Je crains de ne pas pouvoir vous suivre. Même dans ce que vous appelez l'ordre surnaturel, Dieu se sert des causes secondes. Ordre naturel, ordre surnaturel: cela ne suffisait pas ! Il faut que vous y rajoutiez un domaine mixte, comme si cela n'était pas assez compliqué. Il me semblait que le domaine mixte regardait l'ordre des relations entre l'Eglise et l'Etat.

La réalité, qu'elle soit naturelle ou surnaturelle, ne se laisse pas réduire à ce genre de grilles de lecture. Si ordre il y a, c'est celui voulu par Dieu, l'ordre exigé par la justice, l'ordre qui sous-tend la réalité du pouvoir et l'ordre des causes (immanente, finale, notamment). Je serais tenté de dire qu'il n'y a qu'un seul ordre.

Il conviendrait en ce domaine de faire référence à saint Thomas d'Aquin:

Dieu permet le péché et cette permission du péché entrait dans le dessein de la Providence (O Felix Culpa). Quant aux peines qui en découlent, celles-ci ne sont voulues par Dieu qu'indirectement, "per accidens", en vue d'un bien (Ia, q.19, a.9) car Dieu veut avant tout un ordre, celui de la justice, lequel ordre inclut la peine du péché:

"Deus est auctor mali poenae" (Ia, q.48, a.6)


La peine due au péché est évidemment un mal, mais elle est un bien, si on remet cette peine dans la perspective des fins dernières.

Les maux de la nature (malum naturalis defectus), ils sont voulus eux aussi indirectement par Dieu. "C'est pour la perfection de l'univers que Dieu a voulu ces corruptions sans lesquelles il n'y aurait pas de générations".

C'est pourquoi lorsque Dieu permet les persécutions des tyrans - il y a plus de tyrans qu'on ne le croit dès lors qu'on définit, comme saint Thomas, le tyran comme le dirigeant qui ne gouverne pas en vue du bien commun mais en vue de son intérêt propre - il veut, il recherche, la patience (vertu de force) des justes et des martyrs. Lorsque Dieu tolère chez les individus certaines fautes, c'est pour en éviter de plus graves; n'oublions pas ce mot de saint Paul: "Dieu fait tout concourir au bien de ceux qui l'aiment" (Romains, 8, 28).

En vous remerciant pour votre patience, je m'en vais vaquer à d'autres occupations...

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