CHAPITRE II
Article II - LE PRIVILÈGE DE L'IMMACULÉE CONCEPTION
Raisons théologiques du privilège de l'Immaculée Conception
La principale raison de convenance de ce privilège est le développement de celle que donnait avec beaucoup d'autres saint Thomas pour montrer la convenance de la sanctification de Marie dans le sein de sa mère avant sa naissance (IIIa, q. 27, a. 1) : « Il faut raisonnablement croire que celle qui devait enfanter le Fils unique de Dieu, plein de grâce et de vérité, a reçu plus que, toute autre personne les plus grands privilèges de grâce. Si donc Jérémie et saint Jean Baptiste ont été sanctifiés avant leur naissance, il faut croire raisonnablement qu'il en a été de même pour Marie. » Saint Thomas dit aussi ibid., a. 5 : « Plus on approche de la source de toute grâce, plus on reçoit d'elle ; or Marie a approché plus que personne du principe de la grâce qu'est le Chris. »
Mais il fallait développer cette raison de convenance pour arriver jusqu'au privilège dont nous parlons.
C'est le mérite de Scot (les thomistes doivent tenir à honneur de reconnaître que leur adversaire sur ce point a vu juste) d'avoir bien mis en lumière la haute convenance de ce privilège en répondant à cette difficulté formulée par plusieurs théologiens et par saint Thomas : Le Christ est le rédempteur universel de tous les hommes sans exception (Rom., III, 23; V, 12, 19; Gal., III, 22; II Cor., V, 14; I Tim., II, 16). Or si Marie n'a pas contracté le péché originel, elle n'en a pas été libérée par le Christ. Elle n'a donc pas été rachetée par lui.
A cette difficulté, Duns Scot répond par l'idée de la rédemption non pas libératrice, mais préservatrice ; il en montre toute la convenance, et il le fait, au moins en certains endroits, sans allusion à son opinion spéciale sur le motif de l'Incarnation, et de telle façon que cette haute raison de convenance peut être admise indépendamment de cette opinion.
Cette raison est la suivante : Il convient que le Rédempteur parfait exerce une rédemption souveraine au moins à l'égard de la personne de sa Mère qui doit lui être associée plus intimement qu'aucune autre dans l'œuvre du rachat de l'humanité.
Or la rédemption souveraine n'est pas seulement libératrice du péché déjà contracté, mais préservatrice de toute souillure, comme celui qui préserve quelqu'un d'un coup mortel est plus encore son sauveur que s'il le guérissait de la blessure faite par ce coup. Donc il convient hautement que le Rédempteur parfait ait, par ses mérites, préservé sa Mère du péché originel et aussi de toute faute actuelle.
L'argument avait été auparavant ébauché par Eadmer[73], il a manifestement des racines profondes dans la Tradition.
Cette raison de convenance est indiquée d'une certaine façon dans la bulle Ineffabilis Deus avec quelques autres. Il y est dit que l'honneur des parents comme leur déshonneur rejaillit sur leurs enfants, et il ne convenait pas que le Rédempteur parfait eut une Mère qui ait été conçue dans le péché.
De plus, comme le Verbe procède éternellement d'un Père très saint, il convenait qu'il naquit sur terre d'une Mère qui n'ait jamais manqué de la splendeur de la sainteté.
Enfin, pour que Marie puisse réparer la chute d'Eve, vaincre les artifices du démon et donner à tous, avec le Christ, par Lui et en Lui, la vie surnaturelle, il convenait qu'elle-même n'ait jamais été dans l'état de déchéance, dans la servitude du péché et du démon.
Si l'on objecte que seul le Christ est immaculé, il est facile de répondre : seul le Christ l'est par lui-même et au double titre de l'union hypostatique et de sa conception virginale, Marie l'est par les mérites de son Fils.
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde