemis

Jeudi dernier, jour de l’Ascension du Seigneur, je me suis rendu à la messe comme l’a certainement fait une bonne part des lecteurs de ce blogue. Dans mon cas, il s’agissait d’une messe solennelle – avec diacre, sous-diacre, clercs et une chorale qui a chanté la totalité du propre – dans une église de la FSSPX. Lorsque je me rends à de telles célébrations, je me demande inévitablement comment il a été possible que l’Église renonce à un semblable trésor, et n’ait pas été capable de reconnaître son erreur et d’y remédier, mais, pire encore, qu’elle persécute avec rage et cruauté les prêtres et les fidèles qui préfèrent le rite traditionnel. […]

Ce sont là des thèmes qui ont été traités une multitude de fois, et il n’est pas utile d’y revenir. Mais ce qui m’étonne personnellement le plus, c’est qu’en Argentine, les ennemis les plus acharnés de la messe traditionnelle, qu’elle soit célébrée par des prêtres « en pleine communion » ou par des prêtres de la FSSPX, soient certains des prêtres qui se perçoivent eux-mêmes comme conservateurs. Ces derniers temps, surtout, un groupe qu’ils ont formé s’est lancé dans une campagne de dénigrement et d’anathèmes, parcourant les villes où il y a des maisons de la Fraternité, afin d’empêcher les fidèles de se rapprocher des terribles lefebvristes (lefes), êtres extrêmement dangereux et venimeux. Aujourd’hui des prêtres qui dans les années 70 n’ont pas craint de dénoncer aux évêques progressistes leurs amis d’enfance qui avaient commencé à assister à la messe traditionnelle, maintenant âgés de plus de soixante-dix ans et confrontés à leur échec cinglant, continuent à s’acharner à réclamer une obéissance servile et la « pleine communion » avec une hiérarchie qui depuis des décennies a abandonné la communion de la foi catholique. Il n’est pas nécessaire de donner des exemples, mais on peut parcourir l’homélie qu’a donnée l’ineffable Tucho Fernandez, archevêque de La Plata, candidat au siège primatial d’Argentine et enfant chéri du pape François, à l’occasion du Te Deum du 25 mai. Ces curés conservateurs préfèrent que les fidèles soient en « pleine communion » avec des personnages pathétiques de cet acabit, qui ne sont en aucun cas catholiques, plutôt qu’ils aillent à la messe que l’Église a célébrée pendant presque deux millénaires, célébrée par des prêtres validement ordonnés qui, s’ils ne sont pas en « pleine communion » avec les évêques diocésains, le sont en revanche avec la pléiade d’évêques et de saints qui nous ont précédés pendant deux mille ans d’histoire.

Il ne s’agit pas ici de défendre la FSSPX (elle sait très bien se défendre toute seule). J’ai plusieurs désaccords avec elle, mais des désaccords ont toujours existé entre les divers groupes de l’Église, même si tous se rejoignaient sur les principes fondamentaux. Et c’est mon cas. Il s’agit, en revanche, de souligner l’évidence incohérence de nombreux prêtres conservateurs et leur refus de voir la réalité telle qu’elle est.

Ils ont cru qu’il suffisait de porter la soutane, de refuser les guitares pendant la messe, de chanter de temps à autre le Kyrie ou le Sanctus De Angelis ; qu’en donnant à lire aux séminaristes un peu de saint Thomas et de sainte Thérèse de Jésus, la « bonne doctrine » était assurée. Mais lorsqu’il a fallu prendre parti, ils se sont blottis sous l’obéissance à l’évêque et aux convenances politiques. Je fais référence, concrètement, à l’attitude servile qu’a adoptée une bonne majorité de prêtres conservateurs pendant l’incompréhensible confinement de 2020 et 2021, auquel les évêques se sont pliés avec une effarante docilité. Ces prêtres ont cessé de célébrer la messe, et, plus tard, ont cessé de distribuer la communion dans la bouche. Personne ne pouvait s’étonner que les prêtres progressistes ou les plus médiocres agissent de la sorte ; il était même compréhensible que se comportent ainsi des prêtres seuls ou isolés dans leur diocèse, dépourvus d’appui de la part de leurs collègues et livrés au pouvoir implacable de l’évêque. Mais c’est un sujet d’indignation que la chose ait pu se produire dans un diocèse avec une majorité de prêtres conservateurs, qui même face à l’évidence d’être sous l’autorité d’un évêque non seulement cruel, mais aussi et surtout dérangé, se sont conformés docilement à ses ordres et n’ont pas hésité à laisser sur le bord du chemin des prêtres qu’ils avaient eux-mêmes formés et qui avaient décidé de rester fidèles aux principes qu’ils avaient reçus de ces conservateurs accommodants. […]

Mais ce qui est encore plus scandaleux, c’est que ces mêmes prêtres et leurs chefs qui croient posséder quelque autorité se vouent à parcourir des diocèses étrangers, organisant des réunions et des rencontres avec des fidèles pieux et désireux d’être de bons catholiques, pour les prévenir qu’ils ne doivent en aucune manière se rapprocher de la messe traditionnelle, et encore moins si elle est célébrée par des prêtres de la FSSPX. Telle est l’unique réaction qui leur vient face à leur échec, et face à l’effroi que leur inspire le fait que sur leurs propres territoires – physiques ou moraux – les lieux où est célébrée la messe traditionnelle ont multiplié par quatre la quantité de leurs fidèles, tandis que les leurs ont connu dans certains cas une diminution dans des proportions semblables.

Rester au milieu et se tenir tranquilles. Telle est la maxime qu’ils ont adoptée et face à l’évidente apostasie de la hiérarchie catholique – au moins en Argentine – ils continuent à se poser en grands conciliateurs, et, pire encore, à anesthésier le sens commun et le flair catholique des fidèles.

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