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Ave Maria
par Abbé Néri 2014-11-20 18:54:26
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« Bienheureuse Marie, Mère de Dieu * toujours vierge, temple du Seigneur, sanctuaire du Saint-Esprit, vous seule avez plu à notre Seigneur Jésus-Christ d’une manière sans exemple, alléluia. »

L’Eglise se plaît à chanter dans la liturgie les louanges de la très sainte Vierge Marie, l’antienne des vêpres nous fait entrer dans la fête de ce soir et nous donne le motif que nous avons dans cette occasion de l’honorer : Temple du Seigneur et Sanctuaire du Saint-Esprit.

Au jour de la fête de la Présentation de Marie au Temple, la liturgie se réfère à des textes non canoniques. Comme les évangiles ne parlent pas de l'enfance de la Vierge, des auteurs inconnus, pour contenter de pieuses curiosités, l'ont racontée en donnant d'aimables détails sur sa venue, enfant, au Temple de Jérusalem.

Le principal de ces textes a été traduit au XVI° siècle par l'érudit français Postel qui l'a intitulé le Protévangile de Jacques (premier évangile), c'est, sans doute, le plus ancien évangile de l'enfance, composé au milieu du II° siècle et probablement en Egypte ; le texte nous est parvenu dans des versions en grec, syriaque, arménien, éthiopien, géorgien, vieux-slave.

C’est pourquoi dans le sinaxaire maronite il est dit :

« La tradition rapporte que la Vierge Marie fut présentée au temple à l'âge de deux ou trois ans, car ses parents l'avaient consacrée au Seigneur. Marie vécut dans le temple, dans les habitations réservées aux femmes pieuses, jusqu'à l'âge de treize ans. »

Ce texte qui se présente comme l'œuvre de Jacques le Mineur est déjà évoqué par saint Justin (mort vers 165) dans le Dialogue avec Tryphon et Origène s'y réfère explicitement dans le Commentaire de S. Matthieu.

Il s'agit de la vie de Marie racontée en style merveilleux et sans souci de vraisemblance géographique. Voici le récit :

« Les mois se succédèrent pour la petite fille. Lorsqu'elle eut deux ans, Joachim dit :

Menons-la au Temple du Seigneur, afin que s'accomplisse la promesse que nous avons faite, sinon le Tout-Puissant nous avertirait et l'offrande que nous lui ferions serait rejetée.

Mais Anne répondit :

Attendons la troisième année pour que l'enfant soit en âge de reconnaître son père et sa mère.

Et Joachim répondit : Attendons !

Lorsque la petite fille eut trois ans, Joachim dit :

Appelez les filles d'Hébreux de race pure, et qu'elles prennent chacune un flambeau, un flambeau qui ne s'éteindra pas. L'enfant ne devra pas retourner en arrière et son cœur ne se fixera pas hors du Temple du Seigneur.

Elles obéirent à cet ordre et elles montèrent ensemble au Temple du Seigneur.

Et le prêtre accueillit l'enfant et la prit dans ses bras. Il la bénit, en disant :

Il a glorifié ton nom, le Seigneur, dans toutes les générations. C'est en toi qu'aux derniers jours il révélera la Rédemption qu'il accorde aux fils d'Israël !

Et il fit asseoir l'enfant sur le troisième degré de l'autel. Et le Seigneur Dieu fit descendre sa grâce sur elle. Et, debout sur ses pieds, elle se mit à danser. Et elle fut chère à toute la maison d'Israël.

Les parents redescendirent du Temple, et ils étaient remplis d'admiration, et ils louaient Dieu l'enfant ne s'était pas retournée en arrière.

Et Marie demeurait dans le Temple du Seigneur, semblable à une colombe, et la main d'un Ange la nourrissait. »

L'origine de la fête de la Présentation de la Vierge Marie au Temple serait peut-être palestinienne puisque la vie de saint Jean le Silentiaire, écrite au milieu du VI° siècle par Cyrille de Scythopolis, nous apprend qu'en novembre 543, à Jérusalem, eut lieu la dédicace de la basilique Sainte-Marie-la-Neuve.

En tous cas, à Constantinople, la fête de la Présentation de Marie est attestée dès le VIII° siècle, et des homélies de saint André de Crête (mort en 740) lui sont consacrées.

Introduite en Avignon au XIVe siècle, la fête de la Présentation est reconnue par le pape Grégoire XI en 1372. Elle ne sera cependant inscrite au calendrier liturgique d’Occident qu’en 1585, par le pape Sixte V, eu égard à l’interprétation symbolique qu’on peut en donner :

Marie est le modèle de l’Eglise, qui comme elle, se consacre au service de son Dieu par un don total de tout son être.

La Vierge est aussi le véritable Temple où Dieu établira sa demeure au moment de l’Annonciation, préfigurant ainsi la Jérusalem céleste dont l’Agneau qui demeure en son milieu, est l’unique flambeau (Ap 21,23).

Cette fête établit ainsi un lien entre le Temple ancien de pierre, et l’Arche de la Nouvelle Alliance, le sein très pur de la Vierge, sur laquelle descendra bientôt la gloire du Dieu vivant.

« Ouvrez-vous, sanctuaire, portes éternelles ! Voici le temple qu'on présente au temple, le sanctuaire au sanctuaire, l'arche véritable où repose le Seigneur effectivement à l'arche figurative où il ne repose qu'en image. »

Dira Bossuet avec éloquence. Et saint François de Sales :

« O mon Dieu, que j'eusse bien désiré de me pouvoir vivement représenter la consolation et suavité de ce voyage depuis la maison de Joachim jusque au Temple de Jérusalem !

Quel contentement témoignait cette petite Infante voyant l'heure venue qu'elle avait tant désirée !

Ceux qui allaient au Temple pour y adorer et offrir leurs présents à la divine Majesté chantaient tout au long de leur voyage ; et pour cet effet le royal prophète David avait composé tout exprès un psaume que la Sainte Eglise nous fait dire tous les jours au divin office. Il commence par ces mots :

Bienheureux sont ceux, Seigneur qui marchent en ta voie sans macule (Psaume CXVIII), sans tache de péché ; en ta voie, c'est-à-dire en l'observance de tes commandements.

Les bienheureux saint Joachim et sainte Anne chantaient donc ce cantique au long du chemin, et notre glorieuse Dame et maîtresse avec eux.

O Dieu, quelle mélodie ! O qu'elle l'entonna mille fois plus gracieusement que ne firent jamais les anges ; de quoi ils furent tellement étonnés que, troupe à troupe, ils venaient pour écouter cette céleste harmonie et, les cieux ouverts, ils se penchaient sur les balustres de la Jérusalem céleste pour regarder et admirer cette très aimable Pouponne.

J'ai voulu dire ceci en passant à fin de vous bailler sujet de vous entretenir le reste de cette journée à considérer la suavité de ce voyage ; afin de vous émouvoir à écouter ce divin cantique que notre glorieuse Princesse entonne si mélodieusement, et ce avec les oreilles de votre dévotion, car le très heureux saint Bernard dit que la dévotion est l'oreille de l'âme. »

Pour entretenir en nous cette dévotion l’Eglise dans l’office nocturne du bréviaire nous fait lire ce passage de saint Jean Damascène :

« Joachim prit donc Anne pour femme, Anne vénérable et digne de louange.

Et, comme l'autre Anne qui, stérile, par prière et par vœu engendra Samuel, de même elle aussi, par prière et par vœu, obtint de Dieu la Théotokos et ne resta donc pas délaissée aux yeux de tous.

La grâce enfanta donc (c'est ce que veut dire le mot Anne) la Souveraine, car ce nom de Marie signifie cela et elle est bien souveraine de toute créature, puisque devenue Mère du Démiurge.

Elle est mise au monde dans la maison de la bergerie de Joachim et amenée au temple.

Plantée dans la terre de la maison de Dieu, nourrie par le Saint ¬Esprit, comme un olivier fécond, elle devint le lieu de toute vertu, ayant purgé son âme de toute convoitise charnelle de la vie et préservant ainsi la virginité de son âme avec celle du corps comme il convenait à celle qui allait recevoir Dieu dans son sein.

Car ce qui est saint repose dans ce qui est saint.

C'est ainsi qu'elle poursuit la sainteté et s'élève jusqu'à être le temple saint et admirable, digne du Dieu Très-Haut. » (Saint Jean Damascène - La foi orthodoxe - Livre IV, chap. 14)

Et, pour constater l’harmonie magnifique entre les docteurs d’orient et d’occident elle nous propose ses louanges de saint Ambroise :

« Quoi de plus noble que la mère de Dieu ?

Quoi de plus splendide que celle-là même qu'a choisie la splendeur ?

Quoi de plus chaste que celle qui a engendré le corps sans souillure corporelle ?

Et que dire de ses autres vertus ?

Elle était vierge, non seulement de corps, mais d'esprit, elle dont jamais les ruses du péché n'ont altéré la pureté :

• humble de cœur, réfléchie dans ses propos, prudente, avare de paroles, avide de lecture ;
• elle mettait son espoir non dans l'incertitude de ses richesses, mais dans la prière des pauvres ;
• appliquée à l'ouvrage, réservée, elle prenait pour juge de son âme non l'homme, mais Dieu ;
• ne blessant jamais, bienveillante à tous, pleine de respect pour les vieillards, sans jalousie pour ceux de son âge, elle fuyait la jactance, suivait la raison, aimait la vertu. » (Saint Ambroise - De Virginibus - P.L., 16, col. 209)

La fête de la présentation de Marie au Temple prolonge celle de sa nativité comme celle de son divin Fils, c’est pourquoi nous pouvons méditer avec fruit cette belle exposition de saint André de Crète :

« Aujourd'hui, Adam présente Marie à Dieu en notre nom comme les - prémices de notre nature.

Aujourd'hui, l'humanité, dans tout l'éclat de sa noblesse immaculée, reçoit le don de sa première formation par les mains divines et retrouve son ancienne beauté.

Les hontes du péché avaient obscurci la splendeur et les charmes de la nature humaine ; mais lorsque naît la Mère du Beau par excellence, cette nature recouvre en sa personne ses anciens privilèges et est façonnée suivant un modèle parfait et vraiment digne de Dieu.

Et cette formation est une parfaite restauration : et cette restauration une divinisation ; et celle-ci une assimilation à l'état primitif.....

Aujourd'hui la mère d'un fils sans père, naissant d'un sein stérile, sanctifie la génération naturelle. La nature humaine dépouillée revêt la dignité royale.

Et pour tout dire, en un mot, aujourd'hui la réformation de notre nature commence et le monde vieilli, soumis à une transformation toute divine, reçoit les prémices de la seconde création. » (Saint André de Crète – In Nativitatem B. Mariae)

« Marie est fille de Dieu, non seulement parce qu'elle est fille de la promesse, que sa naissance d'une mère stérile, annoncée à l'avance par un ange, est due à un miracle du Tout-Puissant, mais encore :

• parce qu'elle est une argile divinement façonnée par l'Artiste divin,
• un ferment saint pénétré de la vie divine,
• et que sa conception s'est produite par une intervention spéciale de Dieu.

Elle est la matière parfaitement assortie de la divine incarnation, l'argile divinement pétrie du tout-puissant et souverain Architecte d'où le super-substantiel a pris véritablement et complètement notre substance humaine pour notre salut. » (idem)


Deus, qui beátam Maríam semper Vírginem, Spíritus Sancti habitáculum, hodiérna die in templo præsentári voluísti : præsta, quǽsumus ; ut, eius intercessióne, in templo glóriæ tuæ præsentári mereámur. Per Dóminum . . . in unitáte eiúsdem.

O Dieu, qui avez voulu qu’en ce jour, la bienheureuse Marie toujours Vierge, en qui résidait l’Esprit-Saint, vous fût présentée au temple ; faites que, grâce à son intercession, nous méritions de vous être présentés dans le temple de votre gloire.

Si nous considérons avec attention les paroles de la collecte de la Messe nous pourrons mieux comprendre pourquoi Dom Guéranger dit :

« Mais la Présentation de Notre-Dame ouvre encore à l’Église d’autres horizons.

Au Cycle des Saints, dépourvu des frontières précises qui délimitent celui du Temps, le mystère du séjour de Marie dans le sanctuaire de l’ancienne alliance prélude, mieux que n’aurait pu faire aucun autre, à la saison si prochaine de l’Avent liturgique.

Marie, conduite au temple pour s’y préparer dans la retraite, l’humilité, l’amour, à ses incomparables destinées, eut aussi pour mission d’y parfaire, au pied des autels figuratifs, la prière de l’humanité trop impuissante à faire pleuvoir des cieux le Sauveur. [Isaïe. XLV, 8].

Elle fut, dit saint Bernardin de Sienne, le bienheureux couronnement de toute attente et demande de l’avènement du Fils de Dieu ; en elle, comme en un sommet, tous les désirs des saints qui l’avaient précédée eurent leur consommation et leur terme. » [Bernardin. Sen. Pro festivitatibus V. Marias, Sermo IV, art. 1, c. 3.].


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 Ave Maria par Abbé Néri  (2014-11-20 18:54:26)
      Superbe base à méditer et re-méditer par Glycéra  (2014-11-20 21:14:24)
          Personnellement.... par Lucas  (2014-11-21 08:33:17)
              J'aurais dû écrire... par Lucas  (2014-11-21 08:45:45)
      Merci, mais... par Paterculus  (2014-11-20 21:25:42)


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