L’abbé Joseph Rey sur le long chemin de la béatification

L’abbé Joseph Rey est mort en 1874 à Cîteaux, en Bourgogne. Son corps et son cœur ont été rapatriés dans la maison mère auprès des Petites Sœurs de Saint-Joseph de Montgay, à Fontaines.


« Le jour où il sera béatifié, peut-être que je le verrai de là-haut ». Sœur Marie des Neiges sourit en montrant le ciel. La supérieure argentine des Petites Sœurs de Saint-Joseph a 92 ans. Elle sait qu’elle ne verra pas forcément la cérémonie de béatification de l’abbé Joseph Rey, car le processus peut être long. Même très long. N’est pas Jean-Paul II qui veut (sa béatification a eu lieu en 2011, six ans seulement après sa mort). « C’est long car l’abbé Joseph Rey n’est pas connu. Ma plus grande joie serait qu’il soit béatifié. Il faut être patient. Nous prions tous les jours pour cela », poursuit sœur Marie des Neiges.

L’abbé n’est pas un illustre inconnu. Mais il faut bien avouer que les fidèles ne se bousculent pas pour aller prier sur sa tombe, située dans la chapelle de Montgay. Même si de nombreux Argentins (pays où la congrégation des Petites Sœurs de Saint-Joseph est beaucoup plus présente) passent à Fontaines pour coucher leurs prières sur le papier du vieux cahier posé sur le marbre du tombeau. « C’était quelqu’un de très connu de son vivant ! Il avait fondé à Cîteaux le plus grand établissement français privé accueillant des enfants. Ils étaient 930 orphelins, vagabonds, jeunes délinquants… que l’État ne pouvait pas prendre en charge », détaille Victor Degorgue qui a monté le dossier de l’abbé Rey.

Un précurseur de la protection des enfants
« C’est un homme qui a donné sa vie pour sauver des enfants en difficulté. Donner sa chance à tout le monde à travers l’éducation, afin que ces jeunes puissent bâtir une vie normale : c’était son œuvre », poursuit Victor Degorgue. Un engagement personnel total pour une cause très novatrice au XIXe siècle. « Il s’est occupé d’enfants des rues en disant que la prison n’était pas une solution. Qu’il fallait les éduquer, les former pour l’avenir. C’était un précurseur de la protection des enfants », complète sœur Perla Baez.

Reste à faire connaître le fondateur de leur congrégation. Le père Sébastien Guegen, qui vient célébrer la messe deux fois par semaine à la chapelle de Montgay, l’admet : « On connaît du père Rey davantage les fruits que l’arbre. Les sœurs se sont occupées d’enfants ici à Montgay. Elles ont fait un gros travail sur l’insertion avec des orphelins, des cas sociaux. Elles ont aidé beaucoup d’enfants à s’en sortir. » Jean-Claude, un fidèle, affirme : « Aujourd’hui, plus que jamais, les hommes qui ont saisi que la jeunesse était en danger et qui s’en occupent, ont toute leur place. »

LE PROGRES

De Lyon à Rome : parcours d’une béatification

Tout a commencé le 12 juin 2007 quand l’archevêque de Lyon, le cardinal Philippe Barbarin, a décrété l’ouverture de la cause de béatification de l’abbé Joseph Rey. Le point de départ d’un tel parcours se situe en effet toujours au niveau du diocèse. À la base, c’est le diocèse de Dijon (dans lequel est décédé l’abbé) qui aurait dû instruire le dossier, mais Rome a donné l’autorisation à Lyon (son diocèse de naissance) de le faire.

Depuis 2007 et la signature du « décret d’introduction canonique » de la cause du père Joseph Rey par Mgr Barbarin, quelques années ont passé. Le temps nécessaire à l’instruction du dossier par une commission composée notamment de plusieurs historiens, de théologiens, de membres du clergé et d’un « postulateur » de la cause qui joue un peu le rôle de coordinateur. Une tâche qui consiste, par exemple, à rassembler un maximum d’écrits sur le père Joseph Rey. Exercice compliqué car il n’a, lui-même, pas laissé de textes.

La clôture de la cause au niveau diocésain a eu lieu en 2012.

C’est ensuite Rome qui a pris le relais avec la congrégation pour la cause des saints qui instruit les dossiers.

« Un miracle est en cours d’analyse »

« Pour être béatifié, il faudrait qu’un miracle lié au père Rey soit reconnu par Rome1. Il y en a un qui est en cours d’analyse. Il s’agit d’un Paraguayen qui a eu un AVC en 1997. Le médecin estimait qu’il n’y avait rien à faire. Après des semaines dans le coma, sa fille a récité la prière du père Rey. Son père s’est réveillé sans aucune séquelle. »

1- Le miracle ne serait plus une condition sine qua non pour une béatification.

DOSSIER RÉALISÉ PAR SANDRINE MANGENOT (AVEC VÉRONIQUE GARCIA)

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