CHAPITRE II
Article II - LE PRIVILÈGE DE L'IMMACULÉE CONCEPTION
La définition dogmatique
Ce point de doctrine était déjà affirmé par la liturgie dans l'oraison propre de la fête de l'Immaculée Conception, qui fut approuvée par Sixte IV (1476) et où il est dit : « Ex morte ejusdem Filii tui praevisa, eam (Mariam) ab omni labe praeservasti. » La Sainte Vierge a été préservée du péché originel par la mort future de son Fils, c'est-à-dire par les mérites de Jésus mourant pour nous sur la croix.
On voit dès lors que cette préservation de Marie diffère beaucoup de celle du Sauveur lui-même, car Jésus ne fut nullement racheté par les mérites d'un autre, ni par les siens ; il a été préservé du péché originel et de tout péché, à un double titre : premièrement par l'union personnelle ou hypostatique de son humanité au Verbe, à l'instant même où sa sainte âme a été créée, car aucun péché soit originel soit actuel ou personnel ne peut être attribué au Verbe fait chair ; et secondement de par sa conception virginale, due à l'opération du Saint-Esprit, Jésus ne descend pas d'Adam par voie de génération naturelle. Cela n'appartient qu'à lui seul.
3° La définition du dogme de l'Immaculée Conception propose cette doctrine comme révélée, et donc comme contenue au moins implicitement dans le dépôt de la Révélation, c'est-à-dire dans l'Ecriture et la Tradition, ou dans l'une de ces deux sources.
Le témoignage de l'Ecriture
La bulle Ineffabilis Deus cite deux textes de l'Ecriture : Gen., III, 15 et Luc, I, 28, 42.
Dans la Genèse ce privilège est implicitement ou confusément révélé comme en germe dans ces paroles de Dieu adressées au serpent, figure du démon (Gen., III, 15) : « Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre ta postérité et sa postérité ; celle-ci t'écrasera la tête et tu la mordras au talon. » Celle-ci, c'est-à-dire la postérité de la femme, car dans le texte hébreu, le pronom est masculin et désigne les descendants de la femme ; de même dans les Septante et la version syriaque.
La Vulgate a mis ipsa, qui se rapporte à la femme elle-même. Le sens d'ailleurs n'est pas essentiellement différent, car la femme sera associée à la victoire de celui qui représentera éminemment sa postérité en lutte avec le démon au cours des âges.
Par elles-mêmes ces paroles ne suffisent certainement pas à prouver que le privilège de l'Immaculée Conception est révélé, mais les Pères, dans leur comparaison d'Eve et Marie, y ont vu une allusion à cette grâce, c'est à ce titre que Pie IX cite cette promesse.
Une exégèse naturaliste ne voit dans ces paroles que l'expression de la répulsion instinctive qu'éprouve l'homme pour le serpent. Mais la tradition juive et chrétienne y voit beaucoup plus. La tradition chrétienne a vu dans cette promesse, qui a été appelée le protévangile, le premier trait qui sert à désigner le Messie et sa victoire sur l'esprit du mal. Jésus représente en effet éminemment la postérité de la femme, en lutte avec la postérité du serpent.
Mais si Jésus est ainsi appelé, ce n'est pas à raison du lien lointain qui l'unit à Eve, car celle-ci n'a pu transmettre à ses descendants qu'une nature déchue, blessée, privée de la vie divine ; c'est bien plutôt à raison du lien qui l'unit à Marie, dans le sein de laquelle il a pris une humanité sans tache.
Comme le dit le P. X.-M. Le Bachelet, art. cit., col. 118 : « On ne trouve pas dans la maternité d'Eve le principe de cette inimitié que Dieu mettra entre la race de la femme et la race du serpent ; car Eve est elle-même tombée comme Adam, victime du serpent. Ce principe d'inimitié ne se trouve qu'en Marie, mère du Rédempteur. Donc dans ce protévangile, la personnalité de Marie, encore que voilée, est présente, et la leçon de la Vulgate, ipsa, traduit une conséquence, qui se dégage réellement du texte sacré, car la victoire du Rédempteur est moralement, mais réellement la victoire de sa Mère. »
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous bénisse
ami de la Miséricorde