CINQUIÈME DEGRÉ
25. C'était ainsi que ces généreux pénitents rappelaient à leur mémoire les sentiments qu'ils éprouvaient dans le temps qu'ils marchaient dans les voies de la vertu et de la perfection; et, semblables à de petit enfants qui ont perdu ce qu'ils chérissaient éperdument, ils étaient inondés de larmes, et faisaient entendre des cris capables de fendre le coeur.
"Où est, s'écriaient-ils, cette admirable pureté qui ornait nos prières ? Que sont devenues cette tendresse et cette confiance que nous avions en Dieu, en Lui présentant nos voeux ? Où sont à présent, ces larmes si douces que nous répandions avec tant d'abondance ? Hélas, elles se sont changées en des larmes bien amères.
Qu'est devenue cette belle espérance que nous avions de voir nos corps dans une chasteté parfaite, nos consciences dans une pureté céleste, et nos coeurs dans une tranquillité inaltérable ? Où trouver cette confiance si rassurante que nous avions en notre directeur ? Que sont devenues la vertu et l'efficacité de ses prières pour nous ? Ah, tous ces riches avantages sont comme si nous n'en avions jamais joui, et qu'ils n'eussent jamais existé; car ils sont dispersés, perdus, détruits et anéantis."
26. C'était ainsi, et en répandant une grande abondance de larmes, qu'ils exprimaient le regret d'avoir dissipé de si grandes richesses spirituelles, et, dans l'abîme profond de leur désolation, les uns souhaitaient avec une incroyable ardeur, d'être possédés par le plus méchant des démons, afin de souffrir davantage; les autres demandaient à Dieu avec instance de les frapper de la honteuse et humiliante épilepsie; les autres désiraient de devenir entièrement aveugles et d'être changés en des monstres affreux, capables de faire horreur aux hommes et de leur servir de spectacle, d'autres auraient voulu perdre l'usage de leurs nerfs et de leurs muscles, et être frappés d'une paralysie universelle; et les uns et les autres s'estimaient trop heureux, si, en souffrant tous ces maux, ils pouvaient éviter les supplices éternels.
Quant à moi, mes chers amis, je vous avoue que je ne peux vous rendre raison des motifs qui me faisaient demeurer avec plaisir dans cette maison de tristesse et de pleurs; mais j'y étais si satisfait et si content, que je ne pensais plus à moi, et si ravi d'étonnement, que je n'étais plus maître ni de mes pensées ni de mes sentiments. Mais revenons à notre sujet.
27. Après être demeuré un mois dans le monastère de la Prison, comme, à cause de mon indignité, on ne devait pas m'y supporter, je retournai au grand monastère, et j'allai trouver le saint abbé qui y présidait. En me voyant tout autre qu'il ne m'avait vu auparavant, et, par la pénétration de son esprit, s'apercevant bien de l'étonnement et de l'admiration où j'étais, il comprit facilement quelle était la cause de ma stupeur et de mon ravissement. (...)
Source : Livres-mystiques.com
Que Jésus Miséricordieux vous b énisse
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