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FSSP: un séminariste en mission en Syrie auprès des chrétiens d’Orient
par Chicoutimi 2017-12-06 08:08:11
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Une nouvelle de la confraternité Saint-Pierre:

Un séminariste en Syrie

Un séminariste de la FSSP nous raconte sa mission en Syrie auprès des chrétiens d’Orient.

Le 02/12/2017

Pour voir toutes les photos.

Voici le récit de sa mission pendant l'été 2017:

''Suite à une proposition du séminaire Saint-Pierre, j’ai décidé de partir trois semaines à l’été 2017 à la rencontre des Syriens dans le cadre offert par l’association SOS Chrétiens d’Orient. Cette association vise à apporter un soutien psychologique, spirituel et matériel aux populations chrétiennes du Proche et du Moyen-Orient, victimes des guerres et des conflits religieux. Depuis juin 2015, elle favorise l’accueil de volontaires souhaitant apporter une aide concrète aux Syriens et partager leur vie quotidienne.

La Syrie est riche d’une histoire plurimillénaire. Elle a été intégrée à de nombreux empires et royaumes : perse, macédonien, séleucide, romain, omeyyade, ottoman... Cette terre semi-désertique et aride a été le berceau d’une des plus anciennes communautés chrétiennes de l’histoire. Avant la guerre qui a commencé en 2011, les chrétiens représentaient un peu moins de 10% de la population (répartis en de nombreuses Eglises : syriaques catholiques et orthodoxes, grecs catholiques et orthodoxes, maronites, arméniens, assyriens chaldéens ou apostoliques, catholiques latins et diverses communautés protestantes) ils jouissaient de la liberté de culte et étaient pleinement intégrés à la société syrienne en dépit des restrictions dans la sphère politique. Les chrétiens de Syrie forment une communauté globalement prospère et éduquée - en particulier les populations urbaines - souvent anglophones, parfois francophones, ils sont dans tout les cas assez occidentalisés.

Mon voyage a commencé à Damas au QG de l’association où j’ai reçu une courte formation sur la sécurité et des rappels de secourisme. Au bout de trois jours, mes autorisations de déplacement sur le territoire en poche, j’ai été envoyé en mission à Homs, ville au centre de la Syrie. Après une traversée du pays en taxi sans encombre, malgré de nombreux « checks-points » contrôlés par les militaires et de multiples arrêts de routine, nous sommes arrivés à Homs. Dès les premiers instants je fus marqué par deux choses : l’ampleur des dégâts et le relatif dépeuplement de cette ville pourtant grande (la troisième du pays par sa population avant la guerre). Après un accueil chaleureux par les volontaires de SOS j’ai rapidement eu un briefing sur la situation générale à Homs, le fonctionnement de l’antenne et les consignes de sécurité spécifiques à respecter.

La situation à Homs étant stable depuis un moment (la ville a été reprise il y a deux ans mais les derniers combats ont eu lieu en mai 2017), il n’y avait plus d’action sanitaire d’urgence. Pendant les dix premiers jours j’ai rejoint le chantier de l’église Mar Maroun, au programme : enduit pour boucher les impacts de balle et peinture blanche sur tous les murs et plafonds. Ensuite j’ai effectué des tâches administratives (comptabilité, dossier de projets etc.) et je suis allé à la rencontre des Syriens avec mon chef d’antenne pour faire connaître l’association et comprendre leurs besoins (visite aux prêtres, évêques et familles de différentes communautés).

L’une des missions principales est de développer des projets sociaux de long terme. Par exemple, nous avons envisagé la possibilité d’ouvrir un centre étudiant avec bibliothèque et foyer permettant aux jeunes d’étudier dans le calme mais aussi de se rencontrer. Retisser des liens entre les communautés est l’un des grands défis de la période qui s’ouvre. En collaboration étroite avec le clergé local, SOS s’efforce de redonner confiance en l’avenir et de susciter des investissements pérennes pour favoriser la vie quotidienne.

Tout au long de mon séjour, j’ai également assumé un petit apostolat auprès des volontaires de SOS aux profils variés : jeunes catholiques engagés, jeunes professionnels déboussolés par la décadence occidentale, étudiants et jeunes professionnels syriens désireux de s’investir dans la reconstruction de leur pays. Grâce au règlement de l’association et à la bienveillance de mon chef d’antenne, j’ai organisé des temps de prière en groupe avec les jeunes et les ai initiés à la récitation du chapelet. J’ai également profité des occasions offertes par les débats et discussions du soir pour distiller des éléments catéchétiques et stimuler la réflexion de ces jeunes en quête d’absolu. A mon grand étonnement, j’ai constaté de grosses lacunes doctrinales, catéchétiques et spirituelles chez les chrétiens d’Orient, malgré une foi encore vive et une piété sincère.

Les jeunes, qui n’ont connu que la guerre et ses affres depuis presque sept ans, ont souvent une foi assez identitaire qui ressemble plus à un marqueur d’appartenance à une communauté qu’à un engagement intégral à la suite du Christ. Influencé par les médias, facebook, les séries américaines et toutes sortes de pollutions occidentales, de nombreux jeunes Syriens, après avoir connu les privations et avoir parfois frôlé la mort (quand ils n’ont pas vu leurs proches mourir sous leurs yeux), aspirent à une vie dans la richesse et le plaisir. Ils lorgnent vers l’Occident dont ils se figurent qu’il est un havre chrétien de paix et de prospérité (!). La tentation de l’émigration est un vrai piège pour eux, car une fois arrivés en Europe ou en Amérique ils se retrouvent livrés à eux-mêmes dans nos sociétés sécularisées et individualistes. Coupés de leurs racines et de leurs communautés religieuses (qui sont relativement protectrices), ces jeunes gens sont en grand danger. C’est ainsi avec tristesse que j’ai entendu des récits de jeunes gens partis pour chercher une « vie meilleure » en Occident et qui s’abîmaient dans les chimères occidentales (alcool, boîtes de nuit…).

Seule la proximité avec Dieu et l’intime conviction qu’Il est auprès de nous en tout temps peut nous donner la paix intérieure et donc le bonheur !

Les discours plus réalistes des volontaires français ont néanmoins permis aux jeunes de Homs que nous avons côtoyés d’ouvrir les yeux sur la misère morale et religieuse de nos pays. Par nos modestes actions là-bas et par le soutien que nous leur apportons, nous sommes en mesure de stimuler les Syriens à s’impliquer avec ardeur et enthousiasme dans la reconstruction de leur pays.

Qu’en est-il de cette guerre qui a ravagé le pays ?

La première chose qui nous frappe quand on en parle avec les gens c’est la différence d’appréciation de la situation par rapport à ce que nous en disent les médias occidentaux. Ne vous y trompez pas, qu’ils soient combattants du Front Al-Nosra, de « l’Armée Syrienne Libre » ou de Daech, tous sont équivalemment considérés comme des terroristes par la population locale. En Syrie personne ne parle de « rebelles modérés ». Cette expression n’a aucun sens pour tous ces gens qui ont essuyé les tirs de roquettes et de kalachnikov et qui ont perdu familles et amis.

En effet quelques jours passés en Syrie suffisent à vous persuader d’une chose : cette guerre est à la fois absurde et horriblement compliquée. Dans les villes les plus dévastées par la guerre (Homs, Alep …), à tous les coins de rues on trouve des minarets et des mosquées (et pas seulement des églises !) criblés de balles voire en ruine. Tous les repères sont brouillés. Bien que la majorité de la population soit loyaliste, il s’agit d’une sorte de guerre civile « internationalisée » (avec de nombreux belligérants étrangers). C’est une guerre multiforme qui a ravagé la Syrie, une guerre plurielle pourrait-on dire tant les différents facteurs qui l’expliquent sont variés voire contradictoires mais se sont superposés pour alimenter le chaos. Grâce à l’action efficace de la Russie et au soutien notable de l’Iran, l’armée régulière syrienne chargée de défendre le pays a repris ces derniers mois le contrôle d’une majorité des territoires nationaux … mais à quel prix !

Homs, une ville dévastée par les combats. Cependant, comme l’a dit le président Al-Assad dans son discours aux diplomates en août dernier : « le prix de la résistance est très inférieur à celui de la capitulation ». C’est bien le sentiment que j’ai pu relever chez certaines familles chrétiennes. Elles ont tout perdu à cause du conflit, mais leur foi chevillée au corps et leur confiance inébranlable dans le gouvernement quant à sa capacité à reconstruire une Syrie plus belle, plus forte, plus unie les fait aller de l’avant malgré tout. Beaucoup de Syriens soutiennent coûte que coûte le gouvernement (en dépit des injonctions et tractations internationales visant à écarter Assad), on ressent chez eux une vraie fierté nationale et un fervent sentiment patriotique … même si une certaine lassitude quant aux efforts de guerre commence à se faire jour (service militaire illimité, pénurie etc.).

Cette guerre n’a pas seulement fait des milliers de morts, ni même causé d’innombrables dégâts matériels, mais elle a fracturé durablement les populations qui cohabitaient tant bien que mal jusqu’ici dans une paix et à un niveau de vie décent de façon assez étonnante. La guerre a évidemment fragilisé l’union nationale. Une certaine méfiance réciproque s’est installée dans les quartiers, dans les villages.

L’équilibre politique et social relativement fragile sur lequel reposait le bon ordre de la nation a subi un choc profond qui va laisser durablement des séquelles. Le clergé et les autorités ainsi que les diverses organisations œuvrant là-bas cherchent aussi à panser ces blessures… La reconstruction est lancée mais elle sera longue : d’abord parce que la guerre n’est pas encore achevée, ensuite parce qu’on perçoit un certain attentisme d’une partie de la population qui ne sait pas encore ce que lui réserve la Syrie de demain ; et enfin parce qu’une partie de la population éduquée et formée a opté ces dernières années pour l’émigration, privant la Syrie d’une partie de ses élites. Le repli communautaire et les doutes quant à l’avenir de certaines communautés ne facilitent pas la reconstruction qui nécessite la coopération et l’union de toutes les forces vives du pays.

Ma courte expérience en Syrie m’aura permis de découvrir une réalité complexe et contrastée, difficile à cerner en si peu de temps. Entre les moments de joie et de détente (visite privée du Krak des chevaliers, baptême maronite, jeux de ballon avec les enfants, échanges avec les jeunes, visites des écoles), les temps de chantier et de rencontre et les temps émouvants liturgiques et spirituels auprès de ceux qui ont tout perdu ; l’Orient m’a révélé quelques unes de ces mille et une fascinantes et étonnantes facettes !

Ayons à cœur de prier ardemment pour nos frères chrétiens d’Orient (si chaleureux et accueillants !), afin qu’ils soient avant tout des exemples vivants de la charité du Christ, et que leur esprit de foi illumine ces régions aux prises avec l’obscurantisme et le fanatisme; et afin qu’ils soient également préservés de la ténébreuse décadence européenne.''

Source

     

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      Source par Ritter  (2017-12-06 21:47:33)


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