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Paris - Enterrements le dimanche : un projet qui fait débat
par Bernard Joustrate 2019-04-30 13:11:46
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Pour arranger les familles, Paris souhaite faciliter les inhumations le dimanche. Le projet suscite la colère de nombre de professionnels du funéraire. Par Pauline Ducousso
Publié le 29/04/2019 | Le Point.fr

Pourra-t-on se faire enterrer le dimanche à Paris ? Aujourd'hui exceptionnelles (seules 171 dérogations ont été accordées dans la capitale pour plus de 5 000 demandes d'enterrement le dimanche et les jours fériés), les inhumations dominicales devraient être autorisées dans tous les cimetières parisiens d'ici à fin 2019.

Pour être enterré ce jour-là, la loi, sans l'interdire, exige l'obtention d'une dérogation préfectorale. Pénélope Komitès, adjointe à la maire de Paris chargée des espaces verts et des affaires funéraires, souhaite « renforcer le service rendu aux familles des défunts », en leur permettant de pouvoir inhumer leurs proches tous les jours de la semaine. Pour l'élue, il s'agit de satisfaire une demande : « Cette extension du service public répond aux attentes manifestées par de nombreuses familles. De plus en plus dispersées sur tout le territoire français ou à l'étranger, et soumises à des délais d'inhumations courts, elles peinent à se rassembler en semaine. »

Hostilité
Mais ce projet datant de février a réveillé la colère de près de 45 agents administratifs des cimetières parisiens, en grève début mars. Ils seront contraints d'assurer en alternance une permanence le week-end. Un projet qualifié d'« injuste » par Thierry Lasne, fossoyeur au cimetière de Pantin et délégué CGT. « Nous, agents administratifs du funéraire, refusons entièrement cette application. La mairie prévoit d'imposer des astreintes obligatoires le dimanche en ne prévenant le personnel du funéraire que tardivement le samedi. Cette mesure est dramatique puisqu'elle nous interdit d'avoir une vie de famille le dimanche et nous empêche d'organiser un week-end de vacances », déplore-t-il.

Même si la mairie prévoit le recrutement de 17 agents administratifs et d'accueil, en plus d'une cinquantaine déjà présents, Thierry Lasne dénonce une surcharge de travail qui pèsera sur d'autres professionnels du funéraire. « Aussi, le personnel d'accueil devra assurer la surveillance des cimetières le dimanche. Les agents d'entretien technique, les marbriers, eux aussi, seront mis à contribution. »

Autre point de friction : la rétribution des heures supplémentaires. Pour la cinquantaine d'agents concernés, Pénélope Komitès garantit que « les astreintes, toutes les 5 à 6 semaines, seront rémunérées entre 170 et 300 euros pour 4 heures de travail le dimanche ». Le porte-parole du personnel du funéraire accuse la maire de « ne pas prendre en compte les retenues salariales ». « Les heures supplémentaires ne seront pas défiscalisées et un risque de changement de tranche d'imposition pèsera sur ces agents », peste-t-il.

Pour le moment, aucun consensus n'a été trouvé. Thierry Lasne demande à être reçu au plus vite par la maire. « Si Madame Komitès n'est pas honnête et n'accepte pas notre demande de rencontre, les agents du funéraire appelleront peut-être à une nouvelle mobilisation », menace-t-il. Tout en redoutant « un passage en force » de la mairie de Paris en juin lors du Conseil de Paris. Il s'agirait alors, selon Thierry Lasne, d'une « stratégie pour conserver son électorat favorisant sa réélection en 2020 ».

Des revendications soutenues par les catholiques

Dans la religion catholique et pour des raisons liturgiques, les obsèques n'ont traditionnellement pas lieu le dernier jour de la semaine (sic). « Le dimanche est le jour des célébrations eucharistiques comme la messe. De même qu'aucune sépulture n'est organisée le vendredi de la semaine sainte ou les jours fériés », indique Christian de Cacqueray, fondateur du Service catholique des funérailles (SCF) à Paris. Inquiet au sujet du projet de la mairie, il assure que le respect du jour universel de repos, le dimanche, est extrêmement sain pour tout employé du funéraire. « Ce métier demande de ménager les familles et les employés. La véritable épreuve, qui est celle de soutenir les proches du défunt durement touchés par le deuil, est une forme de « souffrance professionnelle ». Se replonger dans sa vie personnelle une fois par semaine constitue un temps de respiration essentiel pour reconstituer ses forces physiques et morales. Nous ne sommes pas des machines, nous donnons de l'humain », plaide-t-il.

Si, en vingt ans d'exercice, Christian de Cacqueray assure n'avoir jamais connu de demande d'inhumations le dimanche, d'autres acteurs du funéraire évoquent un procédé occasionnel. Les demandes de dérogations viennent plus souvent des communautés juives et musulmanes puisque les délais d'enterrement sont beaucoup plus courts. Alors que dans la religion catholique, l'inhumation doit être effectuée dans les 24 heures au moins ou 6 jours ouvrables au plus après le décès, il est de coutume d'enterrer les morts dans les 24 heures du décès dans la tradition juive, et sous 48 heures chez les musulmans.

Alain Gold, gérant Pompes funèbres israélites du 11e arrondissement de Paris, certifie que la réforme sur les obsèques dominicales satisfera surtout les demandes des familles juives endeuillées, souhaitant inhumer au plus vite. Aux Pompes funèbres israélites, il reçoit des requêtes quasiment tous les dimanches. Celles-ci sont refusées puisque le cimetière est fermé ce jour-là. Mais la mairie accorde « trois ou quatre exceptions par an en cas de fête juive ou musulmane le vendredi ». Alain Gold n'est pas opposé au projet puisque chaque entreprise de pompes funèbres sera libre de décider de l'organisation de sa propre politique. « Dans notre entreprise, tous les employés qui travailleront le dimanche seront volontaires et toucheront une prime. Cette réforme bouleversera simplement les habitudes. De plus, les familles seront contraintes de payer des surcoûts. Mais celles-ci sont prêtes à le faire pour des raisons religieuses. »

« Si le projet est approuvé, les opérateurs funéraires s'y plieront »
Nadhir Chaoui, gérant des Pompes funèbres musulmanes El Chahada à Nanterre, est du même avis. L'autorisation d'inhumation le dimanche ne pose aucune difficulté au niveau professionnel. « Il suffira simplement de réadapter les plannings, organiser les astreintes et trouver des arrangements », informe-t-il. Avant d'ajouter que « cette réforme soulagerait beaucoup de familles sur les plans humain et sentimental, et leur permettrait d'enterrer leur proche plus sereinement ». En revanche, Nadhir Chaoui reste sceptique sur la question du travail des infirmiers des chambres mortuaires le dimanche. « J'ignore si les hôpitaux accepteront d'ouvrir les chambres mortuaires le dimanche pour la préparation du corps des défunts. »

Si la question se pose pour certains établissements, la chambre mortuaire de l'Hôpital universitaire Robert-Debré (19e arrondissement) est déjà ouverte du lundi au dimanche. « L'accueil des familles souhaitant se recueillir le week-end ne pose aucun problème. Il arrive même que certaines demandent quelques soins ou un habillage la veille d'un départ d'obsèques le lundi », renseigne Makram Labidi, agent de la chambre mortuaire à l'Hôpital Robert-Debré. Ce que confirme Richard Feret, directeur général délégué de la Confédération des professionnels du funéraire et de la marbrerie (CPFM) : « Un certain nombre d'opérations mortuaires sont déjà effectuées le dimanche, comme l'accueil des familles, le transport des corps à la chambre mortuaire et les soins de conservation. » Ni pour ni contre le projet porté par la mairie, il reste serein et fait valoir la convention collective prévoyant une majoration des salaires pour le travail du dimanche. « Si le projet est approuvé, les opérateurs funéraires s'y plieront », lâche-t-il.

La commune de Sarcelles a une longueur d'avance. Chaque mairie ayant le loisir d'adapter son service funéraire, celle de Sarcelles accepte l'organisation d'inhumations les week-ends et les jours fériés depuis 1997. « La ville de Sarcelles a mis en place un service d'astreintes tous les dimanches. Celles-ci ne sont sollicitées qu'en cas de besoin soudain, si le décès survient le samedi par exemple. Aussi, les permanences de gardiennage du cimetière sont assurées tous les jours de la semaine », confirme Sandra Ruisi, adjointe au directeur du service de la population. Si les demandes ne sont pas fréquentes, la mairie de Sarcelles recense une à deux inhumations dominicales par mois, principalement de familles juives.

     

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