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Qui se souvient des soixante fusillés de l’îlot du Talard ?
par Diafoirus 2013-04-25 19:12:00
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Qui se souvient des soixante fusillés de l’îlot du Talard ?

C’était à l’époque des « Lumières ». Des « Lumières » que l’œil de Caïn doit encore de nos jours bien regarder en face, et pour l’éternité. Nous sommes en novembre 1793.

Des hommes et des femmes du peuple, de tous les âges. Ils s’étaient révoltés contre les persécutions de la Terreur, pour protéger leur foi et leurs biens. Ils s’étaient admirablement battus et avaient remporté bien des victoires. Ils avaient reconquis leurs libertés. Leur liberté. Et puis un jour, à Cholet, le vent tourna, et le vent de Galerne les poussa hors de leurs frontières, au nord de la Loire, sur des terres inconnues où ils espéraient trouver des renforts. Des quatre départements vendéens, de bataille en bataille, de victoires en défaites, ils arrivèrent jusqu’à Dol. Dol de Bretagne. Là, 22 000 républicains les attendaient. Kléber, Marceau, Westermann…

Pendant trois heures, au lever du jour, profusion d’héroïsme dans les landes et les forêts couvertes de brouillard. A un moment, les Vendéens décrochèrent et, comme cela arrive parfois, un mouvement de panique s’empara de cette foule de paysans entourés de leurs familles. Alors, comme à Tiffauges, leurs familles et les prêtres leur rappelèrent rudement leur devoir, et ils remontèrent à l’assaut jusqu’à la victoire. Culbutés, les Bleus refluèrent honteusement jusqu’à Rennes.

Une fois de plus, les Vendéens avaient été à la hauteur de leur cause. Dans leur fuite, les Bleus emmenèrent quelques prisonniers, pour leur appliquer légalement et démocratiquement la force injuste de la loi, face aux justes forces de la foi et du cœur. Ils se donnèrent le mal de les transporter jusqu’à Saint-Malo, où siégeait une commission militaire révolutionnaire. Là régnait le conventionnel Le Carpentier, bourgeois montagnard pur jus très fier du sang qu’il avait sur les mains. L’homme qui sauva Granville de l’attaque vendéenne, qui déporta des prêtres au Cap Vert, qui n’hésita pas à envoyer une mère de treize enfants à l’échafaud, qui envoya Marie-Charlotte Hébert de la Maillardère, une aristocrate qui refusait ses avances, sous le couteau national, place Saint-Thomas.

Les prisonniers furent interrogés puis divisés en deux. Certains furent renvoyés vers le « Tribunal criminel du département » pour y être rejugés. On ne saura jamais ce qu’ils devinrent. Nombre d’entre les autres bénéficièrent d’un inutile « délai destiné à leur permettre de démontrer leur innocence » évidemment impossible à prouver. Au nombre de soixante, on les emmena à la Grand’grève de l’îlot du Talard pour y être fusillés dans le dos, face à la mer. On raconte « qu’un coup de vent enleva le chapeau de l’un des Vendéens et l’envoya à la mer, le condamné y entra pour le récupérer et revint prendre sa place dans le rang des victimes ».

Déchu, le proconsul criminel finit ses jours à la prison du Mont-Libre, ci-devant Mont Saint-Michel… où il servit la messe jusqu’à sa mort. Son cadavre fut décapité pour servir à la science via le système de Gall. Jusqu’en 1815, à la cathédrale de Saint-Malo, on célébra une messe commémorative pour le repos de l’âme des fusillés. Après, ce fut l’oubli. Jusqu’en 1907 lorsque des travaux de nivellement dans les dunes du Talard firent ressortir des ossements des sables.

Parmi les soixante victimes de l’intolérance, jugées « révolutionnairement », comme cela s’inscrivit sur les jugements, on relève de nombreux hommes originaires d’Europe centrale, de Vendée, de l’itinéraire de la Virée de Galerne, et de toute la France : Genouillac, ex-Chartreux, 66 ans, Barbin, 42 ans, prêtre, Pajaud, 27 ans, de l’île de Saint-Domingue, Body, 26 ans, de Saint-Laurent sur Sèvre, Vignarski, 23 ans, de Varsovie, Legendre, 22 ans, de Montaigu, Schwint, 21 ans, de Roumanie, Huret, 20 ans, de Nantes, Hinec, 20 ans, de Bohême, Ganachaux, 19 ans, d’Oudun, Steinenger, 19 ans, du Bas-Rhin, Paumiler, 18 ans, de Belgrade, Marolleau, 18 ans, de Cercueil, Rochard, 18 ans, de Saint-Laurent-de-la-Plaine, Trouvé, 17 ans, de Saint-Lambert, Bagrin, 17 ans, de Saint-Julien-du-Conseil, Deluman, 16 ans, de Cholet… Et des femmes : Le Meillec, 25 ans, de Beaupréau, Carteau, 25 ans, de Châtillon, Jobard, 25 ans, de Saint-André-de-la-Marche, Legros, 24 ans, de de Saint-Florent, Oger, 19 ans, de Saint-Florent…

On raconte encore que, sur la Chaussée de Paramé, face à l’océan, la Croix du Sillon gémit même par grand calme, et que c’est les « gas » de Vendée pris à Clos-Poulet qui demandent une prière.

Bernard Chupin

Références :

— Annales de la Société Historique et archéologique de Saint-Malo.

— Hippolyte Harvut, Les fusillés du Talard, 1907.


Article extrait du n° 7840 de Présent
du Mercredi 24 avril 2013

     

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 Peillon prédicateur de la religion révolutionnaire par Escartefigue  (2013-04-25 10:09:51)
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