Elle est donc partie, Mère Marie Dominique, s'éteignant à la fin d'une vie offerte et féconde, dans un magnifique et confiant abandon à la Miséricorde : prête.

Des souvenirs ? Beaucoup… pas assez ! Elle avait cet ascendant, cette sagesse, cette bonté et ce jugement ferme et énergique qui faisaient d'elle une maîtresse femme. Lumineuse comme le dit Daoudal. Lui parler, c'était se sentir enveloppé d'un regard et d'une présence qui renvoyaient vers les certitudes d'en haut. Je ne saurais dire combien je lui dois, à travers sa personne et à travers l'œuvre des Dominicaines du Saint-Esprit.

C'était une résistante. Pour la France (elle était la sœur du colonel Rémy), pour l'Eglise, pour la foi et la raison – ce couple malmené – et donc pour la vérité ; pour la liturgie traditionnelle. Dans les années 1970, Pontcalec était un havre de paix liturgique alors que le désert semblait gagner partout du terrain. Elle en était la prieure. Elle en imposait !

Jusqu'à la fin de sa vie, elle conserva l'exercice de son intelligence et de sa mémoire, aussi phénoménale qu'elle était attentive, aux choses de l'esprit comme aux personnes ; elle aurait pu je crois enseigner jusqu'au bout si ses forces ne l'avaient doucement quittée.

Je me souviens des dernières rencontres à la sortie de la messe : Mère Marie Dominique s'avançait, appuyée sur sa canne, d'un pas hésitant, mais elle avait l'œil vif et malicieux. Elle prenait avec délicatesse des nouvelles des uns et des autres ; elle commentait l'actualité avec un regard sûr. Mais on la voyait surtout tout doucement se rapprocher du ciel, remettant du coup toute vie en perspective.

Je n'oublierai pas ce privilège que j'eus de la voir aux alentours de la dernière Toussaint, ce fut une conversation intense et émouvante.

A l'immense gratitude s'ajoute la tristesse devant la mort et l'arrachement que j'imagine partagée par toutes les "anciennes" qui l'ont connue. Mais aussi la joie, car elle a donné en ces temps de désespérance et de révolte un exemple de vraie "mort douce" : la seule vraie, en fin de compte. C'est celle qui accueille paisiblement le mystère de la souffrance humaine en attendant l'heure de Dieu, dans la certitude que sa Miséricorde est plus puissante que tout.

Mère Marie Dominique a eu la grâce d'une mort magnifique ; elle laisse le souvenir d'un sourire que rien n'aura terni.

Qu'elle repose en paix. Et qu'elle veille sur nous.

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