DEUXIÈME PARTIE
LA MORT ET LE JUGEMENT
LA MORT DANS L'IMPÉNITENCE
On peut mourir en état de péché mortel, sans que la pensée d'une telle mort se soit présentée à l'esprit. Ainsi bien des hommes meurent subitement, qui ne se sont jamais repenti des péchés graves qu'ils avaient commis ; on dit qu'après avoir abusé de bien des grâces, ils ont été surpris par la mort ; ils n'avaient pas tenu compte des avertissements reçus. Ils n'ont jamais eu la contrition ni même l'attrition qui avec le sacrement de pénitence les aurait justifiés. Ces âmes sont perdues pour l'éternité. Il y a eu impénitence finale sans le refus spécial et préalable de se convertir au dernier moment.
Si au contraire il y a eu ce refus spécial, c'est l'impénitence finale, acceptée, voulue par le rejet dernier de la grâce offerte, avant la mort, par l'infinie miséricorde. C'est un péché contre le Saint-Esprit qui prend différentes formes : le pécheur recule devant l'humiliation de l'aveu de ses fautes et préfère par suite son malheur personnel, ou il va parfois jusqu'à mépriser explicitement son devoir de justice ou de réparation envers Dieu, en lui refusant l'amour qui lui est dû par le précepte suprême : « Tu aimeras le Seigneur, ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme, de toutes tes forces, de tout ton esprit». Luc, X, 27. Ces terribles leçons nous montrent la nécessité du repentir, si différent du remords qui subsiste en enfer sans la moindre attrition.
Les damnés ne se repentent pas de leurs péchés comme faute et offense à Dieu, mais ils voient que c'est à cause d'eux qu'ils sont punis, ils voudraient ne pas souffrir de la peine qui leur est justement infligée, et un ver les ronge, le remords qui naît de la pourriture du péché qu'ils ne peuvent pas ne pas voir et qui les rend mécontents de tout et d'eux-mêmes. Judas a eu le remords, qui laisse dans l'angoisse, mais il n'a pas eu le repentir, qui donne la paix ; il est tombé dans le désespoir au lieu de se confier à l'infinie Miséricorde en demandant pardon Cf. SAINT THOMAS, IIa, IIae, q. 13, a. 4, IIIa, q. 86, a. I. - C. GENTES, 1. IV, c. 89..
Il est donc terriblement dangereux de remettre sa conversion toujours à plus tard . Le Père Monsabré Retraites pascales à Notre-Dame, 1888, 3e instruction à ce sujet dit en substance : « Suprême leçon de prévoyance : 1° Pour profiter de la dernière heure, il faut savoir la reconnaître ; or tout conspire souvent à la dissimuler au pécheur quand il y arrive : ses propres illusions, la lâcheté, la négligence, le manque de sincérité de ceux qui l'entourent. 2° Pour profiter de la dernière heure, si on la sent venir, il faut vouloir se convertir ; or il est grandement à craindre que le pécheur ne le veuille pas.
La tyrannie de l'habitude donne aux derniers vouloirs le cachet de l'irrésolution. Les délais calculés du pécheur ont altéré sa foi et l'ont aveuglé sur son état. D'où il suit que sa dernière heure approche sans qu'il s'en émeuve, et que, dans le fait, il meurt impénitent. 3° Pour profiter de la dernière heure, si l'on veut se convertir, il faut que la conversion soit vraie, et pour cela il faut la grâce efficace.
Or le pécheur retardataire ne tient pas compte de la grâce dans ses calculs, mais seulement de sa volonté. S'il compte sur la grâce, il fait tout ce qu'il peut pour l'écarter de son dernier moment, en spéculant lâchement sur la Miséricorde de Dieu. Et alors arrivera-t-il au véritable regret de l'offense faite à Dieu, à un vrai et généreux repentir. Le pécheur attardé ne sait plus ce que c'est que la pénitence, il court grand risque de mourir dans son péché.
D'où la conclusion : s'assurer dès maintenant le bénéfice d'une vraie pénitence, pour n'avoir pas à craindre de la manquer quand elle devra décider de notre éternité ». N'oublions pas que l'attrition, qui dispose à bien recevoir le sacrement de pénitence et qui justifie avec lui, doit être surnaturelle.
Selon le Concile de Trente, elle suppose la grâce de la foi, celle de l'espérance, et elle doit détester le Péché comme offense à Dieu, (Dens. 798). Or cela suppose probablement comme le baptême des adultes un amour initial de Dieu, comme source de toute justice (Dens. 798). On ne peut en effet détester le mensonge sans aimer la vérité, ni détester l'injustice sans commencer à aimer la justice et Celui qui est source de toute justice.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde